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Les rapports de temps et de durée ont la plus grande analogie avec ceux de lieu et de mouvement, et la simultanéité correspond au lieu, la postériorité à la direction , c'est-à-dire au point d'arrivée (à), et l'antériorité à la direction d'où on au point de départ (de). Aussi les rapports de temps sont-ils fréquemment exprimés par des prépositions de lieu, comme à, en, dans. A marque l'époque ou un point dans la durée: Je reviendrai à deux heures. En et dans Idésignent une période ou un espace de temps, seulement en est vague et dans précis : Je reviendrai en deux heures, j'emploierai deux heures à revenir, mais quand? c'est ce qui n'est point spécifié. Je reviendrai dans deux heures, c'est-à-dire après que deux heures se seront écoulées à partir de ce moment-ci.

Les prépositions de temps sont souvent sous-entendues : Les fourmis sont engourdies (durant) tout l'hiver.

1 3. Les propositions qui marquent la cause ou l'origine, le but et la manière correspondent à celles qui désignent le point de départ ou la direction d'où, le point d'arrivée ou la direction et le repos ou le lieu proprement dit. Ces prépositions sont : de, à cause de, la cause; pour, le but ou le résultat; en, par, avec, sans, selon, suivant, d'après, la manière ou la conformité. Il mourut de la fièvre. Pour un âne enlevé deux voleurs se battaient (La F.). On doit toujours agir d'après sa conscience.

Le moyen se rattache à la cause et ne doit pas être confondu avec l'instrument, qui rentre dans la manière. Ainsi, par ex., par diffère d'avec en ce qu'il marque le moyen, tandis qu'avec désigne l'instrument: Un criminel est garotté avec une corde par le bourreau. J'ai conquis ce poste par mon épée, et je saurai le défendre avec mon épée.

Les prépositions par, malgré, moyennant servent à marquer le moyen, et les prépositions à, de, sur, avec, l'instrument de l'action.

Avec désigne l'instrument sans aucune signification accessoire: couper avec un couteau; bâtir avec du bois. A marque non seulement l'instrument, mais encore la destination: dessiner à la plume.

Dans les verbes passifs, par s'emploie de préférence au propre et de au figuré: Il a été blessé par une arme à feu. Il est blessé de vos propos.

Sans est négatif; c'est pourquoi son complément ne prend pas l'article, si c'est un nom de matière; ainsi l'on dit avec de l'argent et sans argent.

4. Le complément indirect se lie au verbe par les deux prépositions qui ont la signification la plus générale et la moins précise, savoir: à, qui marque le terme où aboutit une action, et de, qui indique le point d'où elle part: Aspi-, rez à la perfection. Le travail nous préserve de l'ennui.

Le même verbe peut avoir plusieurs compléments ou circonstanciels marqués par des prépositions: La semaine prochaine, pour ta fête, je t'enverrai, par la poste, à ton nouveau domicile, un joli petit album. La nuit de la SaintBarthélemy, Coligny fut assassinė, dans son hôtel, au milieu de ses gens, par une bande de forcenės.

En pareil cas, pour faciliter l'analyse de la phrase, on peut placer tous Jes compléments en accolade après le verbe :

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Cette disposition montre du coup que les compléments, savoir l'accusatif album et le datif te sont unis immédiatement au verbe, tandis que les circonstanciels de temps (semaine), de lieu (domicile), de moyen (poste) et de but (fête) sont liés au verbe par les prépositions pendant, à, par, pour.

5. Les prépositions ne servent pas seulement à marquer le rapport objectif qui existe entre le verbe et son complément indirect ou circonstanciel; elles expriment encore le rapport qui lie un subst. à un autre subst. dont il est le complément déterminatif. Ce rapport se marque ordinairement par la préposition de: Le choix des (de les) amis est difficile. C'est un homme d'esprit.

Quelquefois le substantif, au lieu d'être suivi de la préposition de, garde la préposition du verbe d'où il dérive : Le séjour en plein air fortifie le corps, parce qu'on dit séjourner en plein air.

Dans le principe, la langue d'oïl ou ancien français, à défaut du génitif, dont elle n'avait pas hérité du latin, marquait le rapport de possession en plaçant, comme le faisaient déjà les Romains, le mot complément désignant la personne du possesseur avant le mot complété désignant l'objet possédé, et l'on traduisait pro Dei amore par pro Deo amur (Serment de Louis-le-Germanique) et Dei inimici par li Deo inimi, li Deu inimi ou anemi. Il nous est resté des traces de cette construction dans le nom d'une plante et dans celui d'un arbuste : chiendent (dent de chien), chèvrefeuille (feuille de chèvre), ainsi que dans la locution: Dieu merci, c'est-à-dire par la merci de Dieu. Dans la suite, on plaça le mot complément après le mot complété, et l'on dit li enemi Deu ou Dieu, au lieu de li Deu ou Dieu enemi. Ce tour subsiste encore dans l'expression de par le roi pour de part le roi, c'est-à-dire de la part du roi (Saint-Gabriel qui de part Deu le garde, dans la Ch. de Roland; ici de part est évidemment le lat. de parte); dans certains noms de fêtes, de lieux ou de bâtiments, comme la fête-Dieu (fête de Dieu), l'Hôtel-Dieu, Bois-le-Comte, rue Saint-Denis, ainsi que dans les jurons corbleu, morbleu, parbleu, mis pour cor ou corps Dieu (corps de Dieu): dans l'ancien français, on employait quelquefois le mot cors (corpus) dans le sens de personne, et l'on disait le cors le rei pour la personne du roi; de corps Dieu, on fit cordieu, que l'on transforma en corbieu, puis en corbleu, de crainte de prononcer un blasphème; de mort Dieu, par Dieu, nous avons fait de même morbleu, parbleu, etc.

Mais, outre le rapport de possession, le complément du nom peut encore en marquer d'autres, tels que celui de la partie au tout ou du particulier au général, celui de l'effet å la cause et celui du sujet à la qualité qui lui est propre. Ces rapports, au lieu d'être représentés en latin par le géni1 tif, l'étaient quelquefois par la préposition de, qui, marquant l'idée de séparation, d'extraction ou d'origine, se présentait d'elle-même pour remplacer les désinences casuelles quand elles vinrent à tomber. Or, cet emploi de la préposition de, déjà fréquent dans la moyenne et la basse latinité, devint de plus en plus général dans la langue d'oïl pour exprimer les différents rapports entre un substantif et son complément, si bien qu'au 14a siècle elle finit par les représenter tous, et entre autres celui de possession, qui, dans les siècles précédents, avait été marqué par le simple rapprochement des mots; ainsi, au lieu de la volonté Dieu, le corps nostre Seigneur, on dit la volonté de Dieu, le corps de notre Seigneur. Anciennement, le rapport de possession se marquait aussi par la préposition à, et l'on disait la maison à Martin pour la maison de Martin, la gent au roi pour les gens du roi; on trouve encore la mère au berger dans Marot, et nous avons conservé cette tournure dans les expressions la barque à Caron, la vache à Colas, ainsi que dans la locution proverbiale: disputer de la chape à l'évêque, qui signifie, dit l'Académie, disputer à qui appartiendra une chose qui n'est ou ne peut être à aucun de ceux qui se la disputent.

CHAPITRE IX.

DE LA CONJONCTION.

287. La conjonction joint deux propositions et montre leur relation logique ou grammaticale.

Conjonction vient du latin conjunctionem, proprement union.

288. D'après la forme, les conjonctions se divisent en conjonctions simples, comme et, car, or, que, et conjonctions composées ou locutions conjonctives, qui sont formées de participes, d'adverbes ou de prépositions combinés avec la conjonction que, comme pendant que, lorsque, avant que, jusqu'à ce que, parce que, puisque, etc.

Les conjonctions simples comprennent: 1o les anciennes conjonctions latines et (et), ni (nec), ou (aut), quand (quando), comme (quomodo), si (si), que (quod et quam); 2o les conjonctions qui dérivent de mots latins, mais qui, en français, ont changé de signification : mais, or, déjà expliqués (§ 282), donc (tunc), car (quare), qui en vieux franç. avait conservé son sens originaire de pourquoi : Je ne sais ni car ni comment; 3o certaines conjonctions aujourd'hui regardées comme simples, mais qui sont en réalité composées de mots distincts: encore, partant, aussi, ainsi, toutefois, déjà expliqués (§ 282), plutôt (plus tôt, p. potius), néanmoins, pour néant-moins, c'est-à-dire ne pas moins (nec ens minus, p. nihilo minus), et cependant, litt. pendant cela : Vous vous amusez, et cependant la nuit vient (Bescherelle).

289. D'après le sens, les conjonctions se divisent en conjonctions coordinatives, qui marquent un rapport logique entre deux pensées et lient par conséquent une proposition principale à une autre principale, et conjonctions subordinatives, qui marquent le rapport grammatical de la proposition accessoire à la principale.

1. Les conjonctions coordinatives se divisent d'abord en conjonctions pures et adverbes conjonctionnels.

a) Les conjonctions pures ne marquent que le rapport logique des pensées. Elles ne font pas partie d'une combi

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naison d'idées, et se placent en général au commencement de la proposition. Les seules conjonctions de cette espèce sont: et, mais, ou, car, or. Le plaisir de la vengeance passe, mais celui de la clémence reste.

b) Toutes les autres conjonctions, comme aussi, pourtant, d'ailleurs, etc., sont des adverbes conjonctionnels, qui expriment les rapports grammaticaux de la proposition et en même temps les rapports logiques des pensées. Tous les hommes recherchent les richesses; on voit toutefois peu d'hommes riches heureux.

On divise ensuite les conjonctions coordinatives, d'après les rapports logiques qu'elles expriment, en conjonctions copulatives, adversatives et causatives.

a) Les conjonctions copulatives marquent que deux ou plusieurs pensées sont dans un rapport d'addition, c'est-àdire que l'une étend ou développe le sens de l'autre. Ces conjonctions sont : 1o copulatives pures ou additives: et, ni, en outre, outre cela, d'ailleurs, de plus, au surplus, au reste; 2o augmentatives: non-seulement...mais encore (aussi), aussi; 3o ordinatives: d'abord, puis, ensuite, enfin; 4 partitives ou distributives: tantôt-tantôt, partie-partie. Elle bâtit un nid, pond, couve et fait éclore (La F.). Non-seulement on lui obéit, mais encore on aime à lui obéir (Fén).

b) Les conjonctions causatives marquent que l'une des deux pensées indique la cause de l'autre. Ce sont donc, ainsi, aussi, partant, par conséquent, c'est pourquoi, d'après cela, de , or, car. Je te rebats ce mot, car il vaut tout un livre (La F.).

c) Les conjonctions adversatives marquent que l'une des pensées exclut ou restreint l'autre. Ce sont : 1o les conjonctions exclusives: ne-mais, ne-plutôt, et les conjonctions disjonctives ou alternatives: ou-ou, autrement, sinon, etc.; 2o Les conjonctions restrictives: mais, au contraire, ceрепdant, toutefois, néanmoins, pourtant, du reste, etc. L'avare ne possède pas son bien, mais c'est son bien qui le possède. La faim regarde quelquefois à la porte de l'homme laborieux, mais elle n'ose pas y entrer.

2. La principale conjonction subordinative est que, qu'on appelle aussi article de la proposition (accessoire). La conjonction que, en se joignant à d'autres mots d'idée ou de rapport, forme une foule de locutions conjonctives, telles que: avant que, à mesure que, ainsi que, encore que, etc.

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