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N. B. Dans tout le cours de cette édition, les notes de l'Auteur seront indiquées par des chiffres; celles de MM. G. Petitain et Musset- Pathay le seront par des astérisques, et, toujours suivies de leurs initiales, les nôtres en petit nombre, seront sans signature.

Pour les Confessions particulièrement, les variantes seront indiquées par des lettres de l'alphabet, et précédées au bas des pages de ce signe abréviatif VAR. Voyez sur ces variantes ce qui est dit dans l'Avertissement.

Il est encore une remarque bonne à faire une fois pour toutes, et qui s'applique à l'édition entière. Il étoit de toute convenance d'y suivre l'orthographe adoptée par l'auteur lui-même, quelques changemens que l'usage ou l'autorité d'un grand écrivain y eût fait introduire depuis. C'est par cette raison même que tous les mots en ant ou ent au singulier, seront imprimés sanst au pluriel. Il est prouvé par les manuscrits de Rousseau qu'il les a constamment écrits ainsi, et ils ne sont pas autrement orthographiés dans les éditions de ses ouvrages faites sous ses yeux ou qu'il a fait faire en Hollande.

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Je forme une entreprise qui n'eut jamais | de mauvais, rien ajouté de bon; et s'il m'est ard'exemple, et dont l'exécution n'aura point d'imitateur (a). Je veux montrer à mes semblables un homme dans toute la vérité de la nature, et cet homme, ce sera moi.

Moi seul. Je sens mon cœur, et je connois les hommes. Je ne suis fait comme aucun de ceux que j'ai vus; j'ose croire n'être fait comme aucun de ceux qui existent. Si je ne vaux pas mieux, au moins je suis autre. Si la nature a bien ou mal fait de briser le moule dans lequel elle m'a jeté, c'est ce dont on ne peut juger qu'après m'avoir lu.

Que la trompette du jugement dernier sonne quand elle voudra, je viendrai, ce livre à la main, me présenter devant le souverain juge. Je dirai hautement: Voilà ce que j'ai fait, ce que j'ai pensé, ce que je fus. J'ai dit le bien et le mal avec la même franchise, Je n'ai rien tû

(a) VARIANTE....... d'exemple, et qui n'aura point d'imitaleur. - Dès ces premières lignes on reconnoît dans notre texte une correction faite par l'auteur en recopiant son ouvrage. Si celle-ci offre une locution qui n'est guère plus satisfaisante que celle dont elle tient la place, il faut seulement en conclure qu'il ne s'est pas donné le temps de chercher une correction plus

heureuse.

G. P.

rivé d'employer quelque ornement indifférent, ce n'a jamais été que pour remplir un vide occasionné par mon défaut de mémoire. J'ai pu supposer vrai ce que je savois avoir pu l'être, jamais ce que je savois être faux. Je me suis montré tel que je fus; méprisable et vil quand je l'ai été; bon, généreux, sublime, quand je l'ai été : j'ai dévoilé mon intérieur tel que tu l'as vu toi-même, Étre éternel. Rassemble autour de moi l'innombrable foule de mes semblables; qu'ils écoutent mes confessions, qu'ils gémissent de mes indignités, qu'ils rougissent de mes misères (a). Que chacun d'eux découvre à son tour son cœur au pied de ton trône avec la même sincérité, et puis qu'un seul te dise, s'il l'ose, Je fus meilleur que cet homme-.

Je suis né à Genève, en 1712 (*), d'Isaac

(a) VAR. Qu'ils rougissent de mes indignités, qu'ils gemissent de mes misères.

(*) Rousseau croyait être né le 4 juillet. Il nous l'apprend luimême dans une lettre à madame de Latour, du 27 janvier 1763; mais il étoit dans l'erreur. Il vint au monde le 28 juin 1712, dans une visite que faisoit sa mère, qui mourut en couches.

M. P.

N. B. Dans tout le cours de cette édition, les notes de l'Auteur seront indiquées par des chiffres; celles de MM. G. Petitain et Musset Pathay le seront par des astérisques, et, toujours suivies de leurs initiales, les nôtres en petit nombre, seront sans signature.

Pour les Confessions particulièrement, les variantes seront indiquées par des lettres de l'alphabet, et précédées au bas des pages de ce signe abréviatif VAR. Voyez sur ces variantes ce qui est dit dans

l'Avertissement.

Il est encore une remarque bonne à faire une fois pour toutes, et qui s'applique à l'édition entière. Il étoit de toute convenance d'y suivre l'orthographe adoptée par l'auteur lui-même, quelques changemens que l'usage ou l'autorité d'un grand écrivain y eût fait introduire depuis. C'est par cette raison même que tous les mots en ant ou ent au singulier, seront imprimés sanst au pluriel. Il est prouvé par les manuscrits de Rousseau qu'il les a constamment écrits ainsi, et ils ne sont pas autrement orthographiés dans les éditions de ses ouvrages faites sous ses yeux ou qu'il a fait faire en Hollande.

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Je forme une entreprise qui n'eu: jama d'exemple, et dont l'exécution n'aura pom. mitateur (a). Je veux montrer à mes seminatee un homme dans toute la vérité de la nature cet homme, ce sera moi.

Moi seul. Je sens mon cœur, et je commu les hommes. Je ne suis fait comme un ceux que j'ai vus; j'ose croire n'être fai comm aucun de ceux qui existent. Si je ne vam sa mieux, au moins je suis autre. Si la natur bien ou mal fait de briser le moule dan elle m'a jeté, c'est ce dont on ne peuge qu'après m'avoir lu.

Que la trompette du jugement derner aute quand elle voudra, je viendrai, ce inse main, me présenter devant le souverar Je dirai hautement: Voilà ce ques que j'ai pensé, ce que je fus. J'ai ch. le mal avec la même franchise. Je

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Rousseau, citoyen, et de Susanne Bernard, ci- des hommages. M. de la Closure, résident de

toyenne. Un bien fort médiocre, à partager |
entre quinze enfans, ayant réduit presque à |
rien la portion de mon père, il n'avoit pour
subsister que son métier d'horloger, dans le-
quel il étoit à la vérité fort habile. Ma mère,
fille du ministre Bernard, étoit plus riche: elle
avoit de la sagesse et de la beauté. Ce n'étoit
pas sans peine que mon père l'avoit obtenue.
Leurs amours avoient commencé presque avec
leur vie; dès l'âge de huit à neuf ans ils se prome-
naient ensemble tous les soirs sur la Treille, à
dix ans ils ne pouvoient plus se quitter. Lasym-
pathie, l'accord des âmes, affermit en eux le sen-
timent qu'avoit produit l'habitude. Tous deux,
nés tendres et sensibles, n'attendoient que le
moment de trouver dans un autre la même dis-
position, ou plutôt ce moment les attendoit eux-
mêmes, et chacun d'eux jeta son cœur dans le
premier qui s'ouvrit pour le recevoir. Le sort,
qui sembloit contrarier leur passion, ne fit que
l'animer. Le jeune amant, ne pouvant obtenir
sa maîtresse, se consumoit de douleur: elle lui
conseilla de voyager pour l'oublier. Il voyagea
sans fruit, et revint plus amoureux que jamais.
Il retrouva celle qu'il aimoit tendre et fidèle.
Après cette épreuve, il ne restoit qu'à s'aimer |
toute la vie; ils le jurèrent, et le ciel bénit leur

serment.

Gabriel Bernard, frère de ma mère, devint amoureux d'une des sœurs de mon père; mais elle ne consentit à épouser le frère qu'à condition que son frère épouseroit la sœur. L'amour arrangea tout, et les deux mariages se firent le même jour. Ainsi mon oncle étoit le mari de ma tante, et leurs enfans furent doublement mes cousins germains. Il en nacquit un de part et d'autre au bout d'une année; ensuite il fallut encore se séparer.

France, fut des plus empressés à lui en offrir. Il falloit que sa passion fût víve, puisqu'au bout de trente ans je l'ai vu s'attendrir en me parlant d'elle. Ma mère avoit plus que de la vertu pour s'en défendre; elle aimoit tendrement son mari. Elle le pressa de revenir : il quitta tout et revint. Je fus le triste fruit de ce retour. Dix mois après, je nacquis infirme et malade. Je coûtai la vie à ma mère, et ma naissance fut le premier de mes malheurs.

Je n'ai pas su comment mon père supporta cette perte, mais je sais qu'il ne s'en consola jamais. Il croyoit la revoir en moi, sans pouvoir oublier que je la lui avois ôtée; jamais il ne m'embrassa que je ne sentisse à ses soupirs, à ses convulsives étreintes, qu'un regret amer se mêloit à ses caresses: elles n'en étoient que plus tendres. Quand il me disoit, Jean-Jacques, parlons de ta mère; je lui disois, Hé bien! mon père, nous allons donc pleurer : et ce mot seul lui tiroit déjà des larmes. Ah! disoit-il en gémissant, rends-la-moi, consolemoi d'elle, remplis le vide qu'elle a laissé dans mon âme. Taimerois-je ainsi si tu n'étois que mon fils? Quarante ans après l'avoir perdue, il est mort dans les bras d'une seconde femme, mais le nom de la première à la bouche, et son image au fond du cœur.

Tels furent les auteurs de mes jours. De tous les dons que le ciel leur avoit départis, un cœur sensible est le seul qu'ils me laissèrent : mais il avoit fait leur bonheur, et fit tous les malheurs de ma vie.

J'étois né presque mourant, on espéroit peu de me conserver. J'apportai le germe d'une incommodité que les ans ont renforcée (*), et qui maintenant ne me donne quelquefois des relâches que pour me laisser souffrir plus cruellement d'une autre façon. Une sœur de mon père, fille aimable et sage, prit si grand elle avoit de la lecture, et faisoit des vers passables. En voici qu'elle fit impromptu dans l'absence de son frère et de son

Mon oncle Bernard étoit ingénieur: il alla servir dans l'Empire et en Hongrie sous le prince Eugène. Il se distingua au siége et à la bataille de Belgrade. Mon père, après la naissance de mon frère unique, partit pour Cons-mari, se promenant avec sa belle-sœur et leurs deux enfans,

tantinople, où il étoit appelé, et devint horloger du sérail. Durant son absence, la beauté de ma mère, son esprit, ses talens (1), lui attirèrent

(1) Elle en avoit de trop brillans pour son état, le ministre son père, qui l'adoroit, ayant pris grand soin de son éducation. Elle dessinoit, elle chantoit, elle s'accompagnoit du théorbe,

sur un propos que quelqu'un lui tint à leur sujet :
Ces deux messieurs qui sont absens
Nous sont chers de bien des manières;

Ce sont nos amis, nos amans;

Ce sont nos maris et nos frères,

Et les pères de ces enfans.

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