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<< n'ont pas le droit d'exiger du mandataire l'exécution du << mandat ou l'exercice des pouvoirs conférés par le mandant. « Si le mandataire ne remplit pas sa charge, s'il ne la remplit

pas convenablement, ou s'il se sépare des instructions re‹ çues ou s'il dépasse ses facultés, c'est une matière qui inté<resse seulement le mandant et non les tierces personnes, « étrangères aux relations de droit originées par le mandat << entre les parties.

« Il résulte de tout ce qui précède que:

1o La Compagnie italienne Navigazione Generale n'a point autorisé les directeurs de l'agence ou des succursa« les établies dans cette capitale à la représenter dans des < procès de la nature de celui-ci.

2o Il n'existe pas de loi qui oblige les directeurs ou agents d'assumer la représentation prétendue par le de< mandeur.

« 3o Même dans la supposition que la Compagnie leur eût « concédé des pouvoirs à cet effet, les tierces personnes n'ont « pas le droit de leur exiger l'exercice de coux-là. » En conséquence le juge rejette l'action initiée.

Voilà une question très commune dans le droit international commercial, décidé par le juge docteur Amuschástegui d'une manière exacte au point de vue des circonstances du procès, mais faiblement au point de vue du droit international privé. Si je me permets de faire cette observation, c'est justement parce que dans ces derniers temps les tribunaux argentins ont été sollicités par plusieurs mandataires à la suite de contrats de mandat célébrés à l'étranger. Il faut donc fixer la jurisprudence sur ce point.

« par des actions émises, ainsi qu'au paiement des dettes sociales et des « dommages résultant à faveur des tierces personnes, de l'inexécution « des obligations contractées au nom de la société. »

Art. 337. - << Les directeurs des sociétés anonymes dûment constituées « n'encourent aucune responsabilité, personnelle ou solidaire pour les << obligations de la société ; mais ils sont personnellement et solidaire<«ment responsables envers elles et les tierces personnes de l'inexécution « ou de la mauvaise exécution du mandat et de la violation des lois, des < statuts et des règlements.

« On exceptue de cette responsabilité les directeurs qui n'auraient pas < pris part à la résolution respective ou qui seraient protesté contre les « délibérations de la majorité, avant qu'on leur eût exigé « l'effectivité « de la responsabilité. »

Il y a quelque temps l'agent d'une Compagnie américaine décida d'abandonner sa représentation à Buenos Aires et d'initier une action devant un juge de commerce de la capitale pour le recouvrement de sa rétribution. La Compagnie était déjà représentée à Buenos Aires par un autre mandataire. Celui-ci me consulta sur le cas, après avoir reçu la notification de la demande. Je rédigeai un petit écrit rendant au juge les copies de la demande, et soutenant que l'actuel mandataire n'avait que des pouvoirs très limités dans lesquels n'étaient comprises les relations juridiques nées du contrat de mandat, célébré à New-York, où l'on devait initier la demande, non seulement d'après la règle lex loci contractus, mais aussi parce que le domicile principal de la Compagnie était établi dans cette ville, le domicile de Buenos Aires, étant spécial pour répondre aux relations juridiques créées par l'action de la succursale dans les limites de ses pouvoirs. Le fondé de procuration accepta ces doctrines, retira la demande et se rendit à New-York, pour régler la difficulté. Il ne pouvait en être autrement, parce que tels sont les principes du droit anglo-américain. Story, Dicey, Moore et Wharton, les plus hautes autorités de ce pays, ont déduit de la jurisprudence des tribunaux anglais et américains, la règle suivante Les relations entre l'agent et son principal sont gou« vernées par la loi, d'après laquelle l'agence a été constituée, qui est généralement la loi du pays où la relation entre le principal et l'agent est née. » C'est la loi du contrat.

«

Le droit continental européen maintient aussi la lex loci contractus, c'est-à-dire que le contrat de mandat est gouverné par sa propre loi, qui est généralement celle du pays de la célébration du contrat.

Cette doctrine a été confirmée en 1891 dans le cas de Chatenay V. Brazilian Submarine Telegraph Company par les tribunaux anglais. Elle est aussi applicable au cas décidé par le docteur Amuschástegui, puisque la loi du contrat du fondé de pouvoir de la Compagnie de navigation est la loi italienne, sous l'empire de laquelle le contrat fut signé, les parties se soumettant tacitement quant à leurs droits à ses dispositions. Seulement dans le cas d'une réserve expresse dans le contrat, ces relations pourraient être soumises à la loi argentine.

Cette soumission volontaire au droit italien détermine aussi une juridiction pour régler les contestations entre les contractants: c'est la juridiction loci contractus, dans l'espèce l'italienne. C'est aussi la conséquence implicitement incorporée à l'arrêt de notre juge de commerce.

E. S. ZEBALLOS.

Octobre 1904.

Les diplomates devant les tribunaux

Le monde diplomatique vient d'être ému à Washington par des incidents, qui remettent sur le tapis les questions soulevées quand les diplomates étrangers entrent en relations de droit privé avec les habitants du pays, où ils sont accrédités. Voici les deux derniers cas qui ont eu lieu aux Etats-Unis, en septembre dernier.

Son Excellence l'ambassadeur d'Italie, Monsieur Mayor des Planches, avait loué une maison de campagne à Atlantic City, sur les bords de l'Atlantique, dans l'Etat de NewJersey. Il y passa l'été, l'abandonnant il y a quelques semaines, pour s'établir de nouveau à Washington.

Dès que le propriétaire de la maison eut connaissance du retour de l'ambassadeur à la capitale, il s'empressa de vendre la maison à une certaine personne de New-York. Celle-ci prit possession de la maison aussitôt. On ne peut pas dire que les Américains n'apprécient pas le temps en matière d'affaires.

Mais vendeur et acheteur exagérèrent la portée du proverbe time is money », car le contrat de location en faveur de l'ambassadeur d'Italie n'était pas expiré. Il n'avait pas même déménagé, conservant dans la maison une partie des papiers de l'ambassade.

Quand sa possession fut troublée par l'acheteur, l'ambassadeur soumit le cas, en se plaignant au département d'Etat, comme on appelle là-bas le ministère des Affaires Etrangères. La plainte fut accueillie immédiatement et le sous-secrétaire du département adressa une note au maire d'Atlantic City,

lui communiquant, qu'on devait considérer la propriété en question comme territoire italien, jusqu'à l'expiration du bail.

L'acheteur refusa de se soumettre à cet acte juste, et d'autre part, de courtoisie internationale. Il trouva sans doute le conseil d'un des très nombreux « sollicitors, qui, ignorant absolument le droit international, prennent la responsabilité d'initier des procès contre les diplomates, mettant en ridicule leur profession et leur pays.

Voilà donc l'ambassadeur d'Italie cité devant le tribunal d'Atlantic City, à la suite de l'action de possession initiée par l'acheteur impatient. Les journaux ont publié la nouvelle que l'ambassadeur d'Italie se fera représenter par le secrétaire de l'ambassade. Cette affirmation a besoin d'être confirmée, car si elle était exacte, elle fonderait un précédent contraire aux privilèges limités des diplomates et même à quelques antécédents américains, dont voici un exemple:

L'auteur de cet article était ministre de la République Argentine à Washington en 1895. Un employé privé de la légation, chargé de la comptabilité et qui ne figurait pas dans la liste des diplomates, publiée par le ministère des Affaires Etrangères, d'après les renseignements des légations, falsifia des chèques du ministre et réussit à toucher leur valeur à la Banque Riggs. J'avais signé un chèque pour douze dollars et l'employé infidèle ajouta douze cents (telwve hundred). C'est un système très connu aux Etats-Unis, sous le nom de rise up the checks. Le délit découvert, j'eus une conférence avec l'attorney general des Etats-Unis (ministre de Justice, qui était alors un des juristes les plus honorables, savants et respectés de la République, l'avocat Richard C. Olney, plus tard le célèbre ministre des Affaires Etrangères, qui s'opposa audacieusement à l'Angleterre dans la question de limites avec le Vénézuela.

Je déclarai à M. Olney que quoique le délit avait été commis dans la légation argentine par un cubain, naturalisé américain, de mon service privé, et que j'avais le droit d'envoyer le criminel à mon pays pour y être jugé, je préférais toutefois confier le procès au tribunal compétent de Washington pour deux raisons, d'abord parce que le criminel aurait plus de facilité dans sa défense, et puis parce qu'il serait dispendieux de lui faire faire ce voyage jusqu'en Argentine.

Il y avait seulement une difficulté il me semblait que le ministre argentin bien qu'étant l'accusateur, ne devait pas prendre part au procès. M. Olney résolut la question, me priant de lui adresser une note, dans laquelle je demanderai au gouvernement américain le jugement du délinquant. Alors l'attorney general décida que l'accusateur seraient les Etats-Unis représentés par un des sollicitors de sa dépendance. Le procès fut initié en conséquence devant le juge de police de Washington, lequel se déclarant incompétent ordonna la mise en liberté de l'accusé, alléguant avec une ignorance adorable, que celui-ci avait des immunités diplomatiques. La décision étonna l'attorney general, qui se préparait à prendre des mesures réparatrices, quand on sut que le coupable s'était enfui à Cuba. Quelques années plus tard, celui-ci s'adressa lui-même au ministère des affaires étrangères de la République Argentine, implorant son pardon.

Par analogie dans l'affaire civile de l'ambassadeur d'Italie, ce n'était pas lui, ni son représentant qui devaient comparaître devant le juge d'Atlantic City. Le gouvernement américain ayant reconnu que la maison en question était territoire italien, elle était aussi hors de la portée des juges locaux. Et dans le cas d'une action judiciaire pour établir le point, c'était le gouvernement américain au moyen d'une de ses sollicitors, qui devait affronter la question pour faire respecter le privilège diplomatique menacé.

Je suis sûr que les lecteurs attendront comme moi, avec le plus vif intérêt, le développement de ce cas singulier.

Voici la seconde affaire: Le protagoniste était cette fois un des secrétaires de l'ambassade d'Angleterre aux Etats-Unis, Mr. Hugh Gurney. Il était en villégiature à Pittsfield dans l'Etat de Massachusets, où la vitesse des automobiles est limitée par la loi. La police accusa le secrétaire de marcher à une vitesse extraordinaire avec son automobile et d'avoir refusé de se soumettre au paiement de l'amende établie. On l'accusa de rébellion contre l'autorité.

La police soumit le secrétaire à un juge compétent, M. Henry C. Phelps, qui dicta des ordres contre M. Gurney. Celui-ci ayant invoqué ses privilèges diplomatiques, le juge insista sur ses ordres, déclarant qu'il mettrait en prison l'ambassadeur d'Angleterre lui-même, si on le surprenait en vio

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