LES FASTES DE LA COMÉDIE FRANÇAISE, ET PORTRAITS DES PLUS CÉLÈBRES ACTEURS QUI SE SONT ILLUSTRÉS, ET DE CEUX QUI S'ILLUSTRENT ENCORE SUR NOTRE THEATRE; PRÉCÉDÉS D'UN APERÇU SUR SA SITUATION PRÉSENTE, ET SUR LES MOYENS PROPRES A PRÉVENIR SA RUINE. Par Poicord aine, Ancien Officier supérieur, Auteur des Réflexions sur l'art théâtral; du TOME PREMIER. A PARIS, Chez ALEXANDRE, fondé de pouvoirs de l'Editeur, rue du DELAUNAY, Libraire, Palais-Royal, galerie de bois, no 243; Et MONGIE aîné, Libraire, boulevart Poissonnière, no 18. 1821. 662479-013 LES FASTES DE LA COMÉDIE FRANÇAISE. APERÇU Sur la situation présente de notre scène, et sur les moyens propres à prévenir sa ruine. L'on ne doit point s'attendre à trouver des détails sur l'origine du théâtre français, dans un ouvrage qui n'a pour but que de célébrer les grands talens qui l'ont illustré, et d'indiquer des moyens efficaces pour arrêter non seulement les rapides progrès de sa décadence, mais encore pour lui rendre cette splendeur qui lui donna la suprématie sur les théâtres des autres nations. Je me bornerai donc à faire connaître l'épo- que de l'établissement de la Comédie française. Les aïeux du grand Corneille ne furent pas plus fameux que les aïeux de Sophocle; et il y a aussi loin de Thespis au premier poëte tragique d'Athènes, que des auteurs des mystères du quinzième siècle au père de notre tragédie. Il y a lieu d'être étonné du changement que le spectacle apporta dans nos mœurs et dans nos usages, et de l'agrandissement de nos idées; et cela dans un court espace de temps, depuis Charles V jusqu'à Henri II. C'est sous le règne de ce monarque que Jodelle fit représenter quelques pièces moins irrégulières que celles de ses prédécesseurs. L'on vit ensuite Baïf sous Charles IX, Garnier sous Henri III et sous Henri IV, Hardi, Mairet, Tristan, et enfin Corneille Louis XIII. sous Charles VI accorda, en 1402, des lettrespatentes aux frères de la Passion établis en l'église de la Trinité, rue Saint-Denis, qui leur donnèrent le droit de faire représenter des mystères; et c'est l'année 1680 que Louis XIV réunit la troupe qui jouait la comédie à l'hôtel de Bourgogne à celle qui avait son théâtre rue Mazarine, vis-à-vis la rue Guénégaud; et qu'il ordonna par une lettre de cachet à M. de La Reynie, lieutenant-général de police, de A ne permettre l'établissement d'aucune autre troupe dans Paris. Cette réunion fonda la Comédie française. Je ne m'appesantirai point non plus sur ce que j'ai dit et répété depuis plus de vingt ans, soit dans des écrits particuliers, soit dans des journaux, de relatif à la marche rapide de l'art théâtral vers sa ruine; mais je crois pouvoir avancer avec assurance que la destruction de la comédie française est sur le point d'être consommée. Je crois même superflu de reproduire les causes qui ont accéléré la décadence du théâtre français, et je pense que l'on ne doit s'occuper maintenant que du soin d'en rassembler les débris pour reconstruire l'édifice. Si le critique impartial, qui a consacré sa plume à la défense de la vérité et aux progrès des arts, s'est naguère trouvé en butte aux clameurs de ces faiseurs d'articles, qui, écho vénal et complaisant des auteurs de la dégradation de la comédie, niaient hardiment la décadence du théâtre, et essayaient d'en imposer en distribuant, avec une audace que l'on peut appeler cynique, les éloges les plus outrés à la médiocrité, l'ensemble misérable que présentent nos spectacles ne justifie que trop l'écrivain prévoyant qui avait signalé les |