PERSONNAGES. AGAMEMNON. ACHILLE. ULYSSE. CLYTEMNESTRE, femme d'Agamemnon. IPHIGÉNIE, fille d'Agamemnon. ÉRIPHILE, fille d'Hélène et de Thésée. ARCAS, EURYBATE, domestiques d'Agamemnon. ÆGINE, femme de la suite de Clytemnestre. DORIS, confidente d'Ériphile. GARDES. La scène est en Aulide, dans la tente d'Aga memnon. TRAGÉDIE. ACTE PREMIER. SCÈNE I. AGAMEMNON, ARCAS. AGAMEMNON. Oui, c'est Agamemnon, c'est ton roi qui t'éveille. ARCAS. C'est vous-même, seigneur? Quel important besoin A peine un foible jour vous éclaire et me guide, Les vents nous auroient-ils exaucés cette nuit? AGAMEMNON. Heureux qui, satisfait de son humble fortune, ARCAS. Et depuis quand, seigneur, nez-vous ce langage? AGAMEMNON. Non, tu ne mourras point, je u'y puis cousentic. ARCAS. Seigneur.... AGAMEMNON. Tu vois mon trouble, apprends ce qui le cause; Et juge s'il est temps, ami, que je repose. Tu te souviens du jour qu'en Aulide assemblés Fatigua vainement une mer immobile. Quelle fut sa réponse! et quel devins je, Arcas, <«<< Vous armez contre Troie une puissance vaine « Une fille du sang d'Hélène « De Diane en ces lieux n'ensanglante l'autel. ARCAS. Votre fille ! AGAMEMNON. Surpris, comme tu peux penser, Je sentis dans mon corps tout mon sang se glacer : Je demeurai sans voix, et n'en repris l'usage Que par mille sanglots qui se firent passage. Je condamnai les dieux, et, sans plus rien ouïr, Fis vœu, sur leurs autels, de leur désobéir. Que n'en croyois-je alors ma tendresse alarmée ! Je voulois sur-le-champ congédier l'armée. Ulysse en apparence approuvant mes discours De ce premier torrent laissa passer le cours ; Mais bientôt, rappelant sa cruelle industrie, Il me représenta l'honneur et la patrie, Tout ce peuple, ces rois, à mes ordres soumis, Et l'empire d'Asie à la Grèce promis; De quel front, immolant tout l'état à ma fille, Roi sans gloire, j'irois vieillir dans ma famille. Moi-même, je l'avoue avec quelque pudeur, Charmé de mon pouvoir, et plein de ma grandeur, Ces noms de roi des rois et de chef de la Grèce Chatouilloient de mon cœur l'orgueilleuse foiblesse. Pour comble de malheur, les dieux, toutes les nuits, Dès qu'un léger sommeil suspendoit mes ennuis, Vengeant de leurs autels le sanglant privilège, Me venoient reprocher ma pitié sacrilège, Et, présentant la foudre à mon esprit confus, Le bras déjà levé, menaçoient mes refus. Je me rendis, Arcas; et, vaincu par Ulysse, De ma fille, en pleurant, j'ordonnai le supplice. Mais des bras d'une mère il falloit l'arracher. Quel funeste artifice il me fallut chercher ! D'Achille qui l'aimoit j'empruntai le langage : |