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que chaque syllabe signifie, et l'on indique ensuite à-peu-pres ce qu'est le mot dans son entier. On pourroit, par exemple, faire une charade du mot, polissoir, dont la première syllabe est , nom d'un fleuve; la seconde, lis, nom d'une fleur; la troisième, soir, nom d'une partie du jour, et le tout, un instrument.

Dans les mots terminés par unemuet, les deux dernières syllabes sont censées n'en faire qu'une. Ainsi dans courage et verdure, se trouvent les mots cou et rage, ver et dure. Mais on ne pourroit pas faire du premier, les mots cour et age, parce que la première syllabe est cou et non pas cour. Il en est de même, par exemple, du mot butor, qui ne pourroit pas donner les mot but et or.

Au reste, ces trois genres de poésie ne sont que des jeux littéraires, qui exercent l'esprit; et l'on doit convenir que tout ce qui exerce l'esprit, ne peut pas lui être inutile. Mais l'homme de lettres un peu célèbre, et celui qui est né avec quelque talent poétique, les regardent comme des bagatelles, dont ils ne doivent que très rarement, et peut-être jamais s'occuper.

ARTICLE II.

De l'Épigramme, du Madrigal, et du

Sonnet.

L'épigramme n'est autre chose qu'une de l'Epipensée fine et saillante, présentée heu- gramme. reusement et en peu de mots. La brièveté et le sel sont les deux principaux caractères de ce genre de poésie, qui ne doit jamais avoir plus de douze ou de quinze vers, qu'on peut faire de tout pied. L'exposition du sujet, c'est-à-dire, de la chose qui a produit ou occasionné la pensée, doit se faire remarquer par cette précision de style, qui rejette tout ce qui est languissant et superflu. Le sel de l'épigramme consiste dans un trait plaisant, ingénieux et inattendu; dans une pensée qui pique, qui intéresse, qui est rendue d'une manière vive et agréable, et qu'on appelle la pointe ou le bon mot. L'épigramme suivante peut être mise au nombre des meilleures.

Un certain sot de qualité,
Lisoit à Saumaise un ouvrage,
Et répétoit à chaque page,
Ami, dis-moi la vérité.
Ennuyé de cette fadaise,
Ah! monsieur, répondit Saumaise,
J'ai de bons auteurs pour garans,
Qu'il ne faut jamais dire aux grands
De vérité qui leur déplaise.

On voit que cette épigramme tire toute

sa beauté de la finesse de la pensée, qui laisse quelque chose à deviner. Dans celle-ci, c'est un retour inattendu qui frappe et qui en fait tout le sel : elle est de la Martinière.

Un gros serpent mordit Aurèle.
Que croyez-vous qu'il arriva ?
Qu'Aurèle en mourut. Bagatelle!
Ce fut le serpent qui creva.

Le genre de l'épigramme, dans l'acception qu'on donne communémentà ce mot, est trop dangereux et apporte d'ailleurs trop peu de gloire, pour qu'on ne doive pas se l'interdire sévèrement. Il n'appartient qu'à un esprit méchant et à un cœur corrompu d'attaquer les personnes et de rimer des obscénités. Les honnêtes gens ne peuvent pas même soutenir la lecture de pareils ouvrages. Si l'on se sent un talent décidé pour ce genre de poésie, on doit s'armer.contre les ridicules, les vices généraux de la société, et faire des épigrammes morales, telles que celle-ci de J. B. Rousseau.C'est le modèle du genre qui doit plaire à tous les bons esprits, mêmeaux plus rigides.

Ce monde-ci n'est qu'un œuvre comique,
Où chacun fait des rôles différens.
Là sur la scène, en habit dramatique,
Brillent prélats, ministres, conquérans.
Pour nous, vil peuple, assis aux derniers rangs,
Troupe futile et des grands rebutée,
Par nous d'en bas la pièce est écoutée.
Mais nous payons, utiles spectateurs;

Et si la pièce est mal représentée,
Pour notre argent nous sifflons les acteurs.

En voici une autre dans le genre familier, et dont le sujet est tiré de la mythologie: elle est pleine d'esprit et de

sel.

J'ai désarmé l'amour; et de tout son bagage
J'ai pris ce qui pouvoit servir à mon ménage.
Je me sers de ses traits pour percer mon tonneau,

De son bandeau
J'ai fait une serviette.

J'ai fondu son carquois pour m'en faire une assiette;
Et lorsque pour goûter du vin vieux ou nouveau,

Je descends à la cave,
Ce superbe vainqueur, à présent mon esclave,
Porte devant moi son flambeau.

Les meilleurs épigrammatistes latins sont Catulle, né à Véronne l'an 86 avant J. C., et Martial, qui, né en Espagne vers le milieu du premier siècle de l'ère chrétienne, passa la plus grande partie de sa vie à Rome. Le premier a plus de sentiment, plus de délicatesse; le second plus de feu, plus de saillie. Mais l'un et l'autre ne doivent être lus qu'avec la plus grande précaution. Catulle n'a pas été bien traduit par Pezay; et Martial l'a été encore moins bien par l'abbé de Marolles.

Parmi nous, ce sont Marot et J. B. Rousseau. Après eux viennent Racine, qui nous a laissé quelques bonnes épigrammes, Mainard, Boileau, et Piron. Mais, encore une fois, si l'on veut s'adon

ner à ce genre de poésie, on doit se faire
une loi inviolable de ne point franchir
les bornes de la pudeur, et de n'offen-
ser, non-seulement aucune personne en
particulier, mais même aucun corps en
général. Piron n'est pas excusable d'a-
voir dit:

Cy git Piron, qui ne fut rien,
Pas même académicien:

quoique ce trait ne tombât individuel-
lement sur aucun membre de cette il-
lustre compagnie.

Du Ma- Le madrigal, peut avoir le même nomdrigal. brede vers que l'épigramme: il consiste également dans une seule pensée; et ces deux petits poèmes ne différent que par le caractère même de cette pensée. Elle est saillante dans l'épigramme, plus particulièrement réservée pour des sujets plaisans ou satiriques. Elle est délicate dans le madrigal, spécialement consacré à des sujets tendres ou galans. L'épigramme a dans sa chute quelque chose de plus vif, de plus piquant, de plus étudié. Le madrigal au contraire a quelque chose de plus doux, de plus simple, de plus gracieux. En voici un qui peut servir de modèle: c'est une réponse de Pradon à quelqu'un qui lui avoit écrit, et qui avoit mis dans sa lettre beaucoup d'esprit.

Vous n'écrivez que pour écrire !
C'est pour vous un amusement.

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