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fonne n'a jamais mieux aimé ; COLIN l'emportant fur ABELARD même.

Il y a bien des perfonnes qui ne regarderont pas cette raifon comme valable. Mais qu'ils y prennent bien garde, ils verront que cet Amour fin, délicat, qui rend des Amans heureux par cela même qu'ils s'aiment, eft un bien qui n'appartient qu'aux belles ames & qui eft infiniment au deflus des bêtes. Les Bêtes peuvent fentir de la fureur. Un MAZET de Lamporechio, un Muletier au jeu d'amour pourront faire rage, felon l'expreffion de LA FONTAINE, mais il n'apartiendra qu'aux LAURES & aux PETRARQUES, qu'aux HELoïses & qu'aux ABELARDS, qu'aux Ducheffes de CLEVES & qu'aux Ducs de NEMOURS, qu'aux CATOS & qu'aux COLINS de fentir cette douceur, ce charme, cette tendreffe extrême qu'HORACE ne pouvoit exprimer qu'en difant

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Tu me tota ruens Venus

Cyprum deferuit. Ode XIX. lib. I.

Une autre preuve que COLIN & CATos étoient pleins d'efprit, c'est que dans leurs amours mêmes, ils faifoient

regner

regner un goût Grec, qu'ils aimoient les manieres des Anciens. Cela fe voit lors que COLIN frappe à la porte de fa belle. Il frappe trois fois, & appelle fa Maîtreffe par trois noms differens, CATIN, CATOS, BELLE BERGERE. L'on peut voir ce que j'ai obfervé là-deffus pp. 67. & 85. & conclure de là que

non feulement nos deux Amans avoient naturellement beaucoup d'efprit, mais encore qu'ils avoient l'efprit très-cultivé. En effet s'ils ne l'avoient pas eu très-cultivé, ils n'auroient pas fû que les Anciens invoquoient ainfi leurs Divinités fous des noms differens: Et s'ils n'avoient pas eû beaucoup d'efprit, ils ne fe feroient pas fouciés d'en ufer de cette maniére. Mais COLIN favoit bien qu'en traitant fa Maîtreffe, comme les Anciens traitoient leurs Divinités, cette aimable perfonne fentiroit tout le délicat, tout le fin, de cette maniere d'agir.

Lors que le mérite d'une chofe qu'on admire eft extrême, que fa Beauté est réelle, plus on examine cette chose & plus on y découvre de fujets d'admiration. Ainfi plus j'examine CoLIN & CATOs, CATOS, & CoLIN, plus je fuis furpris de voir tant de perfections réunies enfemble.

CLAU

CLAUDIEN dit à la louange de STI

LICON,

Etenim mortalibus ex quo

Tellus cœpta coli, nunquam fincera bonorum
Sors ulli conceffa viro: quem vultus honestat,
Dedecorant mores: animus quem pulchrior
ornat,
Corpus deftituit.

Partitim fingula quemque

Nobilitant: bunc forma decens, hunc robur

in armis

Hunc rigor, hunc pietus

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Sparguntur in omnes
In te mifta fluunt. Et qua divifa beatos
Efficiunt, collecta tenes.

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Depuis que la Terre a commencé d'être cultivée par les hommes, perfonne n'a été comblé de tous les biens. Celui que la beauté pare, eft fouillé » par fes mœurs ; celui qui brille par ", fon Efprit, a un corps contrefait.... ,, Ce n'est qu'en partie que les hommes

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font recommandables, celui-ci l'eft ,, par fa beauté, celui-là par fa force; ", celui-ci par fa conftance, celui-là par fa pieté. Mais ce qui eft partagé en,,tre les autres, fe réunit en vous, vous raffemblez en vous feul toutes les cho,, fes

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fes dont une feule rend heureux ceux ,, qui la poffedent". J'avois autrefoi imité cette penfée de CLAUDIEN dans des vers que j'avois faits à la louange d'un des Rois du Nord & je brûlai ces vers après la punition de PATKUL & l'affaire de Pultowa. Mais fi CLAUDIEN a dit ceci avec plus de raison que je n'en avois eu à l'imiter

avec

quelle juftice ne dois-je pas aflurer que tout cela convient parfaitement à COLIN & à CATOS? puis qu'à tous les avantages que nous avons déja reconnus en eux, ils joignoient encore celui d'y réunir toutes les vertus. En effet quelle prudence n'admire-t-on pas dans leur conduite, foit que COLIN fe leve pour éviter la mort qui le menaçoit s'il restoit plus long-tems éloigné de fa belle, foit que CATIN, de peur que quelqu'un n'aperçoive fon Amant à fa porte, aille toute nue en fa chemife la lui ouvrir; foit qu'étant entré, il marche tout doux & parle tout bas, pour ne point éveiller le pere de fa Maîtreffe: foit que s'embraflant l'un & l'autre, ils ne fe laiffent point aller au fommeil, mais qu'attentifs à tout ils ayent le courage de fe féparer au point du jour. Ils étoient trop prudens, ces Amans heu

reux, pour fe confier au hazard. Ils favoient que la Fortune ne joue jamais de plus mauvais tours, que lors qu'elle paroît le plus favorable, felon le proverbe Caftillan. La fortuna quanto es mas amiga da la gancadilla. Mais quelle prudence ne font-ils pas paroître,

En profitant d'un tems où la jeuneffe
Leur presentoit en foule fes plaifirs,
Et que l'ardeur des plus charmans défirs
Fait fa félicité d'une extrême tendreffe.
Ils penfoient que du Ciel la liberalité
Ne leur avoit donné les Graces, la Beauté
Que pour en faire un bon usage,
Et CATOS étoit affez fage

D'en borner à COLIN la prodigalité.

Ils vouloient prévenir ce tems

Où l'on ne parle plus de douceurs, de tendreffe, De jeux, de plaifirs, de careffe,

Ni de goûter d'amour les plus doux paffetems; Age qu'occupent feuls les chagrins, la jeuneffe,

Où tous les défirs réfroidiffent, & où tous les foupirs se donnent

Aux disgraces de la vieilleffe.

Ce n'est pas de mon chef que je louë à cet égard la prudence de nos Amans, ce n'eft qu'après M PAVILLON, ce

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