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de la langue. J'ai cherché cette vérification dans les plus anciens monuments littéraires du français au douzième siècle, je veux dire les Quatre livres des Rois de la Bibliothèque Mazarine et les Choix de sermons de saint Bernard, publiés par M. Le Roux de Lincy en 1841. J'ai fait dépouiller dans les uns et les autres tous les mots en ance et en ence. Ils sont en bien petit nombre dans un volume de plus de cinq cents pages, ce qui prouve que la tendance à calquer les terminaisons du français sur le latin n'était pas encore très-prononcée. Les voici tous, sans acception de conjugaison cette fois :

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Les mots en ence ne sont qu'au nombre de treize et sont marqués d'un caractère théologique tout spécial. Ce sont :

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On voit que plusieurs d'entre eux ont leurs correspondants dans la liste ci-dessus en ance: tels sont penance et penitence, sachance et sapience, science. Il résulte de ce qui précède que même dans les mots tirés de substantifs en entia la forme française en ance domine partout sur la forme latine en ence qui figurait peut-être la prononciation ince. En tout cas il est incontestable qu'en empruntant des mots au latin, le français d'alors ne s'attachait pas à en copier servilement l'orthographe.

V

SYLLABES TI, TION.

Au moyen d'un simple signe adapté à la lettre t, comme Geofroy Tory l'a fait le premier pour la lettre c, lui donnant, par l'apposition de la cédille, le son exceptionnel du s, bien des difficultés de prononciation seraient épargnées aux étrangers ainsi qu'aux enfants; et l'Académie ne serait plus obligée, dans son Dictionnaire, de répéter continuellement : « Dans ce mot, t suivi de i se prononce comme c dans ci, » indication fréquemment reproduite, mais qu'on lui reproche d'avoir oubliée dans plus de cent endroits.

Cette syllabe ti, qu'on doit prononcer ci, est une cause de telles difficultés pour la lecture et l'écriture, qu'il semble indispensable d'adopter un système régulier, soit en remplaçant let par cous, comme l'a fait l'Académie dans certains mots, soit en plaçant une cédille sous le t, ainsi qu'on le fait depuis le milieu du seizième siècle pour le c. En sorte que, de même qu'on écrit flacon et façon, gascon et garçon, on écrirait : nous acceptions et les accepţions, pitié et inerție, inimitié et facéție, amitié et primație, chrétien et Capétiens, etc.

Déjà l'Académie a substitué quelquefois le cau t; elle écrit négociation, qui, conformément à l'étymologie, aurait dû être écrit négotiation, puisqu'elle écrit initiation, pétition, propitiation (1). Ailleurs elle écrit sans motif il différencie et il balbutie, chiromancie et démocratie, circonstanciel et pestilentiel.

(1)-Elle se trompe même en indiquant ainsi la prononciation de ce mot : « On prononce propiciation. »

L'Académie, qui a écrit par un t les dix adjectifs suivants : ambitieux, captieux, contentieux, dévotieux, factieux, facétieux, minutieux, prétentieux, séditieux, superstitieux, écrit par un cles treize autres que voici : avaricieux, consciencieux, disgracieux, gracieux, licencieux, malgracieux, malicieux, précieux, révérencieux, sentencieux, silencieux, spacieux, vicieux : les uns et les autres, indistinctement, ont en latin un t, vitiosus, pretiosus (1), etc. Pourquoi cette distinction? En modifiant l'orthographe des dix premiers, tous les adjectifs de cette catégorie terminés en IEUX seraient écrits et prononcés uniformément, comme avaricieux, capricieux, délicieux.

Peut-être conviendrait-il, pour treize substantifs ayant tie pour désinence: argutie, calvitie, diplomatie, facétie, impéritie, ineptie, inertie, minutie, onirocritie, primatie, prophétie, suprématie, et pour les quatre mots terminés par cratie : aristocratie, bureaucratie, démocratie, ochlocratie, de les écrire avec la désinence CIE, comme l'a fait l'Académie pour chiromancie, rabdomancie. Alors il n'y aurait plus d'exception pour l'ensemble des mots se terminant en CIE, comme pharmacie, superficie, alopécie et esquinancie, que Henri Estienne, à sa table des mots dérivés du grec, renvoie avec raison à squinancie.

Il en est de même de circonstanciel, que l'Académie écrit par un c; mais elle écrit confidentiel, différentiel, pestilentiel, substantiel, obédientiel, et cependant ces mots dérivent de confiance, différence, pestilence, substance, obédience, comme circonstanciel dérive de circonstance. Par la même raison, essentiel devrait s'écrire essenciel. On pourrait donc écrire uniformément les mots dont la désinence est en CIEL.

(1) Le mot prétieuses est ainsi écrit dans le Dictionnaire de Somaize (1661), mais l'Académie, en 1694, remplaçant le t par un c, écrit les précieuses, et déjà en 1420, le Dictionnaire de Le Ver, où souvent les mots latins sont orthographiés conformément à la prononciation française, écrivait avec un c les mots preciosus, preciolus, preciose, preciositas, qu'il traduit par precieusement, precieusetes.

Ainsi, pour ces diverses séries de mots prononcés en cion, en cieux, en cie et en ciel, le c ayant déjà été employé quelquefois par l'Académie à la place du t, on pourrait adopter uniformément la lettre c. Par là bien des difficultés et des règles de grammaire seraient supprimées.

Quant aux autres séries de mots où ti figure, peut-être conviendrait-il de préférer le tauc: tels sont les mots 'écrits exactement de même, mais qui changent de signification et de prononciation, du moment où ils ne sont plus des verbes à la première personne du pluriel de l'imparfait de

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La cédille, placée sous le t comme on le fait pour le c lorsqu'il prend le son de s, ferait cesser cette confusion injustifiable. Il deviendrait aussi facile de distinguer les accepţions de nous acceptions, les adopţions de nous adoptions, et de discerner et de prononcer les deux ti, soit ti et ți (ci), qu'il l'est de ne pas confondre les deux sons du e dans commerçant et traficant, dans reçu et recueillir.

Les deux verbes initier et balbutier seraient aussi écrits par t.

Quelle difficulté, je ne dirai pas de distinguer (il n'y a pas de distinction possible), dans la foule des mots où se trouvent les deux lettres ti, ceux où il faut les prononcer soit ti, soit ci:

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