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rapporte à un substantif qui précède ou qui suit : Remettez ces livres chacun à sa place.

Chaque, autrefois chasque, vient du latin quisque, et chacun, en vieux français chasqu'un, représente quisque unus.

2. Nul et aucun sont des noms de nombre indéfinis dont. la signification est à peu près la même et qui peuvent s'employer absolument; ils désignent, par opposition au mot chaque, une exclusion complète de tous les individus qui composent une collection.

Aucun est composé de l'ancien mot alque (quelque) et de un, comme chacun est formé de chaque et de un. En luimême et de sa nature, ce mot est donc positif et signifie quelqu'un; mais aujourd'hui on ne peut presque plus l'employer qu'en l'associant à une négation exprimée ou sousentendue: Savez-vous quelque nouvelle? Aucune, c'est-àdire je n'en sais aucune.

Aucun se distingue de nul, qui est toujours négatif, en ce qu'il se rapporte ordinairement à un substantif qui précède ou suit: Aucun chemin de fleurs ne conduit à la gloire. Chacun a son goût; aucun n'a le même ; - tandis que nul peut s'employer absolument et sans rapport à un substantif exprimé: Nul n'est content de son sort.

Nul et aucun ne s'emploient ordinairement qu'au singulier: nul, nulle; aucun, aucune; mais ils se mettent nécessairement au pluriel devant des substantifs qui n'ont pas de singulier ou qui ont une acception particulière au pluriel : Nulles funérailles ne lui furent faites. Il n'a fait aucuns préparatifs.

Nul vient du latin nullus. Aliquis donna en vieux français alque, c'est-à-dire quelque, et en composition avec un : alqun, c'est-à-dire quelqu'un. Le sens positif de aucun s'est conservé fort tard: Phèdre était si succinct qu'aucuns l'en ont blâmé (La F.). Je l'essaie par la preuve d'aucuns de mes amis (Montaigne).

190. Les noms de nombre qui marquent la pluralité indéterminée sont quelque, plusieurs, certains, maint, divers, différents; ils s'emploient en parlant de ce qui peut être compté.

Certain et maint varient selon le genre et le nombre; quelque, seulement selon le nombre; divers et différents ne s'emploient qu'au pluriel et varient selon le genre; plusieurs est des deux genres et toujours au pluriel, il peut s'employer absolument.

Plusieurs, quelques et certains (au pluriel) sont opposés à un et à tous. Plusieurs est précis; quelques et certains sont vagues et indéterminés. Quelques répond à combien et a rapport au nombre seul, tandis que certains est relatif aussi à la qualité. L'idée de maint est plus étendue que celle de plusieurs. Plusieurs veut dire plus d'un; maint est presque l'équivalent de beaucoup, même de mille pris indéfiniment. -, Divers et différents signifient plusieurs choses qui n'ont pas les mêmes qualités ou propriétés: Quelques fautes suffisent pour vous perdre. Certains oiseaux voyagent. Maintes choses sont nécessaires à la vie. Il employa divers moyens. Ce mot a différents sens. Plusieurs pensent ainsi. Quelques vains lauriers que promette la guerre,

On peut être héros sans ravager la terre. (BOILEAU.) Quelque est adverbe et invariable: 1o Quand il est placé devant un nom de nombre et a le sens d'environ: Le général traversa le fleuve avec quelque sept cents hommes. Il y avait quelque vingt personnes; 2o Quand il signifie si et modifie un adjectif : Quelque étroites que soient les bornes du cœur, on n'est pas malheureux tant qu'on s'y enferme. (J.-J. Rousseau.)

191. Les noms de nombre indéfinis beaucoup, peu, trop, assez, quantité, la plupart, qui expriment une quantité indéterminée, sont de véritables substantifs qui sont suivis de la préposition de : Il a beaucoup d'argent. Il a peu d'instruction. Le lait sert de boisson à quantité de peuples. La plupart des hommes sont mécontents de leur sort.

Le substantif qui suit beaucoup, peu, guère, trop, assez, quantité, se met au singulier, si c'est un nom de matière : beaucoup d'argent, et au pluriel, si c'est un nom commun : peu d'amis.

Ces mots beaucoup, peu, etc., sont appelés adverbes de quantité dans la plupart des grammaires françaises, qui définissent pourtant l'adverbe << un mot qui se joint au verbe ou à l'adjectif pour en déterminer la signi fication ». Or, dans des phrases comme celles-ci: Il a beaucoup d'argent, il a peu d'instruction, où sont les verbes ou les adjectifs qui sont déterminés par beaucoup ou peu? Il est bien plus logique de dire que ces mots sont des noms de nombre qui expriment la quantité et peuvent aussi s'employer adverbialement, comme dans cette phrase: L'enfant parle beaucoup, il réfléchit peu.

Beaucoup, qui a remplacé moult, est la réunion des deux mots beau et coup, et signifie une grande quantité; beau avait le sens de grand, et l'on dit encore aujourd'hui un beau mangeur pour un grand mangeur; le mot coup, vieux français colp, est le latin colaphus, qui signifie coup de poing, soufflet, et qui a pris le sens de coup en général.

Assez (ad et satis) signifiait à l'origine beaucoup et se plaçait après le substantif: Je vous donnerai or et argent assez (Chanson de Roland), c'està-dire beaucoup d'or et d'argent.

Trop est le même mot que troupe; il exprimait en premier lieu une grande quantité en général, puis excès de quantité ou de mesure.

Peu vient du latin paucum, et l'ancienne langue l'employait encore adjectivement: poies choses = res paucæ.

Guère signifie beaucoup dans le vieux français; aujourd'hui il n'a le sens de peu que parce qu'on ne l'emploie plus qu'avec la négation ne : Il n'a guère d'argent.

La plupart est l'abréviation de la plus grande part.

CHAPITRE V.

DU PROΝΟΜ.

Du pronom en général.

192. Les personnes et les choses se désignent dans le discours, non-seulement par les noms, mais encore par des mots particuliers qu'on appelle pronoms, et qui remplissent dans la proposition les mêmes fonctions que les noms dont ils sont censés tenir la place.

Le nom ou substantif exprime une idée et désigne les personnes et les choses par leur nature, ou, en d'autres termes, par leurs qualités distinctives. Le pronom n'exprime pas une idée, mais un simple rapport; il désigne les ètres, non pas par leur nature, mais par leur relation au discours.

Pronom vient du latin pronomen, qui se met à la place (pro) du nom (nomen).

193. On distingue trois espèces de pronoms, savoir : les pronoms personnels, les pronoms démonstratifs et les pronoms interrogatifs.

1o Le pronom personnel désigne un être par le rôle qu'il joue dans le discours, comme la personne qui parle ou celle à qui l'on parle ou celle (personne ou chose) dont on parle. Je chante. La musique te plaît. Il le cherche.

2o Le pronom démonstratif distingue la personne ou la chose dont on parle de tout autre ètre dont il peut être question: Cet homme est celui dont je vous ai parlé. Ceci est à moi, cela est à vous.

3o Le pronom interrogatif met en question le rapport démonstratif aú moyen duquel la troisième personne est distinguée de tout autre être : Qui est cet homme? Que cherchez-vous?

Les pronoms interrogatifs et les pronoms démonstratifs sont corrélatifs, c'est-à-dire qu'ils correspondent entre eux comme questions et réponses, de telle sorte qu'à chaque interrogatif est opposé un démonstratif : Qui est le coupable? Celui-. Que cherchez-vous? Ceci. Quel estil? Il est tel. Comment se passa

allez-vous? .

l'affaire? L'affaire se passa ainsi.

Le pronom interrogatif s'appelle pronom relatif, lorsqu'il se rapporte à quelque chose qui a été exprimé dans une autre proposition et à quoi on ajoute, au moyen du pronom, une détermination plus précise: Heureux le peuple qui obéit aux lois.

194. Le nom sert à nommer les êtres par leurs qualités distinctives, et, dans ce cas, il est substantif, ou les qualités mêmes des êtres, et alors il est adjectif. Le pronom est mis pour le nom, ou, du moins, il en remplit la fonction, soit comme substantif, soit comme adjectif: il y a ainsi des pronoms substantifs et des pronoms adjectifs, et cette distinction s'applique aux trois grandes classes de pronoms:

1o Les pronoms substantifs désignent les êtres mêmes, et remplissent conséquemment dans la proposition les mêmes fonctions que les substantifs, c'est-à-dire qu'ils prennent la place du sujet, de l'objet, etc. Il (le père) lui (au fils) donne un livre. Je ne connais pas celui-ci (cet homme-ci). Qui est

venu?

2o Les pronoms adjectifs déterminent le substantif en exprimant un rapport (possessif ou démonstratif) à la personne qui parle. Ils font la fonction de l'article défini: Ma mère (la mère de moi) a envoyé son domestique (le domestique d'elle) à ton père (au père de toi). Cette fleur (la fleur désignée par celui qui parle) sent bon. Quel livre lisez-vous?

3o Il y a en outre les pronoms adverbiaux, qui marquent le lieu, le temps ou la manière de l'action exprimée par le verbe: Le livre est ici (près de moi ou à cette place). Il arriva alors (dans ce temps). Faites ainsi (de cette manière).

195. Les pronoms se classent donc comme suit :

A. PRONOMS PERSONNELS.

B. DÉMONSTRATIFS. C. INTERROGAT.

a) P. substantifs: me, moi, etc.
b) P. adjectifs: mon (=demoi) etc. cet (ce), cette.
ici, , etc.

c) P. adverbiaux: en, y.

ce, celui-ci, etc.

qui, que, quoi.
quel, quelle.
où, etc.

196. Des pronoms proprement dits on doit distinguer les pronoms indéfinis, comme on, rien, qui ne désignent les êtres que d'une manière tout à fait indéterminée comme personnes ou choses.

1. Des pronoms personnels.

197. Les pronoms personnels sont ceux qui désignent les personnes grammaticales.

On appelle personnes en grammaire les différents rôles que les personnes et les choses jouent dans le discours. Le langage, en effet, est comme un petit drame où il y a des personnages qui jouent des rôles différents. Le premier rôle est celui de la personne qui parle d'elle-même: Je plante un rosier; le second, celui de la personne à qui l'on parle d'elle-même: Tu dégrades la muraille; le troisième, celui de la personne (ou de la chose) dont on parle : Il (le général) ordonne la marche. Elle (la pluie) mouille les passants. Le pronom qui représente chacune de ces personnes ne la nomme pas; il la désigne seulement. Nous ne savons pas qui elle est, mais nous savons quel rôle elle joue dans le discours. Je peut être un médecin, un avocat, un marchand ou un laboureur, mais je est nécessairement celui qui parle de lui-même, comme tu est celui à qui l'on parle de luimême, et il ou elle la personne ou la chose dont on parle.

Le mot personne vient du latin persona, le masque dont les acteurs se couvraient le visage sur le théâtre, et par extension acteur, personnage, rôle. Ainsi être la première, la seconde ou la troisième personne, c'est jouer le premier, le second ou le troisième rôle dans le discours. Voilà

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