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considérable au point de vue commercial, économique et juridique ne peut pas accepter cette portée de la loi nationale. On peut consulter pour mes idées générales sur la matière, le programme de ce Bulletin et mes articles du premier numéro. Je me borne en cette occasion à signaler le fait de ce que les conférences de La Haye n'ont pas abouti à un résultat universel, par suite de l'exclusion, non seulement de tous les pays qui n'acceptent pas la loi nationale comme base du statut personnel, mais aussi de plusieurs nations qui suivent le principe continental de la nationalité, le Brésil, le Chili, les républiques hispano-américaines du Nord de l'Equateur, de l'Amérique du Centre, le Pérou, la Colombie et le Mexique.

Comme essai pour parvenir au rapprochement du bien-être juridique des nationaux des pays continentaux signataires, les conventions sont un véritable progrès.

Elles peuvent aussi être favorables aux étrangers, étant en justice dans les mêmes puissances, quoique appartenant à des pays non signataires, car nous ne méconnaissons pas le haut esprit de solidarité humaine qui a orienté la jurisprudence européenne dans ces derniers temps.

Mais en face de ces avantages, nous devons déplorer la di vision tranchante du monde civilisé an point de vue du droit international privé en deux camps, dont les frontières sont apparement infranchissables: le système de la loi nationale opposé à celui du domicile. Le premier vient d'être proclamé collectivement par les nations qui l'avaient déjà incorporé à leur législation privée; le second dérive de celle-ci ou de la jurisprudence des nations qui le pratiquent, et je ne connais d'autre manifestation internationale collective pour l'imposer, que celle limitée de Montevidéo.

E. S. ZEBALLOS.

(A suivre.)

Principes internationaux uniformes pour la répression des délits moraux

PAR BELISARIO J. MONTERO

Consul général de la République Argentine en Belgique

(Traduction spéciale de Mario Belgrano)

La Conférence Internationale réunie à Francfort, du 5 au 8 octobre dernier, pour étudier cette question, fut précédée quelques jours auparavant dans la même ville, par la Conférence nationale allemande. Dans cette dernière, l'on sanctionna la proposition suivante :

«

« La Conférence invite les gouvernements à établir des principes uniformes en vue de la répression des divers délits « moraux, et à considérer comme cas de récidive, même les « délits pour lesquels le délinquant aurait été condamné à << l'étranger. ›

On décida de continuer activement la surveillance établie depuis quelque temps, sur les navires qui transportent des émigrants et qui partent des ports d'Hambourg et de Brême; de donner de plus aux capitaines de ces bâtiments, des instructions précises, et de placer des avis sur les quais et à bord, prévenant les voyageuses du danger auquel elles s'exposent.

Dans la Conférence Internationale, présidée par le comte Bernstorff, le délégué de la Belgique, M. Belleroche, parla au nom de la Société de Moralité publique. Dès 1830, le gouvernement belge, les autorités judiciaires et cette Société, ont fait tout leur possible pour empêcher la traite des blanches. Le délégué pense que pour obtenir une meilleure et une plus rapide exécution des lois répressives, il faudrait créer un ministère de moralité, tempérance et hygiène, dont le titulaire serait inamovible dans les pays de régime parlementaire ou électif, faisant partie du cabinet, mais sans caractère politique, car sa situation ne dépendrait pas d'un vote hostile des Chambres. Cela donnerait de l'indépendance au poste, et le

titulaire n'ayant pas de préoccupations politiques, pourrait faire sentir son action prompte, énergique et efficace, remplaçant la faible autorité des municipalités, craignant toujours l'influence électorale. « Le travail de ceux qui ont à charge « l'éducation de la jeunesse sera toujours grand, devant la diriger dans un sens plus viril que par le passé, surtout <celle que doivent donner les pères et les instituteurs. Chaque réforme dans les idées et les coutumes, tendant à << nous éclairer sur le respect dû à la femme, la traitant quand << elle est tombée avec plus de pitié que de mépris, sera d'un << effet plus stable et permanent, que toutes les lois préparées « par la sagesse de nos législateurs. »

Les autres orateurs, en parlant au nom des différents pays qu'ils représentaient, firent de longues dissertations qui peuvent se résumer en ces mots :

Il est nécessaire d'établir l'union de toutes les consciences, et d'intéresser à cette œuvre la femme, aussi bien des classes élevées que la compagne de l'ouvrier. Au Congrès de Paris, l'on a commencé la partie pratique de cette résolution, et l'on espère que les gouvernements voudront bien harmoniser leurs susceptibilités. En Italie, le mouvement se développe. Le gouvernement a envoyé aux préfets et aux maires, des circulaires pour poursuivre la traite. En Norvège, l'on signale peu de cas de traite, grâce à la meilleure éducation que l'on donne à la jeunesse, d'après le rapport de Madame Michelet, déléguée de ce pays. En Autriche, le premier ministre, Monsieur Koleman Szell, porte un intérêt spécial aux solutions d'ordre pratique. Le sénateur Saburow, de Russie, signale particulièrement les efforts de la « Société protectrice des femmes russes ». En Suisse, la « Société protectrice des jeunes filles » a fêté son vingt-cinquième anniversaire. Le délégué, M. de Meuron, raconte que l'audace des trafiquants est arrivé au point de s'introduire dans les hôpitaux chrétiens, pour pouvoir exercer leur industrie. Il propose des primes pour les agents subalternes de justice, qui découvriront des maisons de traite.

Le sénateur Bérenger, délégué de la France, parle des devoirs des gouvernements dans cette question. Il faut s'entendre en vue d'une législation commune, et accorder aux mineures une protection particulière. L'instigatrice doit tom

ber sous l'application de la loi, même si elle n'emploie pas la force ou la fraude: l'excitation à la licence peut suffire comme motif d'accusation. Le cas doit être jugé dans n'importe quel pays, quoique les faits délictueux servant de base à l'accusation, aient été commis en d'autres pays. Le délit subsiste, quoique la victime soit majeure et suive volontairement le traitant. En ce qui regarde la reimpatriation des victimes, chaque gouvernement doit créer un bureau chargé de recueillir tous les renseignements nécessaires, et le dit bureau se mettra d'accord avec les autorités correspondantes des autres pays. La surveillance doit être stricte, dans les ports et les gares frontières. L'arrivée de personnes douteuses et de leurs victimes, devra être annoncée à l'avance aux points de débarquement. Les femmes publiques devront être interrogées sur leur lieu de provenance, et sur les personnes qui les ont engagées ou qui les ont poussées à changer de résidence. Pendant que l'on fera le nécessaire pour leur reimpatriation, l'on devrait les confier à des institutions auxiliaires, publiques ou privées, ou à des personnes de confiance. Les frais de reimpatriation seront partagés entre les gouverne

ments.

M. Frey, de Mulhouse, se déclare partisan de la suppression des maisons de tolérance. Elle a été exécutée à Colmar, où après quelques protestations, l'on a reconnu la sagesse de la mesure. Mulhouse a suivi cet exemple, et la santé et la moralité publique ont gagné. Depuis lors, à l'hôpital de la « Société de logement des jeunes ouvriers (Herberge zur Heimat) dont il est président, les maladies ont diminué.

M. Lépine, préfet de police de Paris, dit que le mouvement est devenu déjà universel, et est arrivé aux sphères du gouvernement. Pour le moment, c'est le meilleur résultat, puisque les Parlements seront obligés de s'occuper de la question et de dicter la législation que l'on demande. On doit faire comme en Allemagne, et intéresser moralement la police dans le triomphe de la cause.

On accepte enfin les deux propositions suivantes : La Conférence, par l'intermédiaire des Comités nationaux, invite les Compagnies de navigation de toutes les nations: 1o A contribuer à la répression de la traite des blanches, en obligeant les capitaines de navire, comme on le fait partiellement, à recher

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cher les passagers suspects, à les signaler aux Consulats au moment du débarquement, et à communiquer aux Comités les observations qu'ils auront faites; 2o A placer sur tous les navires, des avertissements en différentes langues, signalant l'existence de la traite, et indiquant les adresses où les jeunes filles ou les femmes peuvent trouver aide à leur arrivée.

Tel est, en général, le résultat de la Conférence internationale de Francfort.

La Conférence réunie à Paris, en juillet dernier, est la seule qui, jusqu'à présent, ait produit des résultats pratiques, provoquant des réformes de législation dans les pays qui y prirent part. Il est bon de remarquer que notre République qui y fut spécialement invitée, ne s'y fit pas représenter.

La dite Conférence devait étudier et conseiller aux gouvernements les mesures pour combattre le mal, mais en tenant compte des susceptibilités de certaines nations, qui, si en principe elles admettent le besoin de mettre une fin aux abus existants, désirent d'un autre côté conserver leur indépendance pour réglementer les questions d'ordre national provoquées par le trafict. Dans le document final adopté, on a tenu compte de ces antécédents.

Le dit document, qui est d'une grande importance, comprend deux parties différentes Un projet de convention internationale, avec le protocole de clôture, et un autre projet de règlement administratif. Dès qu'on les aura admis, on suivra les voies ordinaires, c'est-à-dire, ils seront signés par voie diplomatique par les plénipotentiaires des nations contractantes résidant à Paris, et acceptés et légalisés dans la forme que chaque pays a établie pour la sanction de ses traités internationaux, et enfin viendront les ratifications échangées à Paris.

Le projet définit le délit international de la traite des blanches en ces termes :

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« 1° Toute personne qui, pour satisfaire les passions d'autrui, embauche, entraîne ou égare une femme ou mineure, << en vue de la licence, quoique avec son consentement, et quoique les différents faits qui forment les éléments consti< tutifs de l'infraction aient été réalisés en différents pays, << sera punie.

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