La foi qui n'agit point, est-ce une foi sincère? ABNER. Eh! que puis-je au milieu de ce peuple abatlu ? Benjamin est sans force et Juda sans vertu. Le jour qui de leurs rois vit éteindre la race, Eteignit tout le feu de leur antique audace. Dieu même, disent-ils, s'est retiré de nous; De l'honneur des Hébreux autrefois si jaloux, Et sa miséricorde à la fin s'est lassée. On ne voit plus pour nous ses redoutables mains JOAD. Et quel temps fut jamais si fertile en miracles ? Quand Dieu par plus d'effets montra-t-il son pouvoir ? Auras-tu donc toujours des yeux pour ne point voir, Peuple ingrat? Quoi ! toujours les plus grandes merveilles, Sans ébranler ton cœur, frapperont tes oreilles ? Faut-il, Abner, faut-il vous rappeler le cours Des prodiges fameux accomplis en nos jours? Des tyrans d'Israël les célèbres disgrâces, Et Dieu trouvé fidèle en toutes ses menaces ? L'impie Achab détruit, et de son sang trempé Le champ que par le meurtre il avait usurpé; Près de ce champ fatal Jézabel immolée ; : Reconnaissez, Abner, à ces traits éclatants, Et son peuple est toujours présent à sa mémoire. ABNER. Mais où sont ces honneurs à David tant promis, Et prédits même encore à Salomon son fils ? Hélas! nous espérions que de leur race heureuse Devait sortir de rois une suite nombreuse; Que, sur toute tribu, sur toute nation, L'un d'eux établirait sa domination, Ferait cesser partout la discorde et la guerre, Et verrait à ses pieds tous les rois de la terre. JOAD. Aux promesses du ciel pourquoi renoncez-vous ? ABNER, Ce roi, fils de David, où le chercherons-nous ? Le ciel même peut-il réparer les ruines De cet arbre séché jusque dans ses racines? Les morts, après huit ans, sortent-ils du tombeau ? Ah ! si dans sa fureur elle s'était trompée ! Si du sang de nos rois quelque goutte échappée... JOAD. Eh bien ! que feriez-vous? ABNER. O jour heureux pour moi! De quelle ardeur j'irais reconnaître mon roi ! massacrés par la mère. JOAD. Je ne m'explique point; mais, quand l'astre du jour RACINE. SEIZIÈME DISCOURS. HUITIÈME EXERCICE. Le singe qui montre la lanterne magique. Messieurs La fable est, sans contredit, ce qu'il y a de plus difficile à dire. D'abord, il faut que le ton qui convient au genre de la pensée morale qu'elle renferme domine le débit; qu'ensuite on raconte l'anecdote inventée par le poète, comme si elle nous était arrivée; de plus, qu'on mette en action les différents personnages que l'auteur fait agir dans son drame, en ayant soin de conserver à chacun son caractère. Ainsi, l'on est tout à la fois narrateur et acteur. La grande difficulté consiste donc à quitter et reprendre le ton de la narration; car les personnages qui s'y trouvent intercalés ne doivent en rien l'altérer. C'est du passage continuel de la narration à l'action et de l'action à la narration que naît la variété, qui donne tant de charme au débit des fables. Pour les bien dire, |