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B. Analyse syntaxique.

1. Analyse de la proposition simple.

478. Analyser une proposition, c'est la décomposer dans ses éléments (grammaticaux) ou mots, et dire la nature, la forme et le rôle ou la fonction de chacun d'eux. Mais pour bien faire connaître le rôle que les mots jouent dans le discours, il est nécessaire de décomposer d'abord la proposition dans ses différents termes, de trouver le sujet et l'attribut, ainsi que les membres accessoires (complément, circonstanciel, déterminatif), s'il y en a. L'analyse grammaticale implique donc ce qu'on appelle communément l'analyse logique; c'est pourquoi il convient de réunir ces deux espèces d'analyse sous la dénomination commune d'analyse syntaxique. ANALYSE ABRÉGÉE. On indique les membres ou termes de la proposition par les abréviations suivantes, placées audessus des mots qui servent à les exprimer :

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On indique la nature de chaque mot par les abréviations suivantes placées au-dessous :

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2o leurs formes grammaticales (pour les mots variables seulement), savoir: les modifications de genre et de nombre, de personne, de mode et de temps, selon la nature des mots;

3o leurs relations ou fonctions grammaticales, c'est-à-dire les rapports qui lient les mots entre eux dans la proposition. Soit cette proposition simple à analyser: Pierre voyage en Italie. On mettra dans la première colonne tous les mots de la phrase, et, pour chaque partie de l'analyse, il y aura une colonne spéciale, comme suit :

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On peut aussi n'employer que deux colonnes, et placer dans la première les mots à analyser, et dans la seconde les trois parties de l'analyse, comme dans les modèles suivants':

1. Aux petits des oiseaux Dieu donne la pâture (Rac.).

1. Аих2 = à prép., marque le rapport entre 3 et 8 (petits et donne). 2. art. déf., masc. plur., annonce que 3 est déterminé. subst.-adjectif, masc. pl., r. ind. de 8.

3. petits

4. des = de

5.

les

6. oiseaux

7. Dieu

8. donne

9. la

10. pâture

les

prép., marque le rapport entre 6 et 3.
art. déf., masc. pl., annonce que 6 est déterminé.
nom commun, m. pl., cp. déterminatif de 3.

nom propre, masc. sing., sujet de 8.

v. transitif, ind. prés., 3o pers. s., attribut.

art. déf., fém. s., annonce que 10 est déterminé.

nom abstrait, fém. s., r. direct de 8.

2. Ils se sont nui l'un à l'autre (§ 244).

1 Ils

2 se

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pr. pers. conjoint, 3a pers. m. pl., sujet de 3.

pr. pers. réfléchi, 3a pers. m. pl., r. ind. de 3.

v. réfléchi, ind. parfait, 3e pers. pl., attribut.

pr. indéfini, masc. s., sujet de 5.

v. intransit. sous-entendu, ind. parfait, 3e p. s., attribut.

prép., marque le rapport entre 7 et 5.

pr. indéfini, masc. s., r. indirect de 5.

2. Analyse de la proposition composée.

479. Analyser la proposition composée, c'est la décomposer dans ses éléments, qui ne sont plus les mots, mais les propositions, et indiquer la nature et la fonction de chacune d'elles.

1 V. d'autres exemples dans notre Cours gradué, p. 197 du Manuel du Maître.

2 Dire qu'un mot est contracté, c'est indiquer sa forme, ce n'est pas faire connaître sa nature. D'ailleurs, pour qu'il y ait contraction, il faut qu'il y ait au moins deux mots différents, dont la contraction, simple accident lexicologique, ne saurait changer la nature. Ainsi aux n'est pas un articie contracté, comme on le dit communément, mais c' st la contraction des deux mots à et les qu'en bonne grammaire on doit analysér séparément.

ANALYSE ABRÉGÉE. On désigne les propositions principales par les lettres majuscules A, B, C, etc., et les propositions accessoires, selon qu'elles sont adjectives, substantives, circonstancielles ou adverbiales, par les lettres initiales :

a, s, c, pour les accessoires de 1er rang, etc.

لار

c

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a3, 83, c3,

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2e rang.

3e rang.

Si la proposition accessoire est raccourcie ou contracte, on la désigne en soulignant la lettre qui en indique la nature: a, s, c, etc. Lorsque deux ou plusieurs accessoires sont coordonnées entre elles, on marque cette coordination par a', s', c'.

On souligne les conjonctions tant coordinatives que subordinatives.

La patience est amère, mais son fruit est doux. = A, B.
L'attelage suait, soufflait, était rendu. = ABC (contraction).
L'eau qui dort est pire que l'eau qui coule. = AaAca2.

L'envieux, mourant, éteindrait volontiers le soleil, afin que personne n'en jouit après lui (§ 398). = AaAc.

Quand on s'était bien repu et qu'on approchait de l'ivresse, on appelait les gladiateurs (§ 416). = cc'A.

La phrase 'surcomposée s'analyse de la même manière : les grandes divisions se marquent par A, B; si l'une d'elles est à son tour composée par coordination, on distingue ses subdivisions par les chiffres 1, 2, etc.; si elle est composée par subordination, on se sert des signes indiqués ci-dessus:

Les lois ressemblent aux habits: elles gênent un peu, mais elles préservent (§ 419). = A, 1B, 2B.

Les oreilles, toujours ouvertes (= si elles étaient toujours ouvertes), seraient exposées à la poussière et aux insectes, qui y causeraient de grandes douleurs; mais la cire dont elles sont garnies, arrête tous ces corps au passage. A сАа, ВаВ.

Il était, quand je l'eus, de grosseur raisonnable :
J'aurai, le revendant, de l'argent bel et bon. A сА, Вс В.

Tous les Grecs m'ont déjà menacé de leurs armes;
Mais, dussent-ils encore, en repassant les eaux,
Demander votre fils avec mille vaisseaux,
Coûtât-il tout le sang qu'Hélène a fait répandre,
Dussé-je après dix ans voir mon palais en cendre,
Je ne balance point, je vole à son secours,
Je défendrai sa vie aux dépens de mes jours (Rac.)

A
cc'

C

c'a с"

B1, B B

ANALYSE DÉTAILLÉE. Nous choisissons comme exemple la phrase citée au § 419 :

Un philosophe ancien voulait qu'on priât à haute voix, afin que chacun pût se convaincre qu'on ne demandait rien aux dieux dont on eût à rougir. = Ascs'a*.

Cette phrase de subordination renferme les propositions suivantes :

1. Un philosophe ancien voulait. Prop. principale. Un philosophe, sujet déterminé par ancien; voulait, attribut verbal, à l'indicatif, parce qu'il marque un fait.

2. Qu'on priât à haute voix. Prop. substantive exprimant le régime direct du verbe voulait, auquel elle est liée par la conj. que. On, sujet; priât, attribut verbal, au subj. parce qu'il dépend du verbe de volonté voulait (§ 428); à haute voix, circonstanciel de manière.

3. Afin que chacun pût se convainere. Prop. finale ou adverbiale de but, liée au verbe de la principale par afin que. Chacun, sujet; pût, attribut verbal, au subj. à cause de afin que (§ 448); convaincre, régime direct de pût; se, régime direct de convaincre.

4. Qu'on ne demandait rien aux dieux. Prop. accessoire de 2e rang, substantive, exprimant le régime indirect du verbe convaincre, auquel elle est liée par la conj. que. On, sujet; demandait, attribut verbal, à l'ind. parce qu'il dépend du verbe déclaratif se convaincre (§ 428); rien, régime direct (accusatif); aux dieux, régime indirect (datif).

5. Dont on eût à rougir. Prop. accessoire de 3o rang, adjective déterminative, liée au pronom indéfini rien par le relatif dont. On, sujet; eût, attribut verbal, aŭ subj. parce qu'il dépend d'une prop. négative (§ 432); à rougir, régime direct de eût; dont, régime indirect de rougir.

III. MODÈLE DE DICTÉE ORTHOGRAPHIQUE.

La Folie' de Charles VI, roi de France.

5

Charles VI chevauchait courbé sur les rènes, suant sous sa lourde robe de velours noir. Tout à coup un homme demi-nu s'élance d'un taillis, arrête son cheval par la bride et lui crie: << Roi, ne chevauche pas plus avant, mais retourne sur tes pas, va-t'en au plus vite, car tu es trahi! >>> D'où sortait ce fantôme de mauvais augure? Fut-ce' une simple hallucination ou un audacieux guet-apens dont Charles VI fut la victime? Pour le moyen âge c'était une apparition de l'Esprit prophétique qui habite les forêts; mais l'histoire moderne n'y a vu qu'un épouvantail aposté pour éteindre brusquement cette raison déjà vacillante. Quoi qu'il en soit, c'est une scène digne de Shakespeare que cette attaque inopinée de la Folie embusquée au coin d'un bois, et tuant à bout portant la raison d'un roi. Ne semble-t-il pas voir le Chevalier d'Albert Dürer, cheminant dans les hautes futaies", à côté du hideux squelette qui se penche sous la visière de son casque et lui ricane au visage? Le roi se cabra devant le spectre hagard qui lui barrait le passage, puis il rentra dans son noir silence, obsédé par d'étranges visions et couvant le délire qui fermentait dans sa tête avant d'éclater. La forêt donnait dans une lande brûlée et aride, le soleil redoublait d'ardeur. Le chroniqueur Froissard insiste sur cette température de mirage qui dut sans doute grossir démesurément aux yeux du malade l'apparition fantastique. La lance d'un page à demi endormi sur son cheval heurte le casque de son compagnon; le choc retentit dans la cervelle ébranlée du roi avec la vibration de milliers d'armes traîtresses subitement tirées du fourreau. Il se dresse en sursaut et galope, l'épée nue, dans la plaine, frappant, tuant au hasard... Il ne s'arrête qu'avec son cheval harassé et presque raidi de fatigue. On le désarme, on le couche par terre. Les yeux lui roulaient dans la tête : on eût dit un possédé 13.

Il était fou, et sa folie semble avoir été cultivée avec soin par des mains savantes. On livra aux sorciers le pauvre roi, dût-il en mourir 14. Deux diables, devenus vieux, qui s'étaient faits ermites, lui cuisinèrent des remèdes dans la marmite du sabbat. Cette douche de philtres ne fit que fêler davantage sa tête détraquée. Dans ses rares instants de convalescence, on le laissait se rejeter dans l'orgie et simuler la démence qui l'attendait pour le reprendre à la porte. Ce qui l'acheva, ce fut ce bal macabre" où, déguisé en satyre 11, il vit ses compagnons de mascarade prendre feu" aux torches par le poil hérissé de leurs peaux de bêtes, flamber vifs et rôtir sur place. Il ne se remit jamais plus de cette vision de l'enfer. (D'après Paul de Saint-Victor.)

17

Folie étant le mot principal du titre s'écrit avec une majuscule. De même plus bas: la Folie, l'Esprit prophétique, parce qu'il y a personnification, et le Chevalier, ou plutôt le Cheval de la mort, parce que c'est le titre d'un chef-d'œuvre d'Albert Dürer.

• C'est une erreur de croire que l'accent circonflexe indique que la voyelle est longue; ainsi, pour ne citer qu'un exemple, le o bref de côté a l'accent circonflexe, tandis que le o long de zone ne l'a pas (§ 52). Rêne a l'accent circonflexe, parce qu'autrefois on écrivait resgne (it. redina, prov.

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