çoit le clavier divisé par octaves depuis la pre mière tonique : la plus basse octave s'appelle A, la seconde B, la troisième C, etc.; de façon qu'écrivant au commencement d'un air la lettre correspondante à l'octave dans laquelle se trouve la première note de cet air, sa position précise est connue, et les points vous conduisent ensuite partout sans équivoque. De là découle encore généralement et sans exception le moyen d'exprimer les rapports et tous les intervalles, tant en montant qu'en descendant, des reprises et des rondeaux, comme on le verra détaillé dans mon grand projet. La corde du ton, le mode (car je le distingue aussi) et l'octave étant ainsi bien désignés, il faudra se servir de la transposition pour les instrumens comme pour la voix, ce qui n'aura nulle difficulté pour les musiciens instruits, comme ils doivent l'être, des tons et des intervalles naturels à chaque mode, et de la manière de les trouver sur leurs instrumens; il en résultera au contraire cet avantage important, qu'il ne sera pas plus difficile de transporter toutes sortes d'airs un demiton ou un ton plus haut ou plus bas, suivant le besoin, que de les jouer sur un ton naturel; ou, s'il s'y trouve quelque peine, elle dépendra uniquement de linstrument, et jamais de la note, qui, pár le changement d'un seul signe, représentera le même air sur quelque ton que l'on veuille proposer: de sorte enfin qu'un orchestre entier, sur un simple avertissement du maître, exécuterait sur-le-champ en mi ou en sol une pièce notée en fa, en la, en si bémol, ou en tout autre ton imaginable; chose impossible à pratiquer dans la musique ordinaire, et dont l'utilité se fait assez sentir à ceux qui fréquentent les concerts. En général, ce qu'on appelle chanter et exécuter au naturel est peut-être ce qu'il y a de plus mal imaginé dans la musique ; car si les noms des notes ont quelque utilité réelle, ce ne peut être que pour exprimer certains rapports, certaines affections déterminées dans les progressions des sons. Or, dès que le ton change, les rapports des sons et la progression changeant aussi, la raison dit qu'il faut de même changer les noms des notes en les rapportant par analogie au nouveau ton; sans quoi l'on renverse le sens des noms, et l'on ôte aux mots le seul avantage qu'ils puissent avoir, qui est d'exciter d'autres idées avec celles des sons. Le passage du mi au fa, ou du si à l'ut, excite naturellement dans l'esprit du musicien l'idée du demi-ton. Cependant, si l'on est dans le ton de si ou dans celui de mi, l'intervalle du si à l'ut, ou du mi au fa, est toujours d'un ton, et jamais d'un demi-ton. Donc, au lieu de conserver des noms qui trompent l'esprit et qui choquent l'oreille exercée par une différente habitude, il est important de leur en appliquer d'autres, dont le sens connu, au lieu d'ètre contradictoire, annonce les intervalles qu'ils doivent exprimer. Or, tous les rapports des sons du système diatonique se trouvent exprimés, dans le majeur, tant en montant qu'en descendant, dans l'octave comprise entre deux ut, suivant l'ordre naturel, et dans le mineur, dans l'octave comprise entre deux la, suivant le même ordre en descendant seulement; car, en montant, le mode mineur est assujetti à des affections différentes qui présentent de nouvelles réflexions pour la théorie, lesquelles ne sont pas aujourd'hui de mon sujet, et qui ne font rien au système que je propose. J'en appelle à l'expérience sur la peine qu'ont les écoliers à entonner, par les noms primitifs, des airs qu'ils chantent avec toute la facilité du monde au moyen de la transposition, pourvu, toujours, qu'ils aient acquis la longue et nécessaire habitude de lire les bémols et les dièses des clefs, qui font, avec leurs huit positions, quatre-vingts combinaisons inutiles et toutes retranchées par ma méthode. Il s'ensuit de là que les principes qu'on donne pour jouer des instrumens ne valent rien du tout; et je suis sûr qu'il n'y a pas un bon musicien qui, après avoir préludé dans le ton où il doit jouer, ne fasse plus d'attention dans son jeu au degré du ton où il se trouve, qu'au dièse ou au bémol qui l'affecte. Qu'on apprenne aux écoliers à bien connaître les deux modes et la disposition régulière des sons convenables à chacun, qu'on les exerce à préluder en majeur et en mineur sur tous les sons de l'instrument, chose qu'il faut toujours savoir, quelque méthode qu'on adopte; alors, qu'on leur mette ma musique entre les mains, j'ose rẻpondre qu'elle ne les embarrassera pas un quart d'heure. On serait surpris si l'on faisait attention à la quantité de livres et de préceptes qu'on a donnés sur la transposition; ces gammes, ces échelles, ces clefs supposées, font le fatras le plus ennuyeux qu'on puisse imaginer; et tout cela, faute d'avoir fait cette réflexion très-simple, que, dès que la corde fondamentale du ton est connue sur le clavier naturel comme tonique, c'est-à-dire comme ut ou la, elle détermine seule le rapport et le ton de toutes les autres notes, sans égard à l'ordre primitif. Avant que de parler des changemens de ton, il faut expliquer les altérations accidentelles des sons qui s'y présentent à tout moment. Le dièse s'exprime par une petite ligne qui croise la note en montant de gauche à droite. Sol diésé par exemple, s'exprime ainsi, 5, fa diésé, ainsi, 4. Le bémol s'exprime aussi par une semblable ligne qui croise la note en descendant, 7, 2; et ces signes, plus simples que ceux qui sont en usage, servent encore à montrer à l'œil le genre d'altération qu'ils causent. Le bécarre n'a d'utilité que par le mauvais choix du dièse et du bémol; et, dès que les signes qui les expriment seront inhérens à la note, le bé carre deviendra entièrement superflu: je le re tranche donc comme inutile; je le retranche encore comune équivoque, puisque les musiciens s'en servent souvent en deux sens absolument opposés, et laissent ainsi l'écolier dans une incertitude continuelle sur son véritable effet. A l'égard des changemens de ton, soit pour passer du majeur au mineur, ou d'une tonique à une autre, il n'est question que d'exprimer la première note de ce changement, de manière à représenter ce qu'elle était dans te ton d'où l'on sort, et ce qu'elle est dans celui où l'on entre; ce que l'on fait par une double note séparée par une petite ligne horizontale comme dans les fractions: le chiffre qui est au-dessus exprime la note dans le ton d'où l'on sort, et celui de dessous représente la même note dans le ton où l'on entre; en un mot, le chiffre inférieur indique le nom de la note, et le chiffre supérieur sert à en trouver le ton. Voilà pour exprimer tous les sons imaginables en quelque ton que l'on puisse être ou que l'on veuille entrer. Il faut passer à présent à la seconde partie, qui traite des valeurs des notes et de leurs mouvemens. Les musiciens reconnaissent au moins qua torze mesures différentes dans la musique: me sures dont la distinction brouille l'esprit des écohiers pendant un temps infini. Or je soutiens que tous les mouvemens de ces différentes mesures se réduisent uniquement à deux; savoir, mouve |