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ENCYCLOPÉDIQUE,

OU

JOURNAL DES SCIENCES.
DES LETTRES ET DES ARTS;
RÉDIGÉ

PAR A. L. MILLIN,

Membre de l'INSTITUT et de la Légion d'Honneur, Conservateur
des Médailles, des Pierres gravées et des Antiques de la Bi-
bliothéque impériale, Professeur d'Archeologie, Membre de
la Société royale des Sciences de Gættingue, de l'Académie
royale de Munich, de celle de Vilna, de l'Académie ita-
lienne, de celle de Turin, de celle des Curieux de la Nature à
Erlang, des Sciences physiques de Zurich, d'Histoire naturelle
et de Minéralogie d'Iéna, de l'Académie royale de Dublin, de
la Société Linnéenne de Londres, impériale d'Histoire natu-
relle de Moscou ; des Sociétés d'Histoire naturelle, Philoma-
thique, Galvanique, Celtique, Médicale d'émulation, de
l'Athénée des Arts de Paris; des Académies de Lyon, de
Rouen, d'Abbeville, de Boulogne, de Poitiers, de Niort,
de Nîmes, de Marseille, d'Alençon, de Caen, de Grenoble,
de Colmar, de Nancy, de Gap, de Strasbourg, de Mayenco,
de Nantes, de Soissons, de Lille, d'Evreux, etc.

ANNÉE 1809.
TOME I.

PARIS,

Au Bureau du MAGASIN ENCYCLOPÉDIQUE, chez
Gabriel Dufour et Compagnie, libraires, rue
des Mathurins S. Jacques, n.° 7.

IMPRIMERIE DE J. B. SAJOU, RUE DE LA HARPE, n.oII.

ENCYCLOPÉDIQUE.

LITTÉRATURE.

DISCOURS sur les vices du langage judiciaire; par M. BERRIAT SAINT-PRIX, professeur à l'école spéciale de droit de Grenoble (1).

DANS quelque genre que l'on compose,

l'élocution est une des parties de l'art d'écrire, auxquelles on doit le plus s'attacher; surtout lorsqu'il s'agit d'ouvrages où l'on a pour but d'exciter les passions, de toucher le cœur, de flatter l'esprit, de séduire, pour ainsi dire la raison; et par conséquent des ouvrages propres au barreau non moins que de ceux de la chaire et du théâtre. C'est une vérité reconnue par tous les grands maîtres : elle n'a pas besoin de démonstration; si quelqu'un essayoit de la contester, il suffiroit sans doute pour le réduire

(1) Ce Discours a été lu, le 24 août 1807, à la séance publique de clôture de l'Ecole de droit, et au mois de mars suivant, à une des séances de l'Académie de Grenoble.

au silence, de lui rapporter que tous ceux qui se sont fait un nom dans l'art noble et difficile de la défense des citoyens, ont brillé par le style; de lui citer parmi les anciens, Démosthène et Eschines, Ciceron et Hortensius, et parmi les modernes, Cochin, Gerbier, Linguet, Loiseau de Mauléon, Dupáty, Target, Desèze, etc., quoique nous nous gardions pourtant de les mettre sur la même ligne que les quatre grands orateurs de la Grèce et de Rome.

Un bon style, et l'on sent que chaque espèce d'ouvrages à un style qui lui est propre, résulte en premier lieu de l'exactitude et de la propriété des expressions, et de la régularité des constructions (c'est-à-dire, de ce qu'on nomme la pureté, la correction); en second lieu, de l'élégance des termes et des tournures, de la précision et de la force de la période, de la vérité des images, de la vivacité des mouvemens, de la liaison des idées, etc., etc.

De toutes ces qualités, la correction est la plus essentielle; surtout, dit le poète,

Surtout qu'en vos écrits la langue révérée,

Dans les plus grands excès, vous soit toujours sacrée ;
Sans la langue, en un mot, l'auteur le plus divin
Est toujours, quoi qu'il fasse, un méchant écrivain.

Heureusement cette qualité est aussi celle qu'il dépend de tout le monde d'acquérir, car elle

n'exige que de l'étude et de l'application, tandis que les autres supposent pour la plupart des dispositions que la nature n'accorde pas à tous les hommes. Mais malheureusement aussi, c'est précisément la qualité dont on accuse les gens de loi de manquer. Cette imputation du plus célèbre écrivain du 18.* siécle (Voltaire) est fondée, au moins jusques à un certain point. Est-il possible de s'en affranchir, c'est-à-dire, peut-on avoir de la correction dans les ouvrages propres au barreau, comme dans ceux qui n'appartiennent qu'à la littérature? Quelles sont les causes de l'incorrection ancienne et actuelle ? Quels sont les moyens de l'éviter à l'avenir? Voilà les questions que je me propose de discuter.

PREMIÈRE QUESTION.

Est-il possible d'avoir de la correction dans les divers ouvrages dont s'occupent les gens de loi? L'affirmative de cette question ne nous semble pas difficile à démontrer. Pour admettre la négative, il faudroit supposer que les idées qu'on doit prendre dans ces ouvrages, sont d'un ordre tellement différent des idées ordinaires, qu'il seroit nécessaire d'employer à chaque instant des termes barbares ou vieillis, et des tournures entièrement opposées au génie de notre langue,

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