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CON

Jephté: on les appelle Oratorio ; & Métaftafe en a donné des modèles admirables, dont le plus célèbre eft, avec raison, le facrifice d'Abraham.

Ón a fait au Concert fpirituel de Paris quelques foibles effais dans ce genre; mais à préfent que la Mufique va prendre en France un plus grand effor, & qu'on fait mieux ce qu'elle demande pour etre touchante & fublime, il y a tout lieu de croire qu'elle fera dans le facré les mêmes progrés que dans le profane. Voy. LYRIQUE, &c. (M. MARMONTEL.)

(N.) CONCESSION. f. f. Figure de pensée par raifonnement, qui confifte à accorder quelque chofe à celui contre qui on parle, pour en tirer enfuite un plus grand avantage. Voici comment Maffilion détermine les bornes du refpect humain. ( Mardi de la II. femaine de Carême, Sur le Refpeal humain. Part. I.)

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» Je fais qu'il eft des bienséances inévitables, que » la piété la plus attentive ne peut refufer aux ulages; que la charité eft prudente & prend diffé>> rentes formes; qu'il faut favoir quelquefois ctre » foible avec les foibles; & qu'il y a fouvent de la » vertu & du mérite à favoir être à propos, pour » ainsi dire, moins vertueux & moins parfait. Mais » je dis que tout ménagement qui ne tend qu'à per

fuader au Monde que nous approuvons encore les » abus & fes maximes, & qu'à nous mettre à cou» verf de la réputation de ferviteurs de Jésus-Chrift » comme d'un titre de honte & d'infamie, est une » diffimulation criminelle, injurieufe à la majefté » de la Religion, & moins digne d'excufe que le » dérèglement ouvert & déclaré. «

Voici un autre exemple de Boileau. (Sat. V. 9-20.)
Je veux que la valeur de fes aïeux antiques
Ait fourni de matière aux plus vieilles chroniques;
Et que l'un des Capets, pour honorer leur nom,
Ait de trois fleurs de lis doté leur écuffon.
Que fert ce vain amas d'une inutile gloire,
Si de tant de héros, célèbres dans l'Hiftoire,
Il ne peut rien offrir aux yeux de l'univers,
Que de vieux parchemins qu'ont épargnés les vers:
Si, tout forti qu'il eft d'une fource divine,
Son cœur dément en lui fa fuperbe origine;
Et n'ayant rien de grand qu'une fotte fierté,
S'endort dans une lâche & motle oifiveté?

Quelques-uns donnent à cette figure le nom grec d'Épitrope, qui veut dire Permiffion, & qui a par là le meme fens que Conceffion: mais je crois qu'il vaut mieux confacrer le nom d'Épiurope à une autre figure, voifine en effet de la Conceffion, mais qui en eft très-différente. ( Voyez ÉPITROPE:) D'autres la nomment Parhomologie; mot inutile pour nous, puifque l'ufage a prévalu en faveur de Conceffion. Poyez PARHOMOLOGIE. ) ( M. BEAUZÉE. ).

CONCETTI, C. m. (Gramm. & Rhet.) Ce mot nous vient des italiens, chez qui il n'est pas

pris en mauvaise part comme parmi nous. Nous
nous en fommes fervis pour défigner indiftin&e-
ment toutes les pointes d'elprit recherchées, que
le bon goût profcrit. (AL. DIDEROT.)

(N.) CONCLUSION, CONSÉQUENCE. Syn.
Ces deux termes font fynonymes, en ce qu'ils
défignent également des idées dépendantes de quel-
ques autres idées.

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1

Dans un raifonnement, la Conclufion eft la propofition qui fuit de celles qu'on a employées comme principes, & que l'on nomme PRÉMISSES; la Conféquence eft la liaison de la Conclufion, avec les prémiffes.

Une Conclufion peut être vraie, quoique la Confequence foit fauffe: il fuffit, pour l'un, qu'elle énonce une vérité réelle; & pour l'autre, qu'elle n'ait au cune liaison avec les prémifles. Au contraire une Conclufion peut être fauffe, quoique la Conféquence elle peut énoncer foit vraie c'eft que, d'une part, : un jugement faux; & de l'autre part, avoir une liai dont l'une au fon néceflaire avec les prémifles moins dans ce cas eft elle-même fauffe.

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Quand la Conclufion eft vraie, & la Conféquence faufle; on doit nier la Confequence, & on le peut fans bleffer la vérité de la Conclufion': c'eft qu'alors la négation ne tombe que fur la liaison de cette propofition avec les prémiffes. Quand au contraire la Conclufion eft fauife, & la Conféquence vraie; on peut accorder la Conféquence fans admettre la fauffeté énoncée dans la Conclufion: ce qu'on accorde ne tombe alors que fur la liaison de cette propofition avec les prémiffes, & non fur la valeur même de la propofition.

Pour un raifonnement parfait, il faut de la vérité dans toutes les propofitions, & ure Conféquence jufte entre les prémiffes & la Conclufion. La plus mauvaise espèce feroit celle dont la Conclufion & la Conféquence feroient également faufles ; ce ne feroit pas même un raisonnement.

La Conclufion d'un ouvrage en eft quelquefois la récapitulation; quelquefois c'eft le fommaire d'une doctrine dont l'ouvrage a expofé ou établi les principes. Les diverfes propofitions qui énoncent cette doctrine fondée fur les principes de l'ouvrage, fans y être expreffément comprifes, font ce qu'on en appelle les Conséquences. ( M. BEAUZÉE.)

rents

(N.) CONCLUSION, CONSÉQUENT. Syn. C'eft, fous deux noms & fous deux aspects difféla propofition déduite des prémiffes d'un raifonnement. Quard on l'appelie Conclufion, on la regarde fimplement comme poftérieure aux prémiffes, dans le quelles elle doit être comprise : quand on l'appelle Conféquent, on la regarde comme déduite des prémiffes, dont elle est une fuite néceflaire.

Lorsqu'on admet certains principes, on en tire des Conclufions abfurdes par des raisonnements en bonne forme: alors l'abfurdité du Conféquent reLII 2

tombe fur les prémisses, parce que le faux ne peut avoir avec le vrai aucune liaison néceffaire.

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Si le Conféquent eft équivoque, de manière que dans l'un des fens il foit bien déduit des prémilles & qu'il y tienne, & que dans l'autre fens il en foit mal déduit faute de liaison; c'eft le cas, en termes d'École, de diftinguer le Conféquent dans le premier membre de la diftinction on détermine le fens felon lequel la Conclufion eft liée avec les prémiffes, & alors on accorde le Conféquent; dans le fecond membre de la diftinction, on détermine le fens felon lequel la Conclufion n'a avec les prémiffes aucune liaison, & alors on nie le Conféquent (M. BEAUZÉE.)

CONCORDANCE, f. f. Gramm. Ce que je vais dire ici fur ce mot, & ce que je dis ailleurs fur quelques autres de même espèce, n'eft que pour les perfonnes pour qui ces mots ont été faits, & qui ont à en enfeigner ou à en étudier la valeur & l'ufage; les autres feront mieux de paffer à quelque article plus intéreffant. Que fi, malgré cet avis, ils veulent s'amufer à lire ce que je dis fur la Concordance, je les prie de fonger qu'on parle en anatomifte à faint Côme, en jurifconfulte aux écoles de droit, & que je dois parler en grammairien, quand j'explique quelque terme de Grammaire.

Pour bien entendre le mot de Concordance, il faut obferver que felon le fyftême commun des grammairiens, la Syntaxe fe divife en deux ordres; l'un de convenance, l'autre de régime, méthode de P. R. à la tête du traité de la Syntaxe, p. 355. La Syntaxe de convenance, c'est l'uniformité ou reffemblance qui doit fe trouver, dans la même propofition ou dans la même énonciation, entre ce que les grammairiens appellent les accidents des mots, dictionum accidentia; tels font le genre, le cas, (dans les langues qui ont des cas) le nombre, & la perfonne; c'est à dire que, fi un fubftantif & un adjectif font un fens partiel dans une propofition, & qu'ils concourent ensemble à former le fens total de cette propofition, ils doivent être au même genre, au même nombre, & au même cas. C'est ce que j'appelle Uniformité d'accidents, & c'eft ce qu'on appelle Concordance ou Accord.

Les grammairiens diftinguent plufieurs fortes de Concordances.

1. La Concordance ou convenance de l'adjectif avec fon fubftantif: Deus fanctus, Dieu faint: fanta Maria, fainte Marie.

Deus

2o. La convenance du relatif avec l'antécédent : quem adoramus, le Dieu que nous adorons. 3. La convenance du nominatif avec fon verbe : Petrus legit, Pierre lit; Petrus & Paulus legunt, Pierre & Paul lifent.

4. La convenance du refponfif avec l'interrogatif, c'est à dire, de la réponse avec la demande : D, Quis te redemit ? R. Chriftus.

5. A ces Concordances, la méthode de P. R. en ajoûte encore une autre, qui eft celle de l'accufatif

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avec l'infinitif, Petrum effe doctum; ce qui fait un fens qui eft, ou le fujet de la propofition, ou le terme de l'action d'un verbe. On en trouvera des exemples au moi CONSTRUCTION,

A l'égard de la Syntaxe de régime, Régir, difent les grammairiens, c'est lorsqu'un mot en oblige un autre à occuper telle ou telle place dans le difcours, ou qu'il lui impofe la loi de prendre une telle terminaifon, & non une autre. C'est ainsi que amo régit, gouverne l'accufatif, & que les prépofitions de, ex, pro, &c. gouvernent l'ablatif.

Ce qu'on dit communément fur ces deux fortes de Syntaxes, ne me paroit qu'un langage métaphorique, qui n'éclaire pas l'efprit des jeunes gens, & qui les accoutume à prendre des mots pour des chofes. Il eft vrai que l'adjectif doit convenir en genre, en nombre, & en cas avec fon fubftantif: mais pourquoi? Voici ce me femble ce qui pourroit être utilement fubftitué au langage commun des grammairiens.

Il faut d'abord établir comme un principe certain, que les mots n'ont entre eux de rapport grammatical, que pour concourir à former un fens dans la même, propofition, & felon la conftruction pleine; car enfin les terminaifons des mots & les autres fignes que la Grammaire a trouvés établis en chaque langue, ne font que des fignes du rapport que l'efprit conçoit entre les mots, felon le fens particulier qu'on veut lui faire exprimer. Or, dès que l'eníemble des mots énonce un fens, il fait une propofition ou une énonciation.

Ainfi, celui qui veut faire entendre la raison gram maticale de quelque phrafe, doit commencer par ranger les mots felon l'ordre fucceffif de leurs rapports, par lefquels feuls on apperçoit, après que la phrafe eft finie, comment chaque mot concourt à former le fens total.

Enfuite on doit exprimer tous les mots fousentendus. Ces mots font la caufe pourquoi un mot énoncé a une telle term naifon ou une telle pofition plus tôt qu'une autre. Ad Caftoris: il est évident que la caufe de ce génitif Caftoris n'eft pas ad, c'est ædem qui eft fousentendu; ad ædem Caftoris, au temple de Caftor.

Voilà ce que j'entends par Faire la conftruction; c'eft ranger les mots felon l'ordre par lequel feul ils font un lens.

Je conviens que, felon la conftruction ufuelle, cet ordre eft fouvent interrompu; mais obfervez que l'arrangement le plus élégant ne formeroit aucun fens, fi après que la phrase est finie l'esprit n'apper. cevoit l'ordre dont nous parlons. Serpentem vidi : la terminaifon de ferpentem annonce l'objet que je dis avoir vu ; au lieu qu'en françois la pofition de ce mot, qui eft après le verbe, eft le figne qui indique ce que j'ai vu.

Obfervez qu'il n'y a que deux fortes de rapports entre ces mots, relativement à la conftru&tion. I.Rapport, ou raifon d'identité (R. idem, le même.) II. Rapport de détermination.

1. A l'égard du rapport d'identité, il est évident que le qualificatif ou adjectif, aufli bien que le verbe, ne font au fond que le fubftantif même confidéré avec la qualité que l'adjectif énonce, ou avec la manière d'être que le verbe attribue au fubftantif: ainfi, l'adjectif & le verbe doivent énoncer les mêmes accidents de Grammaire, que le fubftantif énonce d'abord; c'est à dire que, fi le fubftantif eft au fingulier, l'adjectif & le verbe doivent être au fingulier, puifqu'ils ne font que le fubftantif meme confidèré fous telle ou telle vue de l'efprit.

Il en eft de même du genre, de la perfonne, & du cas, dans les langues qui ont des cas. Tel eft l'effet du rapport d'identité, & c'eft ce qu'on appelle Concordance.

3.

.. A l'égard du rapport de détermination, comme nous ne pouvons pas communément énoncer notre pensée tout d'un coup en une feule parole, la nécefGité de l'Élocution nous fait recourir à plufieurs mots, dont l'un ajoûte à la fignification de l'autre, ou la reftreint & la modifie; enforte qu'alors c'eft l'ensemble qui forme le fens que nous voulons énoncer. Le rapport d'identité n'exclut pas le rapport de détermination. Quand je dis l'homme favant, ou le favant homme, favant modifie & détermine homme; cependant il y a un rapport d'identité entre homme & favant, puifque ces deux mots n'énoncent qu'un même individu qui pourroit être exprimé en un feul mot, doctor.

Mais le rapport de détermination se trouve fouvent fans celui d'identité. Diane étoit fœur d'Apollon; il y a un rapport d'identité entre Diane & four ces deux mots ne font qu'un feul & même individu; & c'eft pour cette feule raison qu'en latin ils font au même cas, &c. Diana erat foror. Mais il n'y a qu'un rapport de détermination entre four & Apollon; ce sapport eft marqué en latin par la terminaifon du génitif destinée à déterminer un nom d'efpèce; foror Apollinis; au lieu qu'en françois le mot d Apollon eft mis en rapport avec four par la prépofition de, c'est à dire que cette prépofition fait connoitre que le mot qui la fuit détermine le nom qui la précede.

Pierre aime la vertu : il y a Concordance ou rapport d'identité entre Pierre & aime ; & il y a rapport de détermination entre aime & vertu. En françois, ce rapport eft marqué par la place ou pofition du mot: ainfi, vertu eft après aime: au lieu qu'en latin ce rapport eft indiqué par la terminaison virtutem, & il eft indifférent de placer le mot avant ou après le verbe; cela dépend ou du caprice & du goût particulier de l'écrivain, ou de l'harmonie, ou du concours plus ou moins agréable des fyllabes des mots qui précedent ou fuivent.

Il y a autant de fortes de rapports de détermination, qu'il y a de questions qu'un mot à déterminer donne lieu de faire par exemple, le roi a donné, hé quoi? une penfion; voilà la détermination de la chofe donnée; mais comme pension est un nom appellatif ou d'espèce , on le détermine encore plus précisément

en ajoutant, une penfion de cent piftoles: c'eft la détermination du nom appellatif ou d'efpèce. On demande encore, à qui ? on répond, à N. c'eft la détermination de la perfonne à qui, c'eft le rapport d'attribution. Ces trois fortes de déterminations font auffi directes l'une que l'autre.

Un mot détermine 1°. un nom d'èspèce, foror Apollinis.

2o. Un nom détermine un verbe, amo Deum. 3°. Enfin un nom détermine une préposition; à morte Cæfaris, depuis la mort de Cefar.

Pour faire voir que ces principes font plus féconds, plus lumineux, & même plus aifés à faifir que ce qu'on dit communément, faifons- en la comparaison & l'application à la règle commune de Concordance entre l'interrogatif & le refponfif.

Le refponfif, dit-on, doit être au même cas que l'interrogatif. D. Quis te redemit ? R. Chriftus: Chriftus eft au nominatif, dit-on, parce que l'interrogatif quis eft au nominatif.

D. Cujus eft liber? R. Petri: Petri eft au génitif, parce que cujus eft au génitif.

Cette règle, ajoûte-t-on, a deux exceptions. 1o. Si vous répondez par un pronom, ce pronom doit être au nominatif. D. Cujus eft liber? R. Meus. 20. Si le refponfif eft un nom de prix, on le met à l'ablatif. D. Quanti emifti? R. Decem affibus.

Selon nos principes, ces trois mots quis te rede-. met font un fens particulier, avec lequel les mots de la réponse n'ont aucun rapport grammatical. Si l'on répond Chriftus, c'eft que le répondant a dans l'efprit Chriftus redemit me: ainfi Chriftus eft au nominatif, non à caufe de quis, mais parce que Chriftus eft le fujet de la propofition du répondant, qui auroit pû s'énoncer par la voix paffive, ou donner quelque autre tour à fa réponse fans en altérer le fens.

D. Cujus eft liber? R. Petri, c'est à dire, hic liber eft liber Petri.

D. Cujus eft liber ? R. Meus, c'est à dire, hic liber eft liber meus.

D. Quanti emifti ? R. Decem affibus. Voici la conftruction de la demande & celle de la réponse. D. Pro pratio quanti æris emifti ? R. Emi pro decem affibus.

Les mots étant une fois trouvés & leur valeur aussi bien que leur destination, & leur emploi étant déterminé par l'ufage, l'arrangement que l'on en fait dans la propofition felon l'ordre fucceffif de leurs relations, eft la manière la plus fimple d'analyfer la penfée.

Je fais bien qu'il y a des grammairiens dont l'ef prit eft affez peu philofophique pour défapprouver la pratique dont je parle, comme fi cette pratique avoit d'autre but que d'éclairer le bon ufage, & de le faire fuivre avec plus de lumière, & par conféquent avec plus de goût: au lieu que fans les connoiffances dont je parle, on n'a que des obfervations méchaniques qui ne produifent qu'une routine aveugle, dont il ne résulte aucun gain pour l'efprit.

&

Prifcien, grammairien célèbre, qui vivoit à la fin du V. fiècle, dit que, comme il y a dans l'écriture une raison de l'arrangement des lettres pour en faire des mots, il y a également une raifon de l'ordre des mots pour former les fens particuliers du difcours, & que c'eft s'égarer étrangement que d'avoir une autre penfée,

Sicut recta ratio fcripturæ docet litterarum congruam juncturam, fic etiam reclam orationis compoJitionem ratio ordinationis oftendit. Solet quæri caufa ordinis elementorum, fic etiam de ordinatione cafuum & ipfarum partium orationis folet quæri. Quidam fuæ folatium imperitiæ quærentes, aiunt non oportere de hujufcemodi rebus quærere, fufpicantes fortuitas effe ordinationis pofitiones; quod exiftimare penitus ftultum eft. Si autem in quibufdam concedunt effe ordinationem, neceffe eft etiam in omnibus eam concedere. ( Prifcianus de conftruct. Lib. XVII, fub initio. )

A l'autorité de cet ancien, je me contenterai d'ajoûter celle d'un célèbre grammairien du XV. fiècle, qui avoit été pendant plus de 30 ans principal d'un collège d'Allemagne.

In grammatica dictionum Syntaxi, puerorum plurimum intereft ut inter exponendum non modò fenfum pluribus verbis utcumque ac confusé coacervatis reddant, fed digerani etiam ordine grammatico voces alicujus periodi, quæ alioqui, apud autores acri aurium judicio confulentes, rhetoricâ compofitione commiftæ funt. Hunc verborum ordinem à pueris in interpretando ad unguem exigere quidnam utilitatis afferat, ego ipfe, qui duos & triginta jam annos magifterii fordes, moleftias; ac curas pertuli, non femel expertus fum: illi enim hac via, fixis, ut aiunt, oculis intuentur accuratiùfque animadvertunt quot voces fenfum abfol vant, quo pacto dictionum ftructura cohæreat, quot modis fingulis omnibus fingula verba refpondeant; quod quidem fieri nequit, præcipuè in longiusculâ periodo, nifi hoc ordine, veluti per fealarum gradus, per fingulas periodi partes progrediantur. (Grammatica artis inftitutio per Joannem Sufembrotum, Ravefpurgii Ludi magiftrum, jam denuò accurate confignata. Bafileæ, an. 1529.)

C'est ce qui fait qu'on trouve fi fouvent', dans les anciens commentateurs, tels que Cornutus Servius, Donat, ordo eft, &c. C'eft auffi le confeil que le P. Jouvenci donne aux maîtres qui expliquent des auteurs latins aux jeunes gens: le point le plus important, dit-il, eft de s'attacher à bien faire la conftruction. Explanatio in duobus maximè confiftit; 10. in exponendo verborum ordine ac ftructura orationis: 20, in vocum obfcuriorum expofitione. ( Ratio difcendi & docendi Jof. Jouvenci, S. J. Parifiis, 1715.) Peut-être feroit-il plus à propos de commencer par expliquer la valeur des mots, avant que d'en faire la conftruction. M. Rollin, Traité des Etudes, infifte auffi en plus d'un endroit fur l'importance de cette pratique, & fur l'utilité que les jeunes gens en retirent.

Cet ufage eft fi bien fondé en raifon, qu'il eft recommandé & fuivi par tous les grands maîtres. Je voudrois feulement qu'au lieu de fe borner au pur fentiment, on s'élevât peu à peu à la connoiffance de la propofition & de la période, puifque cette connoiffance et la raifon de la construction. (M. DU MARSAIS.)

CONCORDANT, adj. Rhétor. Vers concor danis; ce font certains vers qui ont quelques mots communs, & qui renferment un fens oppofé ou diffé rent, formé par d'autres mots; tels que ceux-ci:

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(N.) CONCRET, E, adj. C'eft l'oppofé & le corrélatif d'Abftrait. ( Voyez ABSTRACTION, ABSTRAIRE, ABSTRAIT.)

Abstrait fignifie, Confidéré hors de fon fujet, féparé du fujet par la penfée: Concret, au contraire, fignifie, Confidéré dans le fujet & avec le fujet. Difons mieux, ce font les termes qui font abftraits ou concrets: un terme eft abftrait, quand il exprime quelque qualité, quelque manière d'être confidérée en elle-même & hors de tout fujet; un terme eft concret, quand il exprime un fujet quelconque revêtu de fes qualités, de les manières d'être. Tel eft fur cela le langage ordinaire, qui eft fufceptible, je crois, de quelque amélioration. (Voyez ABSTRACTIF.) (M. BEAUZEE.)

(N.) CONCUPISCENCE, CUPIDITÉ, AVIDITÉ, CONVOITISE. Synonymes.

La Concupifcence eft la difpofition habituelle de l'ame à défirer les biens & les plaifirs fenfibles : la Cupidité en eft le défir violent: l'Avidité en eft un défir infatiable: la Convoitise en eft un défir illicite.

La Concupifcence eft une fuite du péché originel: le renoncement à foi-même eft le remède que propose l'Évangile contre cette maladie de l'ame. Ce renoncement, auffi inconnu à la Philofophie humaine que l'origine & la nature du mal dont il eft le remède, difpofe heureusement le chretien à réprimer les emportements de la Cupidité, à prefcrire des bornes raisonnables à l'Avidité, à détefter toutes les injuftices de la Convoitife. (M. BEAUZĖE.)

(N.) CONDITION, ÉTAT. Synonymes.

La Condition a plus de rapport au rang qu'on tient dans les divers ordres qui forment l'économie de la république, L'Etat en a davantage à l'occupation ou au genre de vie dont on fait profeffion.

Les richeffles nous font aifén:ent oublier le degré de notre Condition, & nous détournent quelquefois des devoirs de notre État.

Il est difficile de décider fur la différence des Conditions, & d'accorder là-deffus les prétentions

5

CON

des divers États; il y a beaucoup de gens qui n'en | jugent que par le brillant de la dépense.

Quelques perfonnes font valoir leur Condition, faute de bien connoître le jufte mérite de leur État. (L'abbé GIRARD.)

(N.) CONDITION (DE), DE QUALITÉ. Synonymes.

La première de ces expreffions a beaucoup gagné fur l'autre; mais quoique fouvent très-fynonymes dans la bouche de ceux qui s'en fervent, elles retiennent toujours dans leur propre fignification le caractère qui les diftingue, auquel on eft obligé d'avoir égard en certaines occafions pour s'exprimer d'une manière convenable. De Qualité enchérit fur de Condition; car on fe fert de cette dernière expreffion dans l'ordre de la Bourgeoifie, & l'on ne peut fe fervir de l'autre que dans l'or dre de la Nobleffe. Un homme né roturier ne fut jamais un homme de Qualité; un homme né dans la robe, quoique roturier, fe dit homme de Condition.

Il femble que de tous les citoyens partagés en deux portions, les gens de Condition en faffent une, & le peuple l'autre, diftinguées entre elles par la nature des occupations civiles; les uns s'attachant aux emplois nobles, les autres, aux emplois lucratifs : & que, parmi les perfonnes qui compofent la première portion, celles qui font illuftrées par la naiffance, foient les gens de Qualité.

Les perfonnes de Condition joignent, à des mœurs cultivées, des manières polies ; & les gens de Qualité ont ordinairement des fentiments élevés.

Il arrive fouvent que les perfonnes nouvellement devenues de Condition donnent dans la hau. teur des manières, croyant en prendre de belles; c'est par là qu'elles fe trahiflent, & font fur l'efprit des autres un effet tout contraire à leur intention. Quelques gens de Qualité confondent l'élévation des fentiments, avec l'énormité des idées qu'ils fe font fur le mérite de la naiffance, affectant continuellement de s'en targuer & de prodiguer les airs de mépris pour tout ce qui eft Bourgeoifie; c'est un défaut qui leur fait beaucoup plus perdre que gagner dans l'eftime des hommes, foit pour leur perfonne foit pour leur famille. (L'abbé GIRARD.)

(N.) CONDITIONNELLE (CONJONCTION). Les Conjonctions conditionnelles font celles qui défignent, entre les propofitions, une liaifon conditionnelle d'exiftence, fondée fur ce que la feconde eft une fuite de la fuppofition de la première. Elles font ainfi nommées, parce qu'elles fervent à énoncer conditionnellement, & non pofitivement, la première des deux propofitions.

Les latins ont trois Conjonctions conditionnelles bien reconnues; fi, nifi, & fin: nous n'en avons que deux en françois ; fi & finon. Le fi latin étoit ine Conjonction conditionnelle pofitive; nifi étoit nous nous fervons de si dans gative. Pour nous

les deux cas: Il viendra, s1 fes affaires le permettent 81 fon devoir ne le retient pas.

C'eft encore le même si conditionnel que nous
employons dans les phrafes où les latins fe fervoient
d'an, d'utrum, ou de l'enclitique ne; comme Je
ne fais si cela eft vrai. Les grammairiens ont cou-
tume de dire que, dans ce cas, c'est une particule
dubitative; & le Dictionnaire de l'Académie le dit
de même. Mais le doute & l'incertitude des phrafes
où fi eft employé dans ce fens, font toujours mar-
qués par le verbe qui précède cette Conjonction:
je ne fais s1, je doute S1, on demande si, dites-
moi sI; & la Conjonction et toujours conditionnelle.
Je ne fais, je doute, on demande, dites-moi SI
cela eft vrais c'eft à dire, si cela eft vrai, je ne
le fais pas, j'en doute, on le demande, dites-le
moi: & nous employons même affez fouvent ce
fecond tour en françois. Ce qui a trompé nos gram-
mairiens, c'eft qu'en effet an eft une Conjonction
conditionnelle, qui renferme en outre l'idée accef-
foire du doute; & c'eft pour cela qu'elle s'emploie
à la tête des phrafes interrogatives; an audis ? &
dans les dubitatives; nefcio ou dubito an venturus
fit. Mais d'ailleurs elle avoit le même fens que /i.
1. Il eft évident que c'eft la conditionnelle grèque
v. 2°. Elle ne diffère, que par une nafale diffé-
rente à la fin, de la conditionnelle hébraïque pr
(am), qui même eft 18 (an) en fyriaque, en chal-
déen, & en famaritain. 3°. Il y a apparence que
les latins employoient fans fcrupule fi pour an; &
en voici la preuve dans le difcours que Virgile fait
tenir à Vénus (En. jv. 110.):

Sed fatis incerta feror S1 Jupiter unam
Effe velit tyriis urbem Trojâque profedis,
Mifcerive probet populos aut fœdera jungi.

Ce tour n'étoit pas extraordinaire en latin: car Servius ne fait fur cela aucune remarque ; ce qu'il auroit fait fans doute, fi c'eût été une licence contre le génie ou feulement contre l'ufage ordinaire de fa langue. Ne trouve-t-on pas dans Cicéron (Topic. xxij. 84), Quæritur... fi expetenda divitiæ, fi fugienda paupertas? & ailleurs (V. Verr. xxjx. 66), Tum mittit ad iftum, fi fibi videatur ut reddat.

Mais nous avons en françois un autre fi, qui n'est pas Conjonction, qui est un véritable adverbe, & qui répond à peu près à l'adeò des latins; comme dans ces phrafes: Il'eft si favant que tout le monde l'admire, Je ne connus jamais un si favant homme, Il n'eft pas si favant qu'on le penfe. Cet adverbe, quoique matériellement femblable à la Conjonction : conditionnelle, n'a pas la même origine : ce feroit, dans la génération des mots, un véritable monftre; & l'Ufage n'en admet dans aucune langue. Le SI conditionnel eft le fi même des latins; & le fi adverbe vient du fic latin, dont nous avons retranché le c final, afin d'adoucir la prononciation: nous dions 1 fait, comme on diroit en latin Sic factum; & l'on dit dans le patois de Verdun, un s' fat feu,

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