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Le chef repart qu'on ait tort ou raison,
Ramez, faquins, belle comparaison
De fouet à fouet la verge de Moïse,
Et le cordon de Saint-François d'Assise !

:

Trois jours avaient coulé sans accidens :
Le quatrième, ainsi qu'entre leurs dents
Les gris-vêtus priaient leur patriarche

De se venger en purifiant l'arche,

L'un d'eux soudain s'écrie: ah! le voilà!
Qui? Saint François ! où ? sur l'eau, là-bas, là!
Tenez, voyez, vis-à-vis de la poupe.
Sur le tillac aussitôt l'on s'attroupe:
Oui, c'est, dit-on, vraiment un Cordelier!
C'en est bien un! le fait est singulier!

En pleine mer, un homme et, n'en déplaise,
Qui paraît même être là fort à l'aise !

C'est, s'écriait un moinillon fervent,

C'est ce grand Saint, qu'à la merci des vents, Prêts à périr, ingrats, vous réclamâtes!

Mon eil d'ici distingue les stigmates.

Je vois, je vois l'ange extern inateur,
Tremblez, méchans! La frocaille en tumulte
Passait déjà de l'espoir à l'insulte :
La soldatesque incertaine et tout bas
Se demandait l'est-ce? ne l'est-ce pas ?

La nuit laissait leur ame irrésolue,
L'Indévot crut avoir eu la berlue;
Et du soleil attendit le retour.

Le soleil luit on revoit tout le jour
Le même objet à pareille distance;
Jà le relaps incline à pénitence,

C'est Saint-François! Qui pourrait-ce être donc?
Voilà des gens pénauds, s'il en fut onc.
Le commandant, dont la visière est nette,
Pour le plus sûr, met l'œil à la lunette,
Et dit ma foi, vous ne vous trompez point;
Je vois capuce et froc, c'est de tout point
Un Cordelier bien vif, bien à la nage;
Il veut venir sans doute à l'abordage :
Il faut l'attendre holà! hô! le grapin!
Chacun se signe, au cri du turlupin;
D'horreur le poil en dresse à tout son monde;
L'objet s'enfonce et disparaît sous l'onde.
S'élève alors un vent plus que gaillard,

Et, ful-ce un coup du ciel ou du hasard,
Vous en allez savoir le pour et contre.
Dont au plus près le nageur se remontre;
Le harpon tombe, accroche, et tire... qui?
Etait-ce bien un Cordelier? Nenni :

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Car de par Dieu, sa mère et Saint-Antoine,
Jamais l'habit ne fit si peu le moine.

C'était au vrai l'habit d'un franciscain,
Mais sous lequel ne gissait qu'un requin,
Poisson goulu, vorace, anthropophage,
Poisson béant, poisson pour tout potage;
Mais un poisson froqué! Par quel hasard?
Vous avez vu noyer père Grichard :
Figurez-vous ce requin qui le gobe,
Non pas avec, mais par-dessous la robe;
Des pieds au col tantôt il fut grugé;
Et là du tronc la tête prit congé.
Le froc alors présentant l'ouverture,
Avait du monstre embéguiné la hure;

Et de ce jour, quêteur humble et gourmand,
Frère requin suivait le bâtiment. (15)

LES DEUX PIGEONS.

FABLE.

DEUX pigeons s'aimaient d'amour tendre:

L'un deux, s'ennuyant au logis,

Fut assez fou pour entreprendre
Un voyage en lointain pays.

L'autre

L'autre lui dit: Qu'allez-vous faire ?
Voulez-vous quitter votre frère?

L'absence est le plus grand des maux :

Non pas pour vous, cruel. Au moins que les travaux, Les dangers, les soins du voyage,

Changent un peu votre courage.

Encor si la saison s'avançait davantage !

Attendez les zéphyrs: qui vous presse? un corbeau Tout à l'heure annonçait malheur à quelque oiseau. Je ne songerai plus que rencontre funeste,

Que faucons, que réseaux. Hélas! dirai-je il pleut; Mon frère a-t-il tout ce qu'il veut,

Bon souper,

bon gîte et le reste ?

Ce discours ébranla le cœur

De notre imprudent voyageur.

Mais le désir de voir et l'humeur inquiète
L'emportérent enfin. Il dit: Ne pleurez point :
Trois jours au plus rendront mon ame satisfaite.
Je reviendrai dans peu conter de point en point
Mes aventures à mon frère.

Je le désennuirai: quiconque ne voit guère,
N'a guère à dire aussi. Mon voyage dépeint
Vous sera d'un plaisir extrême.

Je dirai J'étais là, telle chose m'advint :

:

Vous y croirez être vous-même.

A ces mots, en pleurant, ils se dirent adieu.

Tome II.

3

Le voyageur s'éloigne et voilà qu'un nuage
L'oblige de chercher retraite en quelque lieu.
Un seul arbre s'offrit, tel encor que l'orage
Maltraita la pigeon en dépit du feuillage.
L'air devenu serein, il part tout morfondu,
Sèche du mieux qu'il peut son corps chargé de pluie,
Dans un champ à l'écart voit du blé répandu,
Voit un pigeon auprès cela lui donne envie:
Il y vole, il est pris ce blé couvrait d'un lacs
Les menteurs et traîtres appâts.

Le lacs était usé; si bien que de son aile,

De ses pieds, de son bec, l'oiseau le rompt enfin.
Quelque plume y périt; et le pis du destin
Fut qu'un certain vautour, à la serre cruelle,
Vit notre malheureux, qui, traînant la ficelle
Et les morceaux du lacs qui l'avait attrapé,
Semblait un forçat échappé.

Le vautour s'en allait le lier, quand des nues
Fond à son tour un aigle aux ailes étendues.
Le pigeon profita du conflit des voleurs,
S'envola, s'abattit auprès d'une masure,

Crut pour ce coup que ses malheurs
Finiraient par cette aventure :

Mais un frippon d'enfant, cet âge est sans pitié,
Prit sa fronde, et du coup tua plus d'à-moitié
La volatile malheureuse >

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