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JOAD.

Sors donc de devant moi, monstre d'impiété.
De toutes tes horreurs, va, comble la mesure.
Dieu s'apprête à te joindre à la race parjure,
Abiron, & Dathan, Doeg, Achitophel.
Les chiens, à qui son bras à livré Jézabel,
Attendant que sur toi fa fureur se déploie,
Déja sont à ta porte, & demandent leur proie.

MATHAN troublé.

Avant la fin du jour.... on verra qui de nous....
Doit... Mais fortons, Nabal.

NABAL.

Où vous égarez-vous?

De vos fens étonnés quel désordre s'empare ?
Voilà votre chemin,

SCENE VI.

JOAD, JOSABET.

:

JOSABET.

L'ORAC

ORAGE se déclare.

Athalie en fureur demande Eliacin.

Déja de sa naissance & de votre dessein

On commence, Seigneur, à percer le mystère.

Peu s'en faut que Mathan ne m'ait nommé son pèré.

:

JOAD.

Au perfide Mathan qui l'auroit révélé !
Votre trouble à Mathan n'a-t-il point trop parlé ?

JOSABET.

J'ai fait ce que j'ai pu, pour m'en rendre maîtreffe.
Cependant croyez-moi, Seigneur, le péril presse.
Réservons cet enfant pour un temps plus heureux.
Tandis que les méchans délibèrent entr'eux,
Avant qu'on l'environne, avant qu'on nous l'arrache,
Une seconde fois souffrez que je le cache.
Les portes, les chemins lui font encore ouverts.
Faut-il le transporter aux plus affreux déserts ?
Je suis prête. Je fais une secrette issue;
Par où, fans qu'on le voie, & fans être apperçue,
De Cédron avec lui traversant le torrent,
J'irai dans le désert, où jadis en pleurant,
Et cherchant comme nous fon falut dans la fuite,
David d'un fils rébelle évita la poursuite.
Je craindrai moins pour lui les lions & les ours....
Mais pourquoi de Jéhu refuser le secours?
Je vous ouvre peut-être un avis falutaire.
Faifons de ce tréfor Jéhu dépositaire.
On peut dans ses États le conduire aujourd'hui,
Et le chemin est court qui mène jusqu'à lui.
Jéhu n'a point un cœur farouche, inexorable;
De David à fes yeux le nom est favorable.
Hélas, est-il un Roi fi dur & fi cruel,

A moins qu'il n'eût pour mère une autre Jézabel,

Qui

Qui d'un tel suppliant ne plaignit l'infortune!
Sa cause à tous les Rois n'est-elle pas commune

JOAD.

Quels timides conseils m'osez-vous suggérer ?
En l'appui de Jéhu pourriez-vous espérer ?

JOSABET.

Dieu défend-t-il tout soin & toute prévoyance?
Ne l'offenfe-t-on point par trop de confiance?
A fes desseins facrés employant les humains,
N'a-t-il pas de Jéhu lui-même armé les mains ?

JOAD.

4

Jéhu, qu'avoit choisi sa sagesse profonde,
Jéhu, fur qui je vois que votre espoir se fonde,
D'un oubli trop ingrat a payé ses bienfaits.
Jéhu laisse d'Achab l'affreuse fille en paix ;
Suit des Rois d'Israël les profanes exemples;
Du vil Dieu de l'Egypte a conservé les Temples.
Jéhu, sur les hauts lieux enfin osant offrir
Un téméraire encens que Dieu ne peut fouffrir,
N'a, pour fervir fa cause & venger ses injures,
Ni le cœur affez droit, ni les mains assez pures;
Non, non, c'est à Dieu seul qu'il faut nous attacher.
Montrons Eliacin; &, loin de le cacher,
Que du bandeau royal sa tête soit ornée.
Je veux même avancer l'heure déterminée,
Avant que de Mathan le complot soit formé.

Tome III.

G

SCENE VII.

JOAD, JOSABET, AZARIAS, suivi du Chœur & de plusieurs Lévites.

JOAD.

HÉ bien, Azarias, le Temple est-il fermé ?

AZARIAS.

J'en ai fait devant moi fermer toutes les portes.

JOAD.

N'y reste-t-il que vous & vos faintes cohortes ?

AZARIAS.

De ses parvis sacrés j'ai deux fois fait le tour.
Tout a fui. Tous se sont séparés sans retour,
Miférable troupeau qu'a dispersé la crainte ;
Et Dieu n'est plus servi que dans la Tribu fainte.
Depuis qu'à Pharaon ce peuple est échappé,
Une égale terreur ne l'avoit point frappé.

JOAD.

Peuple lâche en effet, & né pour l'esclavage,
Hardi contre Dieu feul! Poursuivons notre ouvrage.
Mais qui retient encor ces enfans parmi nous ?

UNE DES FILLES DU CHEUR.

Hé, pourrions-nous, Seigneur, nous séparer de vous? Dans le Temple de Dieu sommes-nous étrangères ? Vous avez près de vous nos pères & nos frères.

UNE AUTRE.

Hélas! fi pour venger l'opprobre d'Israël,

Nos mains ne peuvent pas, comme autrefois Jahel*, Des ennemis de Dieu percer la tête impie,

Nous lui pouvons du moins immoler notre vie.

Quand vos bras combattront pour son Temple attaqué, Par nos larmes du moins il peut être invoqué.

\

JOAD.

Voilà donc quels vengeurs s'arment pour ta querelle,
Des Prêtres, des enfans, ô sagesse éternelle !
Mais fi tu les soutiens, qui peut les ébranler?

Du tombeau, quand tu veux, tu fais nous rappeller.
Tu frappes & guéris, tu perds & ressuscites.
Ils ne s'assurent point en leurs propres mérites.
Mais en ton nom fur eux invoqué tant de fois
En tes sermens jurés au plus faint de leurs Rois,
En ce Temple où tu fais ta demeure facrée,
Et qui doit du Soleil égaler la durée.

Mais d'où vient que mon cœur frémit d'un saint effroi ?
Eft-ce l'Esprit divin qui s'empare de moi ?

C'est lui même. Il m'échauffe. Il parle. Mes yeux s'ouvrent,
Et les fiécles obscurs devant moi se découvrent.
Lévites, de vos sons prêtez-moi les accords,
Et de ces mouvemens secondez les transports,

* Juges, chap. 4.

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