Autres exemples: Puisque vous le voulez, je vous dirai quelle est mon opinion sur cette question, et pourquoi je crois que vous étiez dans l'erreur quand vous avez soutenu l'opinion contraire. Si le ciel me donne un avis, il faut qu'il parle un peu plus clairement, s'il veut que je l'entende (Mol.). Allez, je ne sais pas, si vous n'étiez ma mère, Ce que je vous dirais, tant je suis en colère (Id.). Je ne sais pas, de vrai, quel homme il peut étre, s'il faut qu'il nous ait fait cette perfidie (Id.). S'il fallait qu'il en vînt quelque chose à ses oreilles, je dirais hautement que tu aurais menti (Id.). Vous savez que je ne manque point de cœur et que je sais me servir de mon épée quand il le faut (Id.). Qui le pourra entreprendre, si ce n'est un roi philosophe qui sache, par l'exemple de sa propre modération, faire honte à tous ceux qui aiment une dépense fastueuse, et encourager les sages, qui seront bien aises d'être autorisés dans une honnête frugalité? (Fén.). Article II. Phrase surcomposée de coordination. § 311 1. La phrase surcomposée de coordination est celle qui est formée par plus de deux propositions dont deur au moins sont des propositions principales. Quel que soit le nombre des propositions qui entrent dans une phrase surcomposée de coordination, elle ne contient que deux parties qui sont elles-mêmes composées par coordination ou par subordination, et qui, par leur réunion, forment une phrase copulative, disjonctive, adversative ou causale. Toutefois la phrase surcomposée copulative peut avoir autant de parties qu'elle contient de propositions principales. - a Phrase copulative: On partit de bon matin: — l'air était calme et le ciel serein (deux parties, dont la seconde est elle-même composée par coordination). Le prodigue déjeune avec l'abondance, dine avec la pauvreté, et soupe avec la misère (trois parties, dont chacune est une proposition simple). b) Phrase disjonctive: Travaille pendant que tu es jeune, ou tu devras travailler quand tu seras vieur (deux parties, dont chacune est composée par subordination). - c) Phrase adversative: La Turquie est très fertile, et sa situation est admirable; mais elle est peu peuplée, et son sol est mal cultivé (deux parties, dont chacune est composée par coordination). d Phrase causale: La poule est l'image d'une mère qui se dévoue pour ses enfants: (car) elle conduit ses poussins, les surveille et les protège dans le danger (deux parties, dont la première est composée par subordination et la seconde par coordination). La phrase surcomposée de coordination peut être formée de deux ou plusieurs propositions coordonnées qui ont sous leur dépendance commune une ou plusieurs propositions accessoires; c'est ce qui a surtout lieu lorsqu'il y a contraction des propositions principales: Dès qu'une fois on m'aura choqué tant soit peu, je ne pardonnerai jamais et garderai tout doucement une haine irréconciliable (Mol.). Dès qu'on sent qu'on est en colère, il ne faut ni parler ni agir (Marm.). Je me résigne et me dévoue volontiers pour victime, pourvu que je sois la seule (Ségur). Quoi qu'il en soit, pendant que je me livrais à ces réflexions, mes yeux achevèrent de se fermer, et je m'endormis profondément (X. de Maistre). Ainsi, sans que jamais notre amitié décide Qui de nous deux remplit le plus utile emploi, Je marcherai pour vous, vous y verrez pour moi (Flor.). 2. La phrase surcomposée de coordination se permute souvent en phrase surcomposée de subordination, par ex. : Napoléon sortit du Kremlin; il était suivi de quelques lieutenants; l'armée russe n'avait pu lui interdire l'accès du Kremlin, mais le feu l'en expulsait. Napoléon, (qui était) suivi de quelques-uns de ses lieutenants, sortit de ce Kremlin dont l'armée russe n'avait pu lui interdire l'accès, mais d'où le feu l'expulsait (Thiers). 3. Chacune des parties d'une phrase surcomposée pouvant à son tour être composée par coordination ou par subordination, il serait presque impossible d'indiquer toutes les combinaisons qui peuvent résulter de cet assemblage de propositions principales et accessoires, soit substantives, adjectives ou adverbiales, soit infinitives, participes ou gérondives; voici cependant quelques-unes de ces combinaisons, telles qu'elles se présentent dans les Fables de La Fontaine : Mon portrait jusqu'ici ne m'a rien reproché : Un jour viendra, qui n'est pas loin, Que ce qu'elle répand sera votre ruine (I, 8). .... Je vous connais de longtemps, mes amis; Car toi, loup, tu te plains, quoiqu'on ne t'ait rien pris; Dès qu'il voit l'oiseau de Vénus, Il le croit en son pot, et déjà lui fait fête (11, 12). L'âne, s'il eût osé, se fût mis en colère, Ce n'est pas là leur caractère (II, 19). Afin qu'il fût plus frais et de meilleur débit, On lui lia les pieds, on vous le suspendit; Puis cet homme et son fils le portent comme un lustre (III, 1). Rien ne te sert d'être farine; Car, quand tu serais sac, je n'approcherais pas (III, 18). Rien n'est plus commun que ce nom, Rien n'est plus rare que la chose (IV, 17). A celles dont les œufs ne lui rapportaient rien, Rien ne sert de courir ; il faut partir à point : Il était, quand je l'cus, de grosseur raisonnable : Le monde est vieux, dit-on : je le crois; cependant Il est bon de parler, et meilleur de se taire; Mais tous deux sont mauvais alors qu'ils sont outrés (VIII, 10). De ces exemples il résulte Que cet art, s'il est vrai, fait tomber dans les maux Que craint celui qui le consulte; Mais je l'en justifie, et maintiens qu'il est faux (VIII, 16). Deux pigeons s'aimaient d'amour tendre : L'un d'eux s'ennuyant au logis, Fut assez fou pour entreprendre Un voyage en lointain pays (IX, 2). Attendez: mon maître marie Sa fille unique, et vous jugez Qu'étant de noce il faut, malgré moi, que j'engraisse (IX, 10). Chaque castor agit : commune en est la tâche ; Le vieux y fait marcher le jeune sans relâche;, Maint maître d'œuvre y court, et tient haut le bûton (X, 1). Cependant pour salaire Un rustre l'abattait, c'était là son loyer; Quoique, pendant tout l'an, libéral il nous donne Nous quittons les cités, nous fuyons aux montagnes; Nous laissons nos chères compagnes ; Nous ne conversons plus qu'avec des ours affreux, Et de peupler pour Rome un pays qu'elle opprime (XÍ, 7). Qu'il soit singe ou qu'il fasse un livre : La pire espèce, c'est l'auteur (XII, 19). L'ordre dans lequel se suivent les propositions coordonnées dépend, non pas de leur forme grammaticale, mais de la nature des pensées qu'on veut exprimer; il n'y a donc pas d'autre règle pour la construction de la phrase de coordination que celle qui résulte de l'enchaînement même des idées. Article II. Construction de la phrase de subordination. & 313 1. Quant à la phrase de subordination ou à la phrase surcomposée, la règle générale est de les disposer de manière à établir une juste proportion entre les différentes parties et à produire ainsi l'harmonie de l'ensemble sans nuire à la liaison des idées et à la clarté de la phrase, qui doit avoir son unité, quelque étendue qu'elle soit. Dans cette enfance, ou, pour mieux dire, dans ce chaos du poème dramatique parmi nous, votre illustre frère, après avoir quelque temps cherché le bon chemin, et lutté, si je l'ose ainsi dire, contre le mauvais goût de son siècle, enfin inspiré d'un génie extraordinaire, et aidé de la lecture des anciens, fit voir sur la scène la raison, mais la raison accompagnée de toute la pompe, de tous les ornements dont notre langue est capable, accorda heureusement la vraisemblance et le merveilleux, et laissa bien loin derrière lui tout ce qu'il avait de rivaux, dont la plupart, désespérant de l'atteindre, et n'osant plus entreprendre de lui disputer le prix, se bornèrent à combattre la voix publique déclarée pour lui, et essayèrent en vain, par leurs discours et par leurs frivoles critiques, de rabaisser un mérite qu'ils ne pouvaient égaler (Racine). Pendant que Paul et elle se rafraîchissaient, Domingue alluma du feu et ayant cherché dans les rochers un bois tortu qu'on appelle bois de ronde, et qui brûle tout vert en jetant une grande flamme, il en fit un flambeau qu'il alluma, car il était déjà nuit (Bern.). Je me souviens encore du plaisir que j'éprouvais lorsque, la nuit, au milieu du désert, mon bûcher à demi éteint, mon guide dormant, mes chevaux paissant à quelque distance, j'écoutais la mélodie des eaux et des vents dans la profondeur des bois (Chat.). 2. La proposition accessoire se place, selon les cas, tantôt avant, tantôt après la principale: Quand ce peuple est pris, il s'enfuit; Donc il faut le croquer aussitôt qu'on le happe (La F. XI, 9). La proposition accessoire peut encore être au milieu de la principale; on l'appelle alors proposition incidente: Pierre qui roule n'amasse point de mousse (Prov.). La proposition accessoire elle-même, quand elle fait la fonction de principale relative, peut avoir une autre accessoire comme proposition incidente: Je devins insensiblement le favori de mon maître, qui, de son côté, comme j'avais le même faible que lui, me gagna l'âme par les marques d'affection qu'il me donna (Les.) Si la proposition principale est employée comme incidente, elle s'appelle parenthèse : Il fut, ou je me trompe fort, assez bien écouté (Corn.). Un soir, t'en souvient-il? nous voguions en silence (Lam. 3. Plusieurs propositions accessoires, soit relatives, soit conjonctives, peuvent se rapporter au même mot, substantif ou verbe. Ex.: Tel fut cet empereur, sous qui Rome adorée Qui soupirait le soir, si sa main fortunée N'avait par ses bienfaits signalé sa journée (Boil.). N'attendez pas, messieurs, que j'ouvre ici une scène tragique, que je représente ce grand homme étendu sur ses propres trophées, que je découvre ce corps pále et sanglant, et que j'expose à vos yeux les tristes images de la religion et de la patrie éplorées (Fléch.). En revanche, il faut éviter les qui et les que en cascade, c'est-à-dire subordonnés les uns aux autres. Les phrases suivantes ne sont donc pas à imiter : Le Corrège était si rempli de ce qu'il entendait dire de Raphaël, qu’ii s'était imaginé qu'il fallait que l'artiste qui faisait une si grande fortune. dans le monde fût d'un mérite supérieur. |