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le procès est intenté dans un pays autre que celui où le délit a été commis (V), la protection des choses corporelles et incorporelles et des marques de fabrique étrangères (VI), l'exécution des sentences prononcées en pays étranger en matière criminelle (VII), l'extradition (VIII).

Quoique l'auteur avoue franchement qu'il a suivi et abrégé l'ouvrage bien connu de Felix, son initiative n'en est pas moins digne de reconnaissance. Qu'on se rappelle qu'en 1873, lors de la publication de son texte, le droit international privé n'avait pas encore de chaires indépendantes dans la plupart des pays d'Europe.

E. S. ZEBALLOS.

La Codification du Droit International Privé

aux Conférences de La Haye (1893-1904)

(Suite, ce BULLETIN VI, pag. 377)

VI.- Pour apprécier définitivement la trascendance de cette division du monde au point de vue des systèmes du droit international privé, et de leur influence juridique et économique sur la civilisation, il faut faire une petite excursion statistique. Nous pouvons au point de vue géographique tracer ce tableau:

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(1) Il semble que la Suède et la Norvège aient éprouvé des hésitations profondes pour se décider à souscrire définitivement à la codification de la loi nationale à La Haye, car, représentées aux diverses conférences et

Le nombre de pays n'est pas un argument. Il faut envisager la question sous un autre point de vue. Si on considère le mélange des foules humaines, les Etats-Unis, l'Empire Britannique, la République Argentine et ses voisines, qui reçoivent son influence, offrent les exemples les plus frappants de communautés sociales et juridiques, nonobstant les diverses lois nationales, des immigrants, qui arrivent à leurs territoires pour se domicilier.

La République Argentine, où l'étranger n'est pas hostilisé dans le but de le faire naturaliser, comme cela arrive aux Etats-Unis, est dans notre temps le pays le plus intéressant pour la large expérimentation des systèmes de droit international privé. Le nombre toujours croissant des étrangers (1.600.000 fils d'étrangers, 1.300.000 étrangers, décembre 1904), de même que la conservation de leur nationalité, tout en cultivant des relations fréquentes et intimes, avec les personnes, les familles, le commerce, la propriété foncière et les tribunaux du pays, en même temps qu'ils maintiennent des relations analogues avec leur patrie, leur soumission volontaire au droit de la République, aurait rendu presque impossible leur vie juridique et leur bien-être, si les principes adoptés par la Constitution et par les codes ne leur garantissaient le développement aisé et stable de leur vie juridique.

Trente-cinq années d'application de nos lois privées dans l'unique nation moderne d'immigration, où la grande naturalisation n'opère encore l'unification et ses bienfaits, ont prouvé d'une façon éclatante, solennelle et définitive, que presque toutes les exigences du droit international privé, trouvent

même signataires de la convention du 14 novembre 1896, elles se sont abstennes en 1902, pour n'entrer dans le mouvement qu'en 1904.

(2) Quant à la Russie, qui se trouvait dans le même cas que la Suède et la Norvège, elle s'est définitivement retirée des conférences de La Haye pour des raisons profondes, qui se rapportent à la condition juridique du mariage religieux.

(3) Le Danemark et la Norvège, adhérant aussi aux conférences, sont restés fidèles au système du domicile.

(4) Les pays signataires des conventions de La Haye font, toutefois, une place très considérable au domicile, dans leurs lois et jurisprudence,

des solutions dans la République Argentine (1). Elles abordent les questions sans égard à la nationalité des personnes pour la Constitution et les lois argentines, il n'y a que des hommes. Ses principes sont donc universels.

Les Etats-Unis et tous les autres pays du système du domicile, quoique moins libéraux envers les étrangers, offrent une expérience édifiante qui est généralement et étonnamment inconnue dans les pays européens où le nombre et le séjour des étrangers sont plus limités, où on ne connaît pas les immigrations de peuplades en masses (cinquante mille européens ont débarqué à Buenos Aires en novembre et décembre 1904), où la liberté de s'établir n'est pas un droit reconnu sans entraves, où l'égalité entre les nationaux et les étrangers n'est pas encore complète, où enfin le nombre de ressortissants n'aboutit jamais à ces mouvements d'immigration, qui forment la base des populations (700.000 immigrants sont arrivés d'Europe aux Etats-Unis et dans la République Argentine en 1904), des grands et vigoureux Etats de l'avenir et même du présent. Le système de la nationalité n'aurait pu résoudre ces difficultés. échouant dans le cahos.

Le système de la nationalité, appliquable en Europe, dans sa condition politique, juridique et sociale actuelle, abandonne toutefois ses ressortissants à l'étranger. Pas moins de quarante millions d'Européens, y compris leurs fils, établis dans les pays qui rejettent le système de la loi nationale, n'en bénéficient pas. En se soumettant aux lois et aux tribunaux étrangers, leur état, leur capacité, leur famille et leurs biens resteraient livrés au hasard, si les nations du domicile ne leur accordaient leur protection, ne considérant que leur caractère de membres de la société humaine, magna respublica.

La codification de La Haye est donc une solution partiale des difficultés juridiques au point de vue géographique. L'uniformité poursuivie à La Haye a échoué par suite de l'abstention absolue de l'Empire Britannique, du Danemark, de la Russie et des pays qui n'ont pas ratifié la convention. Voici l'unité géographique des applications juridiques rompue d'une manière que les juristes européens regrettent vivement (2).

(1) Ce Bulletin. I. 2 et 3,

(2) Les Conventions de La Haye, etc.. par Louis Renault. Paris 1903, p. 19

On doit aspirer à des solutions universelles. Les premières sont les produits d'une situation politique donnée. On doit tendre à trouver des solutions purement scientifiques. L'ordre public doit être considéré comme une limite strictement nécessaire à la conservation de l'Etat. Hors de ce concept les applications de l'ordre public ne s'armonisent ni avec la liberté civile ni avec la solidarité humaine, dont les manifestations croissent toujours. Ainsi que les sciences politiques tâchent de limiter le droit de l'Etat envers l'individu, de même le droit international privė doit obtenir de l'ordre public international les moindres restrictions envers l'étranger, et en égard à l'extraterritorialité du droit privé.

C'est une erreur fondamentale que de croire que le déplacement géographique successif ou permanent des hommes apporte quelque dommage à la patrie des ressortissants, de telle sorte qu'il soit convenable d'entraver ou de limiter certains droits fondateurs de la civilisation, telle que la libre circulation, la soumission volontaire au droit étranger et le changement de nationalité.

Dans l'état présent du monde cette apparente dissociation des forces concourt toutefois à leur grand but universel de culture, de richesse collective et individuelle, de rapprochement international et de solidarité morale.

L'élimination de la question des races dans presque tous les pays contribue aussi à ce résultat. Les doctrines de Montesquieu ne résistent plus à la critique scientifique. Le mélange ethnographique est tel de nos jours, que personne ne saurait dire quelle est la race argentine ou américaine. Et si cela est vrai dans les pays d'immigration, cela ne l'est pas moins pour les sociétés européennes, formées par des stratifications successives de peuples, qui ne permettent pas d'isoler le type original. Quelle est par exemple la race française ? Le mot « race latine » n'a pas de valeur scientifique.

Le type moderne des sociétés politiques, formées par la confusion des foules, qui s'affranchissent du régime féodal du territoire et qui acceptent comme fondement de l'Etat, l'idéal commun, exigent à plus forte raison une nouvelle orientation, hardie et universelle, du droit international privé (1).

(1) Cf. ce Bulletin, I, p. 5.

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