Qui, maudissant sa curiosité, Voilà nos gens rejoints; et je laisse à juger Amans, heureux amans, voulez-vous voyager? Pour qui, sous le fils de Cythère, Ne sentirai-je plus de charme qui m'arrête ? A M. DE COULANGES. Paris, le 15 Décembre 1670. Je m'en vais vous mander la chose la plus étonnante, la plus surprenante, la plus merveilleuse, la plus miraculeuse, la plus triomphante, la plus étourdissante, la plus inouie, la plus singulière, la plus extraordinaire, la plus incroyable, la plus imprévue, la plus grande, la plus petite, la plus rare, la plus commune, la plus éclatante, la plus secrète jusqu'aujourd'hui, la plus brillante, la plus digne d'envie; enfin, une chose que nous ne saurions croire à Paris, comment la pourrait-on croire à Lyon? une chose qui fait crier miséricorde à tout le monde; une chose qui comble de joie Madame de Rohan et Madame de Hauterive; une chose enfin qui se fera Dimanche, où ceux qui la verront croiront avoir la berlue; une chose qui se fera Dimanche et qui ne sera peut-être pas faite Lundi. Je ne puis me résoudre à vous la dire, devinez-la, je vous le donne en trois; jetez-vous votre langue aux chiens? Hé bien, il faut donc vous le dire. Monsieur de Lauzun épouse Dimanche au Louvre, devinez qui? Je vous le donne en quatre, je vous le donne en six, je vous le donne en cent. Madame de Coulanges dit : voilà qui est bien difficile à deviner ; c'est Ma dame de la Valière: point du tout, Madame. C'est donc Mademoiselle de Retz: point du tout; vous êtes bien provinciale. Ah! vraiment nous sommes bien bêtes, dites-vous, c'est M.elle Colbert; encore moins. C'est assurément Mademoiselle de Créqui: vous n'y êtes pas; il faut donc à la fin vous le dire: il épouse Dimanche au Louvre, avec la permission du Roi, Mademoiselle, Mademoiselle de... Mademoiselle, devinez le nom; il épouse Mademoiselle, la grande Mademoiselle, Mademoiselle, fille de feu MONSIEUR d'Eu, Mademoiselle, petitefille D'HENRI IV, Mademoiselle d'Eu, Mademoiselle de Dombes, Mademoiselle de Montpensier, Mademoiselle d'Orléans, Mademoiselle, cousine germaine du Roi, Mademoiselle destinée au trône, Mademoiselle, le seul parti de la France qui fût digne de MONSIEUR. Voilà un beau sujet de discourir; si vous criez, si vous êtes hors de vous-même, si vous dites que nous avons menti, que cela est faux, qu'on se moque de vous, que voilà une belle raillerie, que cela est bien fade à imaginer; si enfin vous nous dites des injures, nous trouverons que vous avez raison; nous en avons fait autant que vous. Adieu, les lettres qui seront portées par cet ordinaire, vous feront voir si nous disons vrai ou non, (17) ÉLÉGIE POUR M. FOUQUET. REMPLISSEZ EMPLISSEZ l'air de cris en vos grottes profondes, Pleurez, Nymphes de Vaux, faites croître vos ondes, Et que l'Anqueuil (18) enflé ravage les trésors Dont les regards de Flore ont embelli ses bords. On ne blamera pas vos larmes innocentes : Vous pouvez donner cours à vos douleurs pressantes: Chacun attend de vous ce devoir généreux; Les destins sont contens, Oronte est malheureux. Vous l'avez vu naguère au bords de vos fontaines, Qui, sans craindre du sort les faveurs incertaines, Plein d'éclat, plein de gloire, adoré des mortels, Recevait des honneurs qu'on ne doit qu'aux Autels. Hélas! qu'il est déchu de ce bonheur suprême! Que vous le trouveriez différent de lui-même Pour lui les plus beaux jours sont de secondes nuits, En des gouffres de maux de plongent à toute heure , Il ne regarde pas ce qu'il laisse en arrière |