des critiques différentes qu'on a faites de sa pièce sur les vaisseaux sa bile s'est émue, et il vient de la répandre à grands flots dans une épître à şa Chatte. Il règne dans cette niaiserie une amertume qui fait peu d'honneur à la philosophie du poëte. Il paraît, au reste, ne pas s'en piquer. Il a fait aussi une ode sur la poésie et la philosophie, où il dégrade absolument cette dernière, pour élever l'autre sur sés débris. Il le fait comme il le dit ; car il y a de très-beaux vers dans cette pièce, et pas le sens commun. (4 Septembre.) Les Italiens, jaloux de témoigner leur zèle dans l'occasion présente, ont fait faire un couplet en l'honneur du prince de Condé. Il a été chanté avec tous les applaudissemens dûs à ce jeune héros : le voici : Air d'un inconnu.. De nos guerriers, héros nés pour la gloire, Ils doivent vaincre, tout l'apprend; (5 Septembre.) On a fait une détestable épitaphe sur les Jésuites. On ne la cite que comme un échantillon de l'aveuglement du fanatisme : (6 Septembre.) On donnera demain à l'opéra, Acis et Galathée, pastorale héroïque en trois actes, paroles de Campistron, musique de Lully. Depuis 1686, elle a été reprise sept fois. On n'augure pas qu'elle ait un succès bien complet. On trouve mauvais qu'à la veille d'avoir une foule d'étrangers, nous donnions un aussi mauvais échantillon de notre goût musical. (9 Septembre.) M. le Mierre, sans renoncer à son Terée, s'est mis en tête de remanier un sujet traité assez mal, il est vrai, par Crébillon : c'est Idoménée. M. Colardeau a aussi une pièce sur le chantier. (10 Septembre.) Le grand rôle que Mlle. le Maure a joué sur la scène lyrique, ne nous permet pas d'omettre une circonstance essentielle de sa vie. Cette sublime actrice, si connue par sa belle voix, sa laideur et ses caprices, vient de se marier à un jeune homme, chevalier de St. Louis, nommé M. de Monrose. Elle a plus de cinquante ans. (11 Septembre.) Le Sancho vient de finir, avec vingtcinq représentations; les Sœurs rivales vont encore les Italiens promettent des nouveautés en abondance. (19 Septembre.) M. Racine est allé voir la salle de la comédie, il y a quelques jours. Sa grande dévotion l'empêche depuis long-tems de fréquenter le spectacle. Ce fils d'un illustre père a été accueilli avec tous les égards que les comédiens lui devaient. Il a tout loué, tout admiré. Sa visite faite : « Messieurs, a-t-il ajouté, je viens répéter une petite dette. Vous savez que mon père avait défendu par son testament qu'on jouât Athalie. M. le régent a depuis ordonné que, sans >> égard aux volontés du testateur, ce drame serait » donné au public. Cet ordre de M. le duc d'Orléans ne » me fait déroger en rien à mes droits. Je revendique » en conséquence la part qui me doit revenir des repré>> sentations multipliées de ce chef-d'œuvre de mon » père. » Cette demande a fort étourdi l'aréopage comique. Il est question de trouver un mezzo termine à cette contestation naissante. (26 Septembre.) M. Goldoni, avocat de Venise et auteur d'un théâtre, s'est transporté ici pour concourir au bien-être de la comédie italienne. Il travaille à présent pour elle. Ses Caquets, traduits par M. Riccoboni, ont eu un succès étonnant, et ses compatriotes espèrent tirer un grand parti de son séjour auprès d'eux. Il doit rester deux ans. Il était assez habile avocat, et travaillait beaucoup. La métromanie l'a emporté. (27 Septembre.) On confirme l'aventure de M. Racine, qui n'ira pas plus loin, à ce qu'on assure. Il colorait sa demande du prétexte de la charité : il voulait faire des aumônes de cet argent. On prétend que les comédiens se sont moqués de lui, et que cette restitution irait de 30 à 40,000 livres. (29 Septembre.) Le sieur Pigale prend, à ce qu'on pense, possession du Roule, et va travailler à finir les travaux du fameux Bouchardon. Il prétend que cet artiste ne faisait rien qui vaille sur la fin de sa vie, parce que la main lui. tremblait. En conséquence, "il refait une troisième figure du piédestal, et tirera de sa Minerve la quatrième, qui n'était pas encore com mencée. Mlle. Arnoux est absolument retirée. C'est une perte irréparable pour le théâtre lyrique. (2 Octobre 1762.) Les comédiens français ont donné aujourd'hui Zulime, de M. de Voltaire. C'est un trèsmauvais tour qu'ils ont joué à cet auteur. Zelmire, tant fêtée, venait d'être jouée tout récemment. On a comparé ces deux drames, et le premier n'a pu soutenir le choc du second. (2 Octobre.) La gazette de France nous annonçait hier les changemens faits dans les rédacteurs de cet ouvrage. On şavait que M. l'abbé Arnaud y présidait; on apprend que M. Suard lui est associé. Il était déjà son collègue à l'égard du journal étranger; il en faisait la partie anglaise. On prétend qu'ils ont mille écus chacun; d'autres veulent qu'ils n'aient que deux mille livres. (9 Octobre:) Les héritiers de La Fontaine ont un procès contre les libraires, au sujet de l'impression des œuvres de ce grand homme. Tout ce qui le concerne intéresse trop la littérature pour n'en point parler. Nous rendrons compte du jugement intervenu dans cette cause importante. (12 Octobre.) Aujourd'hui, on a donné à l'opéra de nouveaux fragmens, composés de Hilas et Zélis, Alphée et Arethuse, l'acte de Société. Le premier, déjà joué avec les Caractères de la folie, bien loin de soutenir ce mauvais drame, avait échoué conjointement. Aujourd'hui, qu'il est en meilleure compagnie, on l'a goûté beaucoup. Larrivée et mademoiselle le Maure en font tous les honneurs. On a vu reparaître dans Alphée et Arethuse mademoiselle Arnoux, éclipsée depuis plusieurs mois, et qui même avait quitté. Heureusement qu'elle n'a pas tenu long tems rigueur aux directeurs et au public. Quoiqu'il en soit, elle a joué la scène avec son succès ordinaire, et avec des applaudissemens nouveaux. On ne s'attendait pas à la voir, et la surprise a été très-agréable. On a cru pourtant remarquer quelque diminution dans sa voix, mais non dans son jeu. On sait que les paroles de cet acte sont de Danchet, et la musique de Campra, refondue par Dauvergne. Cet acte est susceptible d'une grande impression, et porte au sentiment. L'acte de Société passe aussi à la faveur des deux autres et de ses ballets, agréablement dessinés, quoique la pantomime n'y soit pas parfaitement caractérisée. En général, cette réprésentation a plu, et elle soutiendra ce spectacle jusqu'à l'opéra d'hiver. (16 Octobre.) On a donné aujourd'hui aux Français le Tambour nocturne, pièce en cinq actes et en prose, imitée de l'anglais. Ce drame, imprimé dans les œuvres de Nericault Destouches, n'avait jamais été joué. En général, c'est une farce. (16 Octobre.) On nous annonce d'avance une perte irréparable qu'est sur le point de faire la comédie française, et le public encore plus : c'est Mlle. Dangeville, qui se retire à Pâque. (17 Octobre.) Le fameux Geminiani, cet agréable et savant compositeur en musique, vient de mourir à Dublin, dans un âge très-avancé. (18 Octobre.) L'opéra va, ce voyage-ci, à Fontainebleau; et pour que les plaisirs du public ne souffrent point de l'absence des meilleurs acteurs, qui sont en très-petit nombre, la cour les fait aller et revenir en poste. |