J'exposerai dans un autre travail, ces modifications, me bornant maintenant à signaler le fait de ce que, loin de faciliter la vie juridique dans la République Argentine, les traités de Montevideo l'ont compliquée, substituant la législation unique du pays par une législation double une pour tous les habitants du pays, l'autre pour toutes les questions et les personnes soumises à ces conventions. Toutefois, il est juste de revendiquer pour le Nouveau Monde, et d'une manière spéciale, pour les Républiques Argentine, de l'Uruguay et du Pérou, le mérite de la pre. mière initiative réalisée dans le XIXe siècle, pour le rapprochement officiel des Etats, dans le but de la codification du droit international privé. IV. Cet exemple fondateur fut suivi par treize puissances continentales européennes, sous l'initiative du gouverment hollandais, qui se mirent d'accord quatre ans plus tard, pour organiser en 1893, une conférence de plénipotentiaires, dans le but de discuter et de célébrer les conventions avec des règles sur la procédure et les conflits des lois, concernant les questions du mariage, du divorce, de la séparation de corps et de la tutelle. Cette première conférence internationale a été tenue à La Haye en septembre 1893 et continuée en 1891 et en 1900. En cette dernière année, la Suède et la Norvège, qui avec l'Angleterre et d'autres pays extra-continentaux, ne s'étaient pas fait représenter au début, y adhé rèrent. Monsieur Laîné, en parlant du but de la conférence, dit : Qu'il faut du moins espérer de ces travaux, la complète codification du droit international privé (1). Les traités furent célébrés et signés à La Haye le 12 juin 1902, mais le besoin d'une sanction législative dans quelquesuns des Etats signataires retarda leur ratification jusqu'en 1904. Le 1 juin, « pendant que la quatrième conférence était réunie, le dépôt des actes de ratification de ces conventions, a été opéré à La Haye par les plénipotentiaires de sept des Etats signataires (l'Allemagne, la Belgique, la France, le Luxembourg, les Pays-Bas, la Roumanie, la Suède); un peu (1) Journal de droit international privé. -- Paris, 1895. 467. plus tard, l'Espagne a ratifié la convention relative à la tutelle. On peut espérer que dans peu de temps, les autres puissances signataires auront également ratifié ces conventions, qui, dès le 31 juillet 1904, sont entrées en vigueur dans les Etats que nous avons nommés. ‹ (1). On doit exclure de ces renseignements, la convention relative à la procédure civile, signée en 1896, entrée en vigueur le 25 mai 1899, avec le protocole additionnel du 22 mai de la même année, pour une période de cinq ans, avec prorogation tacite pour une période égale, à défaut de dénonciation. Une quatrième conférence fut tenue à La Haye, du 16 mai au 7 juin 1904, pour étudier l'étendue de la codification précédente. Selon l'article cité de son éminent président, Monsieur Asser, depuis la clôture de la troisième conférence, la commission royale néerlandaise pour la codification du droit international privé, s'était occupée sous sa présidence, de la préparation d'un projet de programme pour la quatrième conférence. Voici donc les questions qui devaient faire l'objet de celle-ci : 1o Révision prévue de la convention relative à la procédure civile, conclue en 1896 ; 2o L'examen d'un projet transactionnel relatif aux successions et aux testaments, préparé par la commission dans le but de concilier le système de la délégation française avec le projet voté par la troisième conférence ; 3o Les effets du mariage sur la personne et les biens des époux, sur la base d'un avant-projet qui avait été présenté à la troisième conférence et qui y avait fait l'objet d'un débat provisoire: 4° La tutelle des majeurs (Interdiction après que la convention relative à la tutelle des mineurs avait été signalée, il était tout indiqué de la faire suivre d'une convention analogue par rapport aux majeurs; enfin, 5° La faillite, matière d'une très grande importance pratique, dont les conférences s'étaient déjà occupées à plusieurs (1) La Codification du droit international privé, etc.. par T. M. C. Asser président de la Conférence, dans la Revue de Droit international et de Législation comparée. VI. 516. reprises et à l'égard de laquelle elles ne désespèrent pas d'établir l'entente désirée, sinon dans la forme d'une seule convention entre tous les Etats représentés, du moins au moyen de plusieurs conventions séparées eutre la plupart de ces Etats (1). Dans cette conférence, la représentation d'une puissance non européenne a été admise pour la première fois le Japon. Les délégués des gouvernements d'Allemagne, de l'AutricheHongrie, de la Belgique, du Danemark, de l'Espagne, de la France, de l'Italie, du Japon, du Luxembourg, de la Norvège, des Pays-Bas, du Portugal, de la Roumanie, de la Russie, de la Suède et de la Suisse, à la suite de delibérations et de réserves exprimées dans les procès-verbaux, ont convenu de soumettre à l'appréciation de leurs gouvernements les projets de conventions suivants : 1o Projet d'une convention relative à la procédure civile, destinée à remplacer la convention du 14 novembre 1896 et le protocole additionnel du 22 mai 1899. 2o Projet d'une convention sur les conflits de lois en matière de successions et de testaments. 3o Projet d'une convention concernant les conflits de lois relatifs aux effets du mariage sur les droits et les devoirs des époux, dans leurs rapports personnels et sur les biens des époux. 4o Projet d'une convention concernant l'interdiction et les mesures de protection analogues. 5o Projet relatif à la faillite. Après le succès des conférences de La Haye sur les matières qui intéressent directement l'ordre public, il faut attendre la codification progressive et rapide du droit commercial, spécialement du droit maritime, de change, des assurances, etc., couronnant les travaux persistants et pleins d'abnégation de l'Institut de droit international, du Congrès d'Anvers, le Comité maritime international, et l'International Law Association. L'attente de la ratification des traités relatifs au mariage, au divorce, à la séparation de corps, et à la tutelle des mi (1) Asser, article et revue cités, page 517, neurs par sept des quatorze puissances signataires (la Suède et Norvège y compris), la probable adhésion de nouveaux états, l'étude des projets de la dernière conférence par les gouvernements respectifs et la publication, quoiqu'incomplète, des documents relatifs aux travaux de la savante assemblée, démontrent l'opportunité d'étudier la transcendance juridique, pratique et politique de l'œuvre que le baron de Lynden, ministre des Affaires Etrangères des Pays-Bas, dans son discours d'ouverture de la conférence, appela « une œuvre de science, de patience et de paix ». V. Le baron de Lynden ajoutait, que les conférences s'étaient réunies pour faire disparaître autant que possible, « ou du moins diminuer les causes qui mettent en doute les « hommes sur l'étendue de leurs obligations et leurs droits, et « par cela même contribuent à affaiblir la confiance des peuples, dans le progrès de la marche de la civilisation. Car « en somme, aucun de nous ne contestera que c'est un droit qui doit régir souverainement les relations entre les hom<mes, soit nationaux, soit ressortissants d'Etats différents. et « pour que le droit soit reconnu et obéi, il est nécessaire qu'il << se montre clair, précis et intelligent pour tous. C'est pour <arriver à ce but que tendront vos efforts et vos travaux. » Voilà donc la transcendance et le but juridique des conférences de La Haye, nettement posés par le ministre des Affaires Etrangères de la nation initiatrice. C'est plus qu'« une œuvre de patience et de paix. »; on dirait une œuvre de rapprochement, de réconciliation et de liaison internationaux, au point de vue de la protection des droits de l'homme, sans égard aux divisions territoriales du globe. C'est donc une œuvre humanitaire. Mais si c'est l'interprétation logique des motifs, qui inspirerent au gouvernement des Pays-Bas, l'initiative et aux autres puissances du continent et au Japon, l'acceptation, les faits, les conséquences positives des conférences n'ont pas ce саractère universel, ils ne se proposent de protéger l'homme, mais seulement les nationaux des pays signataires. Ils résultent locaur, car j'espère qu'on me permettra d'employer ce mot, pour signaler une partie territoriale du monde, en relation avec le même continent européen et avec les autres continents, exclus des conférences de La Haye et des traités. On doit remarquer que les gouvernements européens soit par un accord préalable et secret, soit par effet direct de l'initiative limitée néerlandaise, n'ont pas invité ou admis les états non européens, le Japon même ayant été accepté à la suite de sa propre demande adressée au gouvernement des Pays-Bas et appuyée par celui-ci, devant les autres puissances représentées. On doit done conclure que nonobstant le libéralisme humanitaire des discours prononcés dans les séances, le but et le résultat des conférences sont tout-à-fait régional en relation avec les espoirs et les intérêts juridiques et économiques du Monde. VI. Considérant les traités conclus et les projets au point de vue des intérêts des puissances signataires, il est juste de reconnaître qu'on est arrivé dans leurs clauses aux limites des concessions possibles dans l'état actuel de la politique européenne. J'ai dit possibles, je ne dis pas nécessaires, parce qu'on aurait pu et on aurait dû sanctionner des solutions encore plus libérales et plus en harmonie avec la nature humaine et avec les droits inaliénables de l'homme pour développer et protéger la liberté civile en Europe et dans les autres continents. Le droit privé toutefois étant dans toutes les civilisations un dérivé des institutions politiques, l'étendue de la reconnaissance des droits de l'homme est subordonnée à l'étendue des libertés politiques de chaque pays. Mais si on considère au point de vue des idées prédominantes en Europe sur les droits de l'individu dans l'état, les solutions des traités de La Haye, à nous, observateurs étrangers, vivant heureux sous d'autres systèmes politiques, il nous est aisé de reconnaître que les conclusions de La Haye, s'harmonisent avec le degré d'influence que la politique exerce sur le droit privé européen. En d'autres termes, le principe dirigeant et dirimant de la nationalité étant accepté par les puissances du continent européen, les traités de La Haye le consacrent d'une manière assez ample, relativement libérale, en faveur des droits privés des nationaux respectifs. Je me rapporte à la préférence accordée à la loi nationale, comme base du statut personnel. VII. Ce n'est pas le moment d'anticiper mon travail annoncé déjà dans le premier numéro de ce Bulletin, sur les motifs pour lesquels une partie du monde peut-être la plus |