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PANTHEON LITTÉRAIRE

LETTRES

ÉDIFIANTES ET CURIEUSES

II

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ÉDIFIANTES ET CURIEUSES

CONCERNANT

L'ASIE, L'AFRIQUE ET L'AMÉRIQUE

AVEC

QUELQUES RELATIONS NOUVELLES DES MISSIONS

ET DES NOTES GÉOGRAPHIQUES ET HISTORIQUES.

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tentant pour vivre de quelques morceaux de cassave qu'il recevoit d'eux en échange. Lorsque, après s'être bien fatigué tout le jour, il arrivoit le soir dans quelque pauvre habitation, son plaisir étoit d'y manquer de tout, jamais plus gai ni plus content que quand il se voyoit accablé du travail de la journée et dans la disette des choses les plus nécessaires à réparer ses forces.

Il vivoit de même que ces sauvages, de poisson et de cassave, (c'est un pain fait de la racine de manioc 1): il logcoit avec eux dans un coin de ce qu'ils appellent le carbet, (c'est une espèce de longue grange faite de roseaux, exposée aux injures de l'air et remplie d'une infinité d'insectes très-importuns), mais il étoit moins sensible à ces incommodités, qu'au peu de disposition qu'il trouvoit dans ces peuples à pratiquer les vérités qu'il leur Parmi plusieurs traits extraordinaires de annonçoit. Leur extrême indolence et leur in- son zèle, je n'en choisirai qu'un seul, qui vous constance naturelle s'opposoient au désir qu'il en fera connoître l'étendue. Il apprit qu'un avoit de leur conversion. C'est pourquoi il ne esclave s'étoit blessé et étoit en danger de mouconféra le saint baptême qu'à un petit nombre rir sans confession. La cabane de ce malheud'adultes sur la persévérance desquels il pou-reux étoit fort éloignée de la maison: le père de voit compter, et il borna son zèle à baptiser Creuilly, suivant les mouvemens ordinaires de les enfants qui étoient en danger de mort. Mais par ses sucurs et par ses travaux il fraya le chemin à d'autres missionnaires qui ont achevé son ouvrage, et l'on a aujourd'hui la consolation de voir plusieurs peuplades d'In-pens dont la morsure est très-dangereuse, et diens qui ont reçu le baptême et qui mènent une vie édifiante et conforme à la sainteté du christianisme.

sa charité, partit sur l'heure à pied, et après avoir long-temps erré dans un bois où il s'égara, il se trouva à l'entrée d'une prairie toute inondée, remplie d'herbes piquantes et de ser

aperçut alors une misérable cabane qu'il crut être la demeure de ce pauvre esclave. Aussitôt, sans hésiter un moment, il se jette dans la praiToutes ses vues se tournèrent ensuite du rie et la traverse ayant de l'eau jusqu'aux épaucôté des nègres esclaves. L'humiliation de leur les. Lorsqu'il en sortit, il se trouva tout ensanétat excita sa charité: il a travaillé près de glanté et il eut le chagrin de ne rencontrer pervingt ans à leur sanctification. Il étoit presque sonne dans la cabane, qui étoit abandonnée. toujours en course, exposé aux ardeurs d'un Tout trempé qu'il étoit, il ne laissa pas de consoleil brûlant ou à des pluies continuelles, qui tinuer sa route, avec la même ardeur vers l'ensont très-incommodes en certains temps de droit qu'on lui avoit désigné. Enfin il arrive à l'année. S'il se trouvoit dans un canot avec les la cabane du nègre, qu'il trouva dans un état nègres, il ramoit souvent en leur place, et digne de compassion. Il le confessa, il le conquand quelques-uns d'eux étoient incommo-sola et fournit à ses besoins autant que sa paudés, il leur distribuoit ses provisions, se con- vreté pouvoit le lui permettre. Lorsqu'il retourna le soir à la maison, à peine pouvoit-il se soutenir.

'Jatropha manioc, la racine de cette plante, mangée sans préparation, est un poison mortel pour les hommes et pour les animaux. Le suc de rocou est le contre-poison, mais il faut le prendre aussitôt, car si on tarde une demi-heure le remède est sans effet. Pour enlever le suc corrosif du manioc on presse fortement cette racine, puis on la réduit en farine et on en fait du pain d'une qualité excellente. Le suc exprimé du manioc a la blancheur et l'odeur du lait d'amande : on

Personne ici ne doute que ces sortes de fatigues jointes à ses jeûnes et à ses continuelles austérités n'aient abrégé ses jours et hâté le moment de sa mort. Nous n'oublierons jamais les grands exemples de vertu qu'il nous a laissés. Bien qu'il fût d'une complexion vive et pleine de feu, il s'étoit tellement vaincu lui-même Lè robau ou roucou, est un petit arbrisseau; sa graine qu'on l'eût cru d'un tempérament froid et moinfusée et macérée donne une pâte rouge dont les pein-déré. Son visage et son air ne respiroient que

en fait de l'amidon.

tres font usage. Elle a l'odeur de violette, mais cette odeur se perd dans la traversée d'Amérique en Eu-douceur. Tous les emplois lui étoient indifférens, et il ne marquoit d'inclination que pour

rope.

Le rocou de la Guyane est très-estimé, et indé- les plus humilians et les plus pénibles, s'estipendamment de ses heureux effets contre l'empoi-mant toujours inférieur à ceux qu'on lui consonnement par le manioc, il fortifie l'estomac et on fioit. Comme il se croyoit le dernier des misl'emploie avec succès dans les inflammations d'entrailles. sionnaires, il les regardoit tous avec une sin

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