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L'ami qui me restait devient mon assassin!

Il s'arme de serpens, il les jette en mon sein !
Ciel! où fuirai-je? arrête, ombre chère et terrible.....
Vois mes remords, mes pleurs, mon désespoir horrible.
Ah! je succombe.... (Il tombe dans les bras de Pylade).
LATOUCHE.

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Jadis un père de famille

Eut un fils beau comme le jour;

Il eut au contraire une fille

Sans nuls attraits, vrai remède d'amour. Ces enfans badinaient comme font d'ordinaire Ceux de leur âge; et, trouvant un miroir A la toilette de leur mère,

Le Narcisse nouveau prit plaisir à s'y voir.
Devenu tout à coup amoureux de lui-même,
Il vanta ses attraits, vanité dont sa sœur
Ressentit un dépit extrême,

Croyant à chaque mot qu'il taxait sa laideur.
Elle n'entendait pas là-dessus raillerie;

Quoique fort jeune encor, l'amour-propre et l'envie
S'en étaient emparés. Elle va promptement

Trouver son père à son appartement :
« Mon petit frère à la manie

De se mirer, dit-elle, il se croit un soleil,

Et son orgueil est sans pareil,
Défendez-lui, mon père, je vous prie. »
Le père, loin de le gronder,

Les embrasse tous deux, tour à tour les caresse,
Et leur partageant sa tendresse,

« Mes chers enfans, dit-il, je yeux

Que vous vous miriez tous les deux :
Vous, mon fils, afin que l'image

De la beauté dont Dieu prit soin de vous parer
Vous donne horreur du vice et du libertinage
Qui pourrait la déshonorer;

Et vous, ma fille, afin qu'en cette glace
Apercevant votre disgrace

Et que vous n'avez pas ces attraits enchanteurs
Dont brille souvent la jeunesse,

Vous répariez ces défauts par vos mœurs :
Rien n'est si beau que la sagesse. »

RICHER.

LA VILLE ET LES CHAMPS.

Au milieu du tumulte et du bruit des cités,
Mes esprits loin de moi dans le vague emportés,
Dociles aux désirs d'une foule insensée,
A l'intérêt de plaire immolaient ma pensée.
Dans ces soupers où l'art le plus voluptueux
Aiguillonne nos sens et nos goûts dédaigneux,
Où d'une main, pour nous, toujours enchanteresse,
Hébé verse en riant le nectar et l'ivresse,
Quel mortel, insensible aux charmes du poison,
D'un philtre si flatteur peut sauver sa raison?
Des boudoirs de Paris les intrigues secrètes,
L'anecdote du jour, l'histoire des toilettes,

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Je parcours plus heureux ces routes isolées.
Si je suis ces détours que forment ces vallées,
J'aime à voir le zéphir agiter dans les eaux
Les replis verdoyans des joncs et des roseaux;
Et ces saules vieillis, de leur mourante écorce
Pousser encor des jets pleins de séve et de force.
Ici tout m'intéresse et plaît à mes regards;
Sur les bords du ruisseau, cent papillons épars,
Avant que mes esprits démêlent l'imposture,
Me paraissent des fleurs que soutient la verdure;
Déjà ma main séduite est prête à les cueillir;
Mais, alarmé du bruit, plus prompt que le zéphir,
L'insecte, tout à coup, détaché de la tige,
S'enfuit... et c'est encore une fleur qui voltige.
Les arbres, le rivage et la voûte des cieux,
Dans le cristal des eaux se peignent à mes yeux;
Chaque objet s'y répète, et l'onde qui vacille
Balance dans son sein cette image mobile.

COLARDEAU.

LA JEUNESSE DU JOUR.

Moi, je me garde bien de dire un mot, j'admire!
Je sens que pour s'instruire il n'était pas besoin
De tant se fatiguer, de prendre tant de soin.
Oh! non, je reconnais que ces longues études
N'étaient que sot ennui, que tristes habitudes;
Je vois qu'à moins de frais il est de beaux esprits,
Et même des savans qui, n'ayant rien appris,
N'ignorent nulle chose, et, des heures entières,
Vont parler, discuter sur toutes les matières,
Sur des points de science, en affaire de goût,
Dans le monde, au spectacle, en famille, et partout;
S'érigent en censeurs, en arbitres suprêmes,

Et toujours en un mot sont très-contens d'eux-mêmes.
On est tout confondu d'un ton si décidé.

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Mais ils ne savent rien, n'apprendront jamais rien;
Parlent avec mépris de tout ce qu'ils ignorent,
Et de leur nullité publiquement s'honorent.
Êtres inconséquens, neufs et blasés, flétris,

Tels que des fruits sans goût, avant le temps mûris,

A quinze ans les voilà déjà de petits hommes

Plus forts, même plus vieux que tous tant que nous sommes.

COLIN D'HARleville.

LES EMPIRES DÉTRUITS.

Il faut ici du temps interroger l'oracle,
Et du monde changeant étaler le spectacle.
Entendez-vous le bruit de ces puissans états
S'écroulant l'un sur l'autre avec un long fracas?
C'est Sidon qui périt, c'est Ninive qui tombe!
Tous les dieux de Bélus descendent dans la tombe.
Nil! quels sont ces débris sur tes bords dévastés?
C'est Thèbe aux cent palais, l'aïeule des cités.
Cherchons dans les déserts les lieux où fut Palmyre.
Restes majestueux qu'avec effroi j'admire,
O temple du Soleil, ô palais éclatans,

Voilà de vos grandeurs ce qu'ont laisséles ans !
Quelques marbres rompus, des colonnes brisées,
Des descendans d'Omar aujourd'hui méprisées;
Et les pompeux débris de ces vieux chapiteaux,
Où vient la caravane attacher ses chameaux;
Où, lorsqu'un ciel d'airain s'allume sur sa tête,
L'Arabe voyageur nonchalamment s'arrête,
Et las des feux du jour, s'endort quelques instans
Sur les restes d'un dieu mutilé par le temps.
N'est-ce pas sur ces bords que brilla le Pyrée ?
Dieux! quels cris dut jeter Athènes éplorée,
Quand sa gloire en un jour s'abîma sous les eaux!
Maintenant, adossant sa hutte de roseaux
Aux portiques brisés du temple de Minerve,
L'indifférent pêcheur, sur ces flots qu'il observe,
Dans le calme des nuits jette ses longs filets,
Et rien ne lui redit si jamais Périclès
D'édifices pompeux a couronné ces rives,
Si les arts ont brillé sur ces plages oisives,
Et si près de ces bords Thémistocle et Xercès
Ont disputé d'orgueil, d'empire et de succès.

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