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rien Crétois) qui a fourni cette idée à Le Clerc, qui l'a très mal rendue. L'arrivée imprévue de Clytemnestre et de sa fille devoit produire un coup de Théatre des plus frappans. Cependant, la scene seconde du troisieme acte où il a placé cette entrevue est des plus ridicules.... La Piece n'a aucun intérêt, les caracteres en sont tous manqués, et la versification en est du dernier détestable. >>>

Il parut, dans le tems, une Critique de l'Iphigénie de Racine, dont l'Auteur anonyme loue beaucoup l' Iphigénie de Le Clerc et Coras, à laquelle, comme de raison, il donne une préférence distinguée, en l'attribuant à Coras seul, dont, apparemment, il étoit l'ami. Cette judicieuse production est aujourd'hui aussi peu connue que l' Iphigénie de Le Clerc et Coras, de laquelle on n'auroit sûrement pas conservé le souvenir depuis sa chûte, sans cette épigramme de

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Sur le propos de leur Iphigénie.
Coras lui dit: La Piece est de mon cru. >>>
Le Clerc répond : « Elle est mienne et non vôtre; >>>
Mais aussi-tôt que l'Ouvrage a paru
Plus n'ont voulu l'avoir fait l'un, ni l'autre.

On sait qu'on n'exige pas une exactitude bien scrupuleuse dans une épigramme, dont le mérite consiste seulement à égayer le Lecteur aux dépens de ceux contre lesquels elle est faite, et celle-ci a certainement ce mérite, même lorsque sa pointe porte à faux, et qu'elle manque de justesse et de vérité; car Le Clerc, loin de désavouer l' Iphigénie à laquelle il avoit travaillé en société avec son ami Coras, il se l'attribuoit entiérement, à l'exception d'une centaine de vers, qu'il accusoit devoir à Coras, ainsi qu'on le voit dans la Préface que nous avons citée, Nous ignorons dans quelles scenes cette centaine de vers furent répandus; mais on en trouve dans quelques-unes qui ne sont pas du dernier détestable, comme les freres Parfaict les ont qualifiés tous en général. Par exemple, ceux-ci de la troisieme scene du quatrieme acte, où Clytemnestre dit à Aga

C

memnon, qu'elle ne peut fléchir sur le sacrifice de sa fille:

Barbate! tu crois donc que sa mere y consente; >>>Qu'elle livre au supplice une fille innocente? >>> Celle de qui les jours me sont si précieux >> Se verroit par son pere immolée à mes yeux! >>> Je serois de sa mort la premiere complice! >>>Moi-même, je l'aurois conduite au sacrifice ! >>> Non, non, de ses beaux jours mes jours sont le sou

tien:

>> Il faut percer mon cœur pour aller jusqu'au sien!
Je défendrai sans toi les droits de la nature

>> Contre la tyrannie et contre l'imposture;
>>> Car la Divinité que fait parler Calchas
N'a jamais approuvé de tels assassinats:
>> On ne lui vit jamais autoriser des crimes.
>>> Qu'Ulisse et Ménélas cherchent d'autres victimes:
>>> C'est l'intérêt d'Hélene; elle irrita les Dieux;
>>> Sa fille par son sang les apaisera mieux... &c. »

Feu M. Le Bailli du Rollet, dont la mort, toute récente, excite encore les regrets de notre scene lyrique, où son goût et ses talens se sont avantageusement fait connoître dans un genre de Poésie trop long-tems négligé chez nous, depuis Quinault, s'étant occupé, en 1772, à mettre en - Opera l'Iphigénie de Racine, fit parvenir son Poëme au célebre M. le Chevalier Gluck, alors à Vienne, en Autriche. Cet illustre Compositeur, dont le nom retentissoit, depuis long-tems et avec les plus grands éloges, dans toute l'Italie, avoit l'opinion que la Langue Françoise étoit aussi propre à s'unir à la musique que la Langue Italienne, quoiqu'on ait dit et soutenu jusques-là le contraire. Il saisit l'occasion de le prouver, en mettant en musique le Poëme d'Iphigénie en Aulide. Cet Ouvrage fut proposé à l'administration de notre Opera, comme nous le voyons par la lettre d'un anonyme, insérée dans le Mercure, second volume d'Octobre 1772, et par une de M. le Chevalier Gluck, dans celui de Février suivant. Ces deux lettres font connoître le systême de musique dramatique que cet homme de génie s'est créé, duquel les résultats lui avoient déja valu alors dans plus de quarante Opera Italiens de sa composition, les suffrages de l'Italie et de l'Allemagne entieres, dont ils font encore les délices; et elles détaillent particulièrement la maniere qu'il a employée pour l'Iphigénie en Aulide. On accepta cet Opera, et M. le Chevalier Gluck vint le faire exécuter lui-même. La premiere représentation en fut donnée le 19 Avril 1774, avec le succès le plus complet, qui ne s'est point ralenti jusqu'à ce jour; car cet Opera est un de ceux que l'on joue le plus souvent, qui attire le plus grand nombre de Spectateurs et qui excite le plus d'applaudissemens.

<< Jamais le Public n'a montré tant d'empressement et d'enthousiasme que pour cet Opera qui doit faire époque dans la Musique Françoise, dit l'Auteur du Mercure de Mai 1774, en rendant compte de la premiere représentation d' Iphigénie en Aulide. Le Roi et la Reine, encore Dauphin et Dauphine, MONSIEUR et MADAME, encore Comte et Comtesse de Provence, assisterent à cette premiere représentation consacrerent par leurs applaudissemens, réunis ceux d'une brillante assemblée, le mérite de cet Ouvrage et les grands talens des principaux Acteurs qui l'exécuterent.... Le Poëte a suivi le plan de Racine. Il en a beaucoup abrégé l'action et

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et

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