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dant, et par conséquent sujet à être troublé par mille accidents, qui font les afflictions inévitables.

XVII.

L'extrême esprit est accusé de folie comme l'extrême défaut. Rien ne passe pour bon que la médiocrité. C'est la pluralité qui a établi cela, et qui mord quiconque s'en échappe par quelque bout que ce soit. Je ne m'y obstinerai pas; je consens qu'on m'y mette; et si je refuse d'être au bas bout, ce n'est pas parce qu'il est bas, mais parce qu'il est bout; car je refuserais de même qu'on me mît au haut. C'est sortir de l'humanité que de sortir du milieu : la grandeur de l'âme humaine consiste à savoir s'y tenir; et tant s'en faut que sa grandeur soit d'en sortir, qu'elle est à n'en point sortir.

XVIII.

On ne passe point dans le monde pour se connaître en vers, si l'on n'a mis l'enseigne de poëte, ni pour être habile en mathématiques, si l'on n'a mis celle de mathématicien. Mais les vrais honnêtes gens ne veulent point d'enseigne, et ne mettent guère de différence entre le métier de poëte et celui de brodeur. Ils ne sont point appelés ni poëtes, ni géomètres; mais ils jugent de tous ceux-là. On ne les devine point. Ils parleront des choses dont l'on parlait quand ils sont entrés. On ne s'aperçoit point en eux d'une qualité plutôt que d'une autre, hors de la nécessité de la mettre en usage; mais alors on s'en souvient car il est également de ce caractère qu'on ne dise point d'eux qu'ils parlent bien, lorsqu'il n'est pas question du langage; et qu'on dise d'eux qu'ils parlent bien, quand il en est question. C'est donc une fausse louange quand on dit d'un homme, lorsqu'il entre, qu'il est fort habile en poésie; et c'est une mauvaise marque, quand on n'a recours à lui que lorsqu'il s'agit de juger de quelques vers. L'homme est plein de besoins : il n'aime que ceux qui peuvent les remplir. C'est un bon mathématicien, dira-t-on; mais je n'ai que faire de mathématiques. C'est un homme qui entend bien la guerre; mais je ne veux la faire à personne. Il faut donc un honnête homme qui puisse s'accommoder à tous nos besoins.

XIX.

pas comment on pourrait faire si on était malade; et quand on l'est, on prend médecine gaiement : le mal y résout. On n'a plus les passions et les désirs des divertissements et des promenades, que la santé donnait, et qui sont incompatibles avec les nécessités de la maladie. La nature donne alors des passions et des désirs conformes à l'état présent. Ce ne sont que les craintes que nous nous donnons nous-mêmes, et non pas la nature, qui nous troublent; parce qu'elles joignent à l'état où nous sommes les passions de l'état où nous ne sommes pas.

XX.

Les discours d'humilité sont matière d'or

gueil aux gens glorieux, et d'humilité aux humbles. Ainsi ceux du pyrrhonisme et du doute sont matière d'affirmation aux affirmatifs. Peu de gens parlent de l'humilité humblement; peu de la chasteté chastement; peu du doute en doutant. Nous ne sommes que mensonge, duplicité, contrariétés. Nous nous cachons et nous nous déguisons à nous-mêmes.

XXI.

Les belles actions cachées sont les plus estimables. Quand j'en vois quelques-unes dans l'histoire, elles me plaisent fort. Mais enfin elles n'ont pas été tout à fait cachées, puisqu'elles ont été sues; et ce peu par où elles ont paru en diminue le mérite, car c'est là le plus beau d'avoir voulu les cacher.

XXII.

Diseur de bons mots, mauvais caractère.

XXIII.

Le moi est haïssable: ainsi ceux qui ne l'ôtent pas, et qui se contentent seulement de le couvrir, sont toujours haïssables. Point du tout, direz-vous; car en agissant, comme nous fai sons, obligeamment pour tout le monde, on n'a pas sujet de nous haïr. Cela est vrai, si on ne haïssait dans le moi que le déplaisir qui nous en revient. Mais si je le hais parce qu'il est injuste, et qu'il se fait centre de tout, je le haïrai toujours. En un mot, le moi a deux qualités : il est injuste en soi, en ce qu'il se fait centre de tout; il est incommode aux autres, en ce qu'il veut les asservir car chaque moi est l'ennemi

Quand on se porte bien, on ne comprend et voudrait être le tyran de tous les autres.

Vous en ôtez l'incommodité, mais non pas l'injustice; et ainsi vous ne le rendez pas aimable à ceux qui en haïssent l'injustice : vous ne le rendez aimable qu'aux injustes, qui n'y trouvent plus leur ennemi; et ainsi vous demeurez injuste, et ne pouvez plaire qu'aux injustes.

XXIV.

XXVIII.

Les philosophes se croient bien fins, d'avoir renfermé toute leur morale sous certaines divisions. Mais pourquoi la diviser en quatre plutôt qu'en six? Pourquoi faire plutôt quatre espèces de vertus que dix? Pourquoi la renfermer en abstine et sustine plutôt qu'en autre chose? Mais voilà, direz-vous, tout renfermé en un seul mot. Qui; mais cela est inutile, si on ne l'explique; et dès qu'on vient à l'expliquer, et qu'on ouvre ce précepte qui contient tous les autres, ils en sortent en la première confusion que vous vouliez éviter: et ainsi, quand ils sont tous renfermés en un, ils y sont cachés et inutiles; et lorsqu'on veut les développer, ils reparaissent dans leur confusion naturelle. La nature les a tous établis chacun en soi-même; et quoiqu'on puisse les enfermer l'un dans

Je n'admire point un homme qui possède une vertu dans toute sa perfection, s'il ne possède en même temps, dans un pareil degré, la vertu opposée, tel qu'était Épaminondas, qui avait l'extrême valeur jointe à l'extrême bénignité; car autrement ce n'est pas monter, c'est tomber. On ne montre pas sa grandeur pour être en une extrémité, mais bien en touchant les deux à la fois, et remplissant tout l'entre-deux. Mais peut-être que ce n'est qu'un soudain mouvement de l'âme de l'un à l'autre de ces extrê-l'autre, ils subsistent indépendamment l'un de mes, et qu'elle n'est jamais en effet qu'en un point, comme le tison de feu que l'on tourne. Mais au moins cela marque l'agilité de l'âme, si cela n'en marque l'étendue.

XXV.

Si notre condition était véritablement heureuse, il ne faudrait pas nous divertir d'y penser.

Peu de chose nous console, parce que peu de chose nous afflige.

XXVI.

J'avais passé beaucoup de temps dans l'étude des sciences abstraites; mais le peu de gens avec qui on peut en communiquer m'en avait dégoûté. Quand j'ai commencé l'étude de l'homme, j'ai vu que ces sciences abstraites ne lui sont pas propres, et que je m'égarais plus de ma condition en y pénétrant, que les autres en les ignorant; et je leur ai pardonné de ne point s'y appliquer. Mais j'ai cru trouver au moins bien des compagnons dans l'étude de l'homme, puisque c'est celle qui lui est propre. J'ai été trompé. Il y en a encore moins qui l'étudient que la géométrie.

XXVII.

Quand tout se remue également, rien ne se remue en apparence, comme en un vaisseau. Quand tous vont vers le dérèglement, nul ne semble y aller. Qui s'arrête fait remarquer l'emportement des autres comme un point fixe.

l'autre. Ainsi toutes ces divisions et ces mots n'ont guère d'autre utilité que d'aider la mémoire, et de servir d'adresse pour trouver ce qu'ils renferment.

XXIX.

Quand on veut reprendre avec utilité, et montrer à un autre qu'il se trompe, il faut observer par quel côté il envisage la chose (car elle est vraie ordinairement de ce côté-là), et lui avouer cette vérité. Il se contente de cela, parce qu'il voit qu'il ne se trompait pas, et qu'il manquait seulement à voir tous les côtés. Or on n'a pas de honte de ne pas tout voir; mais cela vient de ce que naturellement l'esprit ne on ne veut pas s'être trompé; et peut-être que peut se tromper dans le côté qu'il envisage, comme les appréhensions des sens sont toujours vraies.

XXX.

La vertu d'un homme ne doit pas se mesurer par ses efforts, mais par ce qu'il fait d'ordinaire.

XXXI.

Les grands et les petits ont mêmes accidents, mêmes fâcheries et mêmes passions; mais les uns sont au haut de la roue, et les autres près du centre, et ainsi moins agités par les mêmes mouvements.

XXXII.

Quoique les personnes n'aient point d'intérêt

à ce qu'ils disent, il ne faut pas conclure de là absolument qu'ils ne mentent point; car il y a des gens qui mentent simplement pour mentir.

XXXIII.

L'exemple de la chasteté d'Alexandre n'a pas tant fait de continents que celui de son ivrognerie a fait d'intempérants. On n'a pas de honte de n'être pas aussi vertueux que lui, et il semble excusable de n'être pas plus vicieux que lui. On croit n'être pas tout à fait dans les vices du commun des hommes, quand on se voit dans les vices de ces grands hommes; et cependant on ne prend pas garde qu'ils sont en cela du commun des hommes. On tient à

eux par le bout par où ils tiennent au peuple. Quelque élevés qu'ils soient, ils sont unis au reste des hommes par quelque endroit. Ils ne sont pas suspendus en l'air, et séparés de notre société. S'ils sont plus grands que nous, c'est qu'ils ont la tête plus élevée; mais ils ont les pieds aussi bas que les nôtres. Ils sont tous à même niveau, et s'appuient sur la même terre; et, par cette extrémité, ils sont aussi abaissés que nous, que les enfants, que les bêtes.

XXXIV.

C'est le combat qui nous plaît, et non pas la victoire. On aime à voir les combats des animaux, non le vainqueur acharné sur le vaincu. Que voulait-on voir, sinon la fin de la victoire ? Et dès qu'elle est arrivée, on en est soul. Ainsi dans le jeu ; ainsi dans la recherche de la vérité. On aime à voir dans les disputes le combat des opinions; mais de contempler la vérité trouvée, point du tout. Pour la faire remarquer avec plaisir, il faut la faire voir naissant de la dispute. De même dans les passions, il y a du plaisir à en voir deux contraires se heurter; mais quand l'une est maîtresse, ce n'est plus que brutalité. Nous ne cherchons jamais les choses, mais la recherche des choses. Ainsi, dans la comédie, les scènes contentes sans crainte ne valent rien, ni les extrêmes misères sans espérance, ni les amours brutales.

XXXV.

On n'apprend pas aux hommes à être honnêtes gens, et on leur apprend tout le reste; et cependant ils ne se piquent de rien tant que de

cela. Ainsi ils ne se piquent de savoir que la seule chose qu'ils n'apprennent point.

XXXVI.

Le sot projet que Montaigne a eu de se peindre et cela non pas en passant et contre ses maximes, comme il arrive à tout le monde de faillir, mais par ses propres maximes, et par un dessein premier et principal. Car de dire des sottises par hasard et par faiblesse, c'est un mal ordinaire; mais d'en dire à dessein, c'est ce qui n'est pas supportable, et d'en dire de telles que celles-là.

XXXVII.

Plaindre les malheureux n'est pas contre la concupiscence; au contraire, on est bien aise de pouvoir se rendre ce témoignage d'humanité, et de s'attirer la réputation de tendresse sans qu'il en coûte rien ainsi ce n'est pas grand'chose.

XXXVIII.

Qui aurait eu l'amitié du roi d'Angleterre, du roi de Pologne, et de la reine de Suède, aurait-il cru pouvoir manquer de retraite et d'asile au monde ?

XXXIX.

Les choses ont diverses qualités, et l'âme diverses inclinations; car rien n'est simple de ce qui s'offre à l'âme, et l'âme ne s'offre jamais simple à aucun sujet. De là vient qu'on pleure et qu'on rit quelquefois d'une même chose.

XL.

Il y a diverses classes de forts, de beaux, de bons esprits et de pieux, dont chacun doit régner chez soi, non ailleurs. Ils se rencontrent quelquefois; et le fort et le beau se battent sottement à qui sera le maître l'un de l'autre ; car leur maîtrise est de divers genres. Ils ne s'entendent pas, et leur faute est de vouloir régner partout. Rien ne le peut, non pas même la force: elle ne fait rien au royaume des sa

Pascal veut parler ici de trois révolutions arrivées de son temps: la cruelle catastrophe de Charles Ier, roi d'Angleterre, en 1649; la retraite de Jean Casimir, roi de Pologne, dans la Silésie, en 1655; et l'abdication de Christine, reine de Suède, en 1654. Il ne faut pas confondre cette première retraite de Casimir avec la seconde, qui n'arriva qu'après son abdication, en 1668 alors Pascal était mort.

vants; elle n'est maîtresse que des actions exté- | relles, parce qu'on change, et qu'on devient rieures.

XLI.

Ferox gens nullam esse vitam sine armis putat. Ils aiment mieux la mort que la paix : les autres aiment mieux la mort que la guerre. Toute opinion peut être préférée à la vie, dont l'amour paraît si fort et si naturel.

XLII.

Qu'il est difficile de proposer une chose au jugement d'un autre, sans corrompre son jugement par la manière de la lui proposer? Si on dit: Je le trouve beau, je le trouve obscur, on entraîne l'imagination à ce jugement, ou on l'irrite au contraire. Il vaut mieux ne rien dire; car alors il juge selon ce qu'il est, c'est-à-dire selon ce qu'il est alors, et selon que les autres circonstances dont on n'est pas auteur l'auront disposé; si ce n'est que ce silence ne fasse aussi son effet, selon le tour et l'interprétation qu'il sera en humeur d'y donner, ou selon qu'il conjecturera de l'air du visage ou du ton de la voix : tant il est aisé de démonter un jugement de son assiette naturelle, ou plutôt tant il y en a peu de fermes et de stables!

XLIII.

Montaigne a raison : la coutume doit être suivie dès-là qu'elle est coutume, et qu'on la trouve établie, sans examiner si elle est raisonnable ou non; cela s'entend toujours de ce qui n'est point contraire au droit naturel ou divin. Il est vrai que le peuple ne la suit que par cette seule raison qu'il la croit juste, sans quoi il ne la suivrait plus; parce qu'on ne veut être assujetti qu'à la raison ou à la justice. La coutume, sans cela, passerait pour tyrannie; au lieu que l'empire de la raison et de la justice n'est non plus tyrannie que celui de la délectation.

XLIV.

La science des choses extérieures ne nous consolera pas de l'ignorance de la morale au temps de l'affliction; mais la science des mœurs nous consolera toujours de l'ignorance des choses extérieures.

XLV.

comme une autre personne. Ni l'offensant, ni l'offensé, ne sont plus les mêmes. C'est comme un peuple qu'on a irrité, et qu'on reverrait après deux générations. Ce sont encore les Francais, mais non les mêmes.

XLVI.

Condition de l'homme : inconstance, ennui, inquiétude. Qui voudra connaître à plein la vanité de l'homme n'a qu'à considérer les causes et les effets de l'amour. La cause en est un je ne sais quoi (CORNEILLE); et les effets en sont effroyables. Ce je ne sais quoi, si peu de chose qu'on ne saurait le reconnaître, remue toute la terre, les princes, les armées, le monde entier. la face de la terre aurait changé. Si le nez de Cléopâtre eût été plus court, toute

XLVII.

César était trop vieux, ce me semble, pour aller s'amuser à conquérir le monde. Cet amusement était bon à Alexandre : c'était un jeune homme qu'il était difficile d'arrêter; mais César devait être plus mûr.

XLVIII.

Le sentiment de la fausseté des plaisirs présents, et l'ignorance de la vanité des plaisirs absents, causent l'inconstance.

XLIX.

Les princes et les rois se jouent quelquefois. Ils ne sont pas toujours sur leurs trônes; ils s'y ennuieraient. La grandeur a besoin d'être quittée pour être sentie.

L.

Mon humeur ne dépend guère du temps. J'ai mon brouillard et mon beau temps au dedans de moi; le bien et le mal de mes affaires mêmes y font peu. Je m'efforce quelquefois de moimême contre la mauvaise fortune; et la gloire de la dompter me la fait dompter gaiement, au lieu que d'autres fois je fais l'indifférent et le dégoûté dans la bonne fortune.

LI.

En écrivant ma pensée, elle m'échappe quelquefois; mais cela me fait souvenir de ma fai

Le temps amortit les afflictions et les que- blesse, que j'oublie à toute heure; ce qui m'in

struit autant que ma pensée oubliée, car je ne tends qu'à connaître mon néant.

LII.

C'est une plaisante chose à considérer, de ce qu'il y a des gens dans le monde qui, ayant renoncé à toutes les lois de Dieu et de la nature, s'en sont fait eux-mêmes auxquelles ils obéissent exactement; comme, par exemple, les voleurs, etc.

LIII.

Ce chien est à moi, disaient ces pauvres enfants; c'est là ma place au soleil : voilà le commencement et l'image de l'usurpation de toute la terre.

LIV.

Vous avez mauvaise grâce; excusez-moi, s'il vous plaît. Sans cette excuse, je n'eusse pas aperçu qu'il y eût d'injure. Révérence parler, il n'y a de mauvais que l'excuse.

LV.

On ne s'imagine d'ordinaire Platon et Aristote qu'avec de grandes robes, et comme des personnages toujours graves et sérieux. C'étaient d'honnêtes gens qui riaient comme les autres avec leurs amis; et quand ils ont fait leurs lois et leurs traités de politique, c'a été en se jouant et pour se divertir. C'était la partie la moins philosophe et la moins sérieuse de leur vie. La plus philosophe était de vivre simplement et tranquillement.

LVI.

L'homme aime la malignité: mais ce n'est pas contre les malheureux, mais contre les heureux superbes ; et c'est se tromper que d'en juger

autrement.

L'épigramme de Martial sur les borgnes ne vaut rien, parce qu'elle ne les console pas, et ne fait que donner une pointe à la gloire de l'auteur. Tout ce qui n'est que pour l'auteur ne vaut rien. Ambitiosa recidet ornamenta'. Il faut plaire à ceux qui ont les sentiments humains et tendres, et non aux âmes barbares et inhumaines.

LVII.

Je vous ai donné bien de la peine; je crains de vous ennuyer; je crains que cela ne soit trop long: ou l'on m'entraîne, ou l'on m'irrite.

LVIII.

Un vrai ami est une chose si avantageuse, même pour les grands seigneurs, afin qu'il dise du bien d'eux, et qu'il les soutienne en leur absence même, qu'ils doivent tout faire pour en avoir un. Mais qu'ils choisissent bien; car s'ils font tous leurs efforts pour un sot, cela leur sera inutile, quelque bien qu'il dise d'eux et même il n'en dira pas du bien, s'il se trouve le plus faible; car il n'a pas d'autorité, et ainsi il en médira par compagnie.

LIX.

Voulez-vous qu'on dise du bien de vous ? n'en dites point.

LX.

Qu'on ne se moque pas de ceux qui se font honorer par des charges et des offices; car on n'aime personne que pour des qualités empruntées. Tous les hommes se haïssent naturellement. Je mets en fait que, s'ils savaient exactement ce qu'ils disent les uns des autres, il n'y aurait pas quatre amis dans le monde. Cela paraît par les querelles que causent les rapports indiscrets qu'on en fait quelquefois.

LXI.

La mort est plus aisée à supporter sans y penser, que la pensée de la mort sans péril.

LXII.

Qu'une chose aussi visible qu'est la vanité du monde soit si peu connue, que ce soit une chose étrange et surprenante de dire que c'est une sottise de chercher les grandeurs, cela est admirable.

Qui ne voit pas la vanité du monde est bien vain lui-même. Aussi qui ne la voit, excepté de jeunes gens qui sont tous dans le bruit, dans le divertissement, et sans la pensée de l'avenir? Mais ôtez-leur leurs divertissements, vous les voyez sécher d'ennui; ils sentent alors leur néant sans le connaître; car c'est être bien malheureux que d'être dans une tristesse insup

Je me suis mal trouvé de ces compliments: portable aussitôt qu'on est réduit à se considé

'Horat.,

Ars poet.

rer, et à n'en être pas diverti.

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