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Grus, grue. Nicticorax, chuette. Vultur, voultour. Ossifragus, freynol. Ritersculus, roytellet. Philomena, rossignol. Canapelus, chardoneret. Citradula, cerin. Ficedula, grive. Figellus, pinson. Sturnus, estourneau. Parix, mesange. Passer, moyneau. Pstacus, papegay. Turtur, turierelle. Palumbus, colombier. Pavus, paon. Quastulla, caille. Arundo, arondelle. Pica, pie ou agasse. Cornix, corneille. Vespertilio, chauvesouris. Anas, anette ou cane. Auca, oye. Monedula, corneille. Gallus, coq. Gallina, gelline. Pullus, poussin. Capo, chappon. Pullinarium, poullalier. Papilio, papillon. Vespa, mousche gueppe. Apes, mousche a myel. Cuculus, cocul. Lucinia, hoche cul. Upupa, hupe. »

3o Le Vocabularius nebrissensis (1) de 1524 est un travail beaucoup plus ample que le précédent. Il contient près de 30,000 mots latins avec leurs correspondants ou leur interprétation en français. L'influence de la Renaissance y est encore bien peu sensible. Son système orthographique, un peu plus régulier, ressemble à celui du Catholicon abbreviatum. Il n'est pas plus étymologique que son prédécesseur en ce qui concerne les mots tirés du grec, et en général il se borne à les interpréter sans les retranscrire sous la forme française. Il ne s'asservit pas non plus trop à l'orthographe latine : il écrit cicorée, cengle (cingula), saincture, estraines (étrennes). Les I qui ne se prononcent pas figurent cependant dans bien des endroits: poulpitre, avantureulx, chault (calidus).

Quant aux doubles lettres, il peint la prononciation : resembler et assembler, netoyer, alumer, acoustumer et accorder, accepter, appeller, amonceler, etc. Ce précieux Dictionnaire constate un état très-intéressant de notre langue, celui où elle va subir l'influence, qui sera trop longtemps dominante, du latin classique et même quelquefois du grec.

Robert Estienne eut le premier, en 1540, l'honneur de publier non plus un simple Vocabulaire, mais un Dictionnaire français-latin, dans les conditions d'érudition et de critique qu'exigeait un tel travail. Son œuvre, accrue et perfectionnée dans l'édition de 1549, fit autorité et exerça pendant deux siècles une grande influence sur l'orthographe. Elle contient près de 20,000 mots français suivis de leurs diverses acceptions et de leur interprétation latine.

(1) Publié à Lyon par Frère Gabriel Busa, de l'ordre des Augustins, d'après le Dictionnaire latin-espagnol de Antoine de Lebrixa.

Cette belle édition, où Robert Estienne introduisit une riche moisson de termes nouvellement imités du latin et même du grec, servira donc de point de comparaison avec la manière d'écrire qui a précédé et celle qui a suivi.

Le docte imprimeur écrit, on le comprend, conformément à l'étymologie les mots savants de nouvelle formation, mais de plus, il a réintégré des lettres dites caractéristiques dans une grande partie des mots d'une époque antérieure. Il corrige cylindre au lieu de cilindre, cymaise au lieu de cimaise, cymbale au lieu de cimbale, cyprès au lieu de ciprès, phiole au lieu de fpole; il écrit chauchemare (cauchemar), chaulx (calx), cheueul (capillus), cichorée; il redresse hermite en ermite; il réclame chifre et non chiffre, à cause de l'hébreu sephira. Il respecte cependant les formes consacrées par l'usage, soulfre, thriacle (thériaque), et il écrit sans th tesme (thema), et sans ph orfelin. Sa manière d'agglutiner les mots composés est conforme à celle que je propose : il réunit tous les mots composés avec la préposition contre (1); il écrit chaussetrape, chauuesouri, chathuant (qui serait mieux écrit chahuant), des chaufecires. On peut regretter toutefois de rencontrer partout dans ses colonnes des mots défigurés par l'addition de lettres latines déjà représentées dans le français, comme chaircuictier, poulpitre, poulser, poulsif, poulsin.

L'autorité dont jouit le Dictionnaire français de Robert Estienne se perpétua longtemps. En 1586 Guillaume de Laimarie, imprimeur de Genève, donnaune édition très-correcte du Dictionarium puerorum que Robert avait publié en dernier lieu, en 1557, postérieurement au Dictionnaire français-latin (2). Cette édition de Laimarie renchérit dans plusieurs cas sur le Dictionnaire de 1549, pour l'emploi des lettres étymologiques surérogatoires; mais on lui doit quelques bonnes leçons, comme sansue par exemple (écrit sanssue dans le ms. Le Ver).

Le Dictionnaire françois-latin connu sous le nom de Jean Nicol, qui parut pour la première fois en 1564, le Thrésor de la langue françoyse du même, dans lequel il a mis à profit les recherches

(1) La marque du superlatiť très est toujours réunie au mot qu'il modifie : tresaccoutumé, tresaise (très-aise), tresuite (très-vite). Cette série forme plus de trois cents mots dans son Dictionnaire.

(2) Laimarie remania l'ordre des mots de la partie française pour remédier à la confusion qui résultait du groupement des mots dérivés sous leur simple, et il adopta l'ordre alphabétique absolu.

laissées par le président Ranconnet; le Grand Dictionnaire françois-latin du même Nicot, dont le succès se continua d'édition en édition jusqu'en 1618, nous reproduisent également l'orthographe de Robert Estienne, dont les éditeurs déclarent reprendre en grande partie le travail. Voici comment s'exprime à ce sujet Jacques du Puys dans la préface de l'édition de 1614 : « Il ne peut « que la France ne celebre grandement la memoire, comme elle « se sent auoir été ornée par son industrie, de deffunct Robert << Estienne, lequel peut estre dict auoir esté le premier qui a faict « que la France, pour ce regard, ne cede à aucune autre nation, << tant pour les graces qu'il a eu propres pour l'ornement de cet « art d'imprimerie que pour l'amour infini qu'il a porté à l'vtilité << publique et le grand labeur et peine qu'il a pris, sans y espar« gner rien qui ne fust en sa puissance, pour l'aduancer et mener « à sa parfection: de quoy font foi tant de beaux et excellens << liures et latins et grecs et hébrieux, plus encores recherchez au<< iourd'huy que du vivant de l'imprimeur.... » La perfection du Dictionnaire français « estant de soy tant recommandable et pro« fitable qu'un chascun sçait, m'a principalement incité à r'impri<< mer le dict liure, duquel il y a quelque temps que i'ay recouuré « l'exemplaire laissé par deça par le dict Robert Estienne, auant << que de partir de France. >>>

L'édition de 1614 contient environ 26,000 mots avec toutes leurs acceptions alors connues.

Le P. Philibert MONET, de la Compagnie de Jésus, très-habile professeur de langue latine, rompit, dès 1624, avec la tradition léguée aux dictionnaristes par l'autorité jusque-là incontestée de Robert Estienne. Il fit paraître à cette époque un Parallele des deus langues latine et françoise, complétement perdu aujourd'hui, et que nous ne connaissons que par la préface de son Invantaire des deus langues françoise et latine, publiée à Lyon chez Claude Rigaud en 1635, in-folio. Ce dernier ouvrage, que j'ai eu le bonheur de me procurer récemment, est précieux pour l'histoire de la réforme orthographique modérée, car il en est le code. Il contient 23,000 mots au moins. Le système orthographique de l'auteur est simple et bien conçu: il ne s'attache pas uniquement, comme les phonographes, à figurer la prononciation, et ne fait pas disparaître toutes les lettres dites caractéristiques, mais il ne figure jamais, autant que possible, un même son par deux signes différents. Il écrit, par exemple, dysanterie, diseine, doit (digitus),

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contanter, contantement, contampler, continance, deus (duo), cheveus, barreaus, chevaus, et leurs similaires.

Nathaniel Duez, grammairien polyglotte, fit paraître en 1669 un Dictionnaire françois-italien, fort bien imprimé à Leyde chez Jean Elsevier. Son orthographe, conforme en général à celle de Robert Estienne et de ses continuateurs, renchérit même en certains cas sur ceux-ci par une nouvelle intrusion de lettres destinées à figurer de plus près l'orthographe latine et grecque. Ce glossaire contient 20,000 mots environ.

César OuDIN, secrétaire interprète du roi pour les langues étrangères, publia en 1660 à Bruxelles le Trésor des deux langues francoise et espagnolle. Ce lexique est encore un calque, au point de vue de l'orthographe, de celui qu'Estienne avait publié 120 ans plus tôt.

César-Pierre RICHELET, auteur d'un Dictionnaire françois publié à Genève en 1680, était aussi versé dans les langues anciennes que dans les langues modernes, l'italien et l'espagnol entre autres. Son dictionnaire, dont les premières éditions sont devenues rares et précieuses, est du plus haut intérêt. L'auteur s'exprime ainsi dans son avertissement: Touchant l'orthographe, on a gardé un milieu entre l'ancienne et celle qui est tout à fait moderne et qui défigure la langue. On a seulement retranché de plusieurs mots les lettres qui ne rendent pasles mots méconnoissables quand elles en sont otées, et qui, ne se prononçant pas, embarrassent les étrangers et la plupart des provinciaux.

« On a écrit avocat, batistère, batême, colère, mélancolie, plu, reçu, revue, tisanne, trésor, et non pas advocat, baptistère, baptême, cholère, mélancholie, pleu, receu, reveuë, ptisane, thrésor.

« Dans la même vuë on retranche l's qui se trouve après un e clair, et qui ne se prononce point, et on met un accent aigu sur l'e clair qui accompagnait cette s; si bien que présentement on écrit dédain, détruire, répondre, et non pas desdain, destruire, respondre.

« On retranche aussi l's qui fait la silabe longue, et qui ne se prononce pas, soit que cette s se rencontre avec un e ouvert, ou avec quelque autre lettre, et on marque cet e ou cette autre lettre d'un circonflexe qui montre que la silabe est longue. On écrit apótre, jeûne, tempête, et non pas apostre, jeusne, tempeste. Cette dernière façon d'orthographier est contestée. Néanmoins, parce qu'elle empêche qu'on ne se trompe à la prononciation et

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qu'elle est autorisée par d'habiles gens, j'ai jugé à propos de la suivre, si ce n'est à l'égard de certains mots qui sont si nuds lorsqu'on en a oté quelquelettre qu'on ne les reconnoît pas.

« A l'imitation de l'illustre monsieur d'Ablancourt, Préface de Tucidide, Apophtegmes des anciens, Marmol (1), etc., et de quelques auteurs célèbres, on change presque toujours l'y en i simple. On retranche la plu-part des lettres doubles et inutiles qui ne défigurent pas les mots lorsqu'elles en sont retranchées. On écrit afaire, ataquer, ateindre, dificulté, et non pas affaire, attaquer, difficulté. »

On voit combien cette orthographe est conforme à celle que Firmin Le Ver a consignée dans son dictionnaire rédigé deux siècles et demi auparavant. On doit moins s'étonner si l'ouvrage de Richelet, sous le rapport de l'orthographe, est si fort en avance sur le premier Dictionnaire de l'Académie de 1694. Lors de l'apparition, en 1680, de l'œuvre de Richelet, la copie des premières lettres du travail académique devait être déjà entre les mains de Coignard, imprimeur de l'Académie françoise (le privilége donné à l'Académie pour son Dictionnaire est de 1674). Or, d'après le témoignage même du privilége, la rédaction en était commencée dès 1635: elle devait donc représenter l'état de la langue, et de l'écriture en particulier, non pas en 1694, date de l'achèvement du dictionnaire, mais tel qu'il pouvait être vers 1660, époque de la mise sous presse de la première édition des cahiers. (On s'en convaincra en jetant les yeux sur le Tableau comparatif qui suit.) Or le travail d'analyse et de coordination accompli par de savants académiciens pendant la longue période comprise entre 1635 et 1680, époque de l'apparition du Dictionnaire de Richelet, ainsi que toutes les propositions acceptables des grammairiens réformateurs étaient, pour ainsi dire, non avenues: l'Académie se croyait engagée par les décisions grammaticales et orthographiques adoptées dans les Cahiers, puis dans les premières lettres du Dictionnaire.

Il est résulté de cette lenteur du travail, très-explicable en pareille matière, qu'au point de vue de l'usage, même en fait d'écriture, l'œuvre académique s'est trouvée arriérée en naissant, et que l'orthographe du Dictionnaire de Richelet de 1680, si raisonnable en bien des points, n'a pu être sanctionnée en partie par l'Acadé

(1) 3 vol. in-4, 1667, revu par Richelet.

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