Il ne s'y livre plus qu'avec indifférence;
Ils n'ont tous à ses yeux qu'une même nuance : Son âme sans ressort languit sans mouvement, Et ne peut distinguer un goût d'un sentiment. Dans le rire affecté d'une joie apparente, Il consume le cours de sa vie indolente : Mais ce dehors trompeur cache un profond ennui. Cet ennui le dévore, il le traine avec lui,
Et c'est en vain qu'il quitte, en croyant se distraire, Un plaisir qui déplaît pour un qui va déplaire. De mes concitoyens les sens trop délicats, Toujours près du bonheur, ne le possèdent pas. Il échappe à leurs soins, à leurs recherches vaines : Mais, froids pour les plaisirs, ils ressentent les peines. Leurs maux les plus légers sont des tourments affreux. L'un d'eux (et ce trait seul me fait rougir pour eux), L'un d'eux, sur le duvet où leur ennui repose, Sut trouver la douleur dans le pli d'une rose. Automates flétris, fantômes épuisés
Du poids de leur parure ils semblent écrasés. Leur corps foible et tremblant s'affaisse sous lui-même. Tous ces voluptueux, dans leur mollesse extrême, Sont éblouis du jour dont ils sont éclairés : On les voit, sur leurs chars, pâles, défigurés, S'évanouir au bruit de leurs coursiers rapides. Au milieu des festins, sur leurs lèvres livides, Leurs mains, en frémissant, portent les coupes d'or: Ils y burent l'ennui qu'ils vont y boire encor. Pour hâter le soleil et la course des heures, Etendus sur des lits au fond de leurs demeures, Heureux de s'oublier, ils dorment sous le dais. Le silence et la nuit règnent dans leurs palais. Là, bercés tristement des mains de la inollesse, Leur propre oisiveté les lasse et les oppresse. Brisés par le repos, tourmentés sur des fleurs, Ils s'agitent enfin, et vont languir ailleurs.
Trop foibles (Dieux puissants, rendez vain cet augure! ), Trop foibles pour porter le fardeau d'ane armure, Epouvantés chez eux de l'ombre des dangers, Plus timides encore aux yeux des étrangers, Esclaves destinés aux fers d'un nouveau maître, Ils auront pour vainqueur quiconque voudra l'être (1).
Accablé du fardeau d'une tristesse extrême, Réduit au sort affreux d'être à charge à moi-même, J'épargne aux yeux d'autrui l'objet fastidieux D'homme ennuyé partout, et partout ennuyeux. C'est un état qu'en vain vous voudriez combattre : Insensible aux plaisirs dont j'étois idolâtre, Je ne les connois plus, je ne trouve aujourd'hui Dans ces mêmes plaisirs que le vide et l'ennui ; Cette uniformité des scènes de la vie Ne peut plus réveiller mon âme appesantie; Ce cercle d'embarras, d'intrigues, de projets, Ne doit nous ramener que les mêmes objets; Et, par l'expérience instruit à les connoitre, Je reste sans désirs sur tout ce qui doit être. Dans le brillant fracas où j'ai long-temps vécu, J'ai tout vu, tout goûté, tout revu, tout connu; Si chacun n'y restoit que le temps de son rôle, J'ai rempli pour ma part ce théâtre frivole: Tout seroit à sa place, et l'on ne verroit pas Tant de gens éternels dont le public est las.
Le monde usé pour moi n'a plus rien qui me touche, Et c'est pour lui sauver un rêveur si farouche,
Qu'étranger désormais à la société,
Je viens de mes déserts chercher l'obscurité.
GRESSET. Sidney, act. II, sc. II.
(1) Voyez en prose, Caractères ou Portraits.
Si vous avez goûté tous les biens des humains, Si vous les connoissez, le choix est dans vos mains : Bornez-vous aux plus vrais ; et laissez les chimères Dont le repentir suit les lueurs passagères.
Quel fut votre bonheur? A présent sans désirs, Vous avez, dites-vous, connu tous les plaisirs. Hé quoi! n'en est-il point au-dessus de l'ivresse Où le monde a plongé notre aveugle jeunesse ? Ce tourbillon brillant de folles passions, Cette scène d'erreurs, d'excès, d'illusions,
Du bonheur des mortels bornent-ils donc la sphère ? La raison à nos vœux ouvre une autre carrière. Croyez-moi, cher ami, nous n'avons pas vécu : Employer ses talents, son temps et sa vertu, Servir au bien public, illustrer sa patrie, Penser enfin, c'est là que commence la vie. Voilà les vrais plaisirs dignes de tous nos vœux La volupté par qui l'honnête homme est heureux : Notre âme pour ces biens est toute neuve encore. LE MÊME. Ibid.
Moi! je me garde bien de dire un mot ; j'admire. Je sens que pour s'instruire il n'étoit pas besoin De tant se fatiguer, de prendre tant de soin. Oh! non, je reconnois que ces longues études N'étoient que sot ennui, que tristes habitudes; Je vois qu'à moins de frais il est de beaux esprits, Et même des savants, qui, n'ayant rien appris, N'ignorent nulle chose, et, des heures entières, Vont parler, discuter sur toutes les matières," Sur des points de science, en affaires de goût, Dans le monde, au spectacle, en famille, et partout,
S'érigent en censeurs, en arbitres suprêmes,
Et toujours, en un mot, sont très-contents d'eux-mêmes.
On est tout confondu d'un ton si décidé.
Tu sais tout, à t'entendre; et monsieur de Naudé
Me disoit même hier: Que de choses j'ignore! Mon ami, je vieillis en m'instruisant encore. J'admire, ajoutoit-il,
Et l'air de confiance, et l'éternel babil
De ces messieurs à peine échappés de l'enfance; Car ils ont, d'un seul pas, franchi l'adolescence. Ils semblent tout savoir, à leur ton, leur maintien ; Mais ils ne savent rien, n'apprendront jamais rien; Parlent avec mépris de tout ce qu'ils ignorent, Et de leur nullité publiquement s'honorent; Etres inconséquents, neufs et blasés, flétris, Tels que des fruits sans goût, avant le temps mûris: A quinze ans, les voilà déjà de petits hommes
Plus forts, même plus vieux que tous tant que nous sommes. COLLIN-D'HARLEVILLE. Le Vieillard et les Jeunes
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