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anploie les lètres magufcules au comancement des frases, des noms propres, etc. C'êt infi qu'on a invanté les acçants, le tréma, l'apostrofe, le tret d'union, les guillemets, les diférantes marques de ponctúacion, etc.

« Nous atandons bién, Méfieurs, que votre vue fera d'abord un peu choquée de notre ortografe: nous vous demandons pour éle la même paciance que vous avez en lisant des livres ortografiés fuivant l'anciène ortografe. A peine an avez-vous lu vint pages, que vos ieux f'i abituent. La même chose vous arivera par raport à la nôtre; dégnez an fêre l'éfè. Vous voudrez bién vous souvenir que notre but êt de faciliter an même tans l'ortagrafe é la pronon

ciacion.

« Notre réforme vous parêtra, Méfieurs, fort étandue ; vous an adopterez ce que vous guġerez à propos. Nous aurions pu nous contanter des remarques que nous avions fètes dans les deus premieres parties; mês des perfones dont nous refpectons baucoup les lumieres nous ont représanté que ce feroit lêser notre ouvrage inparfet, que de n'i pas aġouter la pratique. Vous avez, nous ont dit ces perfones, exposé d'une maniere três-sansible les défauts inonbrables de l'ortografe actúele; vous avez fet voir le peu d'acord, les inutilités, les contradiccions même qui regnent dans les diférantes parties de cet édifice : il faut actuèlemant faire voir comant, avec les mêmes matériaus, on pouret le reconstruire à moins de frês, é d'une manière auffi comode que folide. >>

Grammaire générale et raisonnée, contenant les fondemens de l'art de parler, expliqués d'une maniere claire et naturelle; les raisons de ce qui est commun à toutes les langues, et des principales différences qui s'y rencontrent; et plusieurs remarques nouvelles sur la langue françoise. Nouvelle édition. - Réflexions sur les fondemens de l'art de parler pour servir d'éclaircissemens et de supplément à la Grammaire générale, recueillies par M. l'abbé Fromant. Paris, Prault fils, 1756, 2 vol. pet. in-8 de 6 ff., 224 pp. et 2 ff., et de XLVII et 291 pp. (Réimprimée plusieurs fois depuis.)

Ce traité, connu sous le nom de Grammaire de Port-Royal, et

dont il est déjà parlé page 226, est enrichi dans cette édition des excellentes remarques de Duclos, secrétaire perpétuel de l'Académie française (1).

Ce livre si remarquable, et dont le temps n'a pas encore altéré la valeur, contient dans son texte quelques idées de réforme justes bien qu'un peu timides. Après avoir constaté l'utilité, dans certains cas, d'une orthographe fondée sur l'étymologie, MM. de Port-Royal ajoutent : « Voilà ce qu'on peut apporter pour excuser « la diversité qui se trouve entre la prononciation et l'écriture; << mais cela n'empêche pas qu'il n'y en ait plusieurs qui se sont << faites sans raison et par la seule corruption qui s'est glissée « dans les langues. Car c'est un abus d'avoir donné, par exemple, << au e la prononciation de l's avant l'e et l'i; d'avoir prononcé au<< trement le g devant ces deux mêmes voyelles que devant les au<< tres; d'avoir adouci l's entre deux voyelles; d'avoir donné aussi « aut le son de l's avant l'i suivi d'une autre voyelle, comme « gratia, actio, action....

<< Tout ce que l'on pourroit faire de plus raisonnable seroit de << retrancher les lettres qui ne servent de rien ni à la prononcia«<tion, ni au sens, ni à l'analogie des langues, comme on a déjà «< commencé de faire ; et conservant celles qui sont utiles, y mettre « des petites marques qui fissent voir qu'elles ne se prononcent << point, ou qui fissent connoître les diverses prononciations d'une << même lettre. Un point au-dedans ou au-dessous de la lettre pour«roit servir pour le premier usage, comme temps. Le c a déjà sa «< cédille, dont on pourroit se servir devant l'e et devant l'i, aussi << bien que devant les autres voyelles. Le g dont la queue ne seroit « pas toute formée pourroit marquer le son qu'il a devant l'e et « devant l'i. Ce qui ne soit dit que pour exemple. »

Duclos, aussi bon grammairien que Du Marsais, et philosophe comme lui, mais encore plus hardi, a inauguré sa réforme orthographique dans ses remarques jointes en petit caractère à cette édition de la grammaire. Voici le passage où il explique luimême ses idées :

« Je croi devoir a cète ocasion rendre conte au lecteur de la diférence qu'il a pu remarquer entre l'ortografe du texte et cèle des remarques. J'ai suivi l'usage dans le texte, parce que je n'a

(1) Duclos avait déjà donné une édition de cette grammaire en 1754, in-12.

pas le droit d'y rien changer; mais dans les remarques j'ai un peu anticipé la réforme vers laquèle l'usage même tend de jour en jour. Je me suis borné au retranchement des lètres doubles qui ne se prononcent point. J'ai substitué des fet des t simples aus ph et aus th: l'usage le fera sans doute un jour par-tout, comme il a déjà fait dans fantaisie, fantóme, frénésie, tróne, trésor et dans quantité d'autres mots.

« Si je fais quelques autres légers changemens, c'est toujours pour raprocher les lètres de leur destination et de leur valeur.

« Je n'ai pas cru devoir toucher aux fausses combinaisons de voyèles, tèles que les ai, ei, oi, etc., pour ne pas trop éfaroucher les ieus. Je n'ai donc pas écrit conétre au lieu de conoître, francès au lieu de françois, jamès au lieu de jamais, frèn au lieu de frein, pène au lieu de peine, ce qui seroit pourtant plus naturel. Je n'ai rien changé a la manière d'écrire les nasales, quelque déraisonable que notre ortografe soit sur cet article. En éfet, les nasales n'ayant point de caractères simples qui en soient les signes, on a u recours a la combinaison d'une voyèle avec m ou n; mais on auroit au moins du employer pour chaque nasale la voyèle avec laquèle èle a le plus de raport; se servir, par exemple, de l'an pour l'a nasal, de l'en pour l'e nasal. Cète nasale se trouve trois fois dans entendement, sans qu'il y en ait une seule écrite avec l'a et quoiqu'il fut plus simple d'écrire antandemant. L'e nasal est presque toujours écrit par i, ai, ei : fin, pain, frein, etc., au lieu d'y employer un e. Je ne manquerois pas de bonnes raisons pour autoriser les changemens que j'ai faits et que je ferois encore, mais le préjugé n'admet pas la raison. »

Il ajoute ailleurs : « On peut entreprendre de corriger l'usage de l'orthographe, du moins par degrés et non pas en le heurtant de front, quoique la raison en eut le droit ; mais la raison même s'en interdit l'exercice trop éclatant, parce qu'en matière d'usage, ce n'est que par des ménagemens qu'on parvient au succès. »

DOUCHET, avocat au Parlement et ancien professeur royal en langue latine. Principes généraux et raisonnés de l'orthographe françoise, avec des remarques sur la prononciation. Paris, P.-F. Didot, 1762, in-8 de xvi et 176 pp.

Douchet est un écrivain de mérite. Après la mort de Du Mar

sais, il fut chargé, de concert avec Beauzée, de la continuation des articles de la partie grammaticale de l'Encyclopédie.

Ses remarques, nouvelles à l'époque où il les écrivait, sont pour la plupart acquises aujourd'hui à la grammaire. Tel est son chapitre sur les caractères prosodiques. J'en extrairai cependant un passage dans lequel il propose une solution à l'imperfection qu'offre notre orthographe dans le redoublement des consonnes.

« L'e muet n'indique, dit-il, qu'une certaine quantité de nos voyelles longues (ex. j'emploierai); l'accent circonflexe ne fait connoître que celles qui étoient autrefois suivies d'un s, ou que l'on redoubloit pour en marquer la longueur (tempête, au lieu de tempeste, rôle au lieu de roole); il en reste encore un grand nombre, ou qui sont sans marque distinctive (vase, bise, rose, ruse), ou qui sont suivies d'une consonne redoublée, qui est la marque des voyelles brèves, autre vice encore plus considérable, comme dans les mots tasse, manne, flamme, fosse, professe, etc. C'est une autre espèce d'imperfection dans notre orthographe. Il seroit aisé de parer à ces inconvénients: ce seroit, ou de marquer ces voyelles longues par un trait horizontal, ou d'étendre encore ici l'usage. de l'accent circonflexe. Par ce moyen, toutes les équivoques seroient levées, toutes les voyelles longues seroient fixées et déterminées, et la quantité, cette partie si importante de la prosodie, seroit indiquée d'une manière simple, précise et régulière : on pourroit même alors la trouver et l'apprendre par l'écriture.

«Un autre avantage qui en résulteroit encore, c'est que la réduplication des consonnes, ce système si vague, si forcé, si rempli d'exceptions, que l'on prétend que nos pères ont imaginé pour indiquer les voyelles brèves (1), deviendroit absolument inutile, parce que toutes les voyelles longues étant décidées, on n'auroit plus besoin d'un autre signe pour désigner les brèves elles seroient suffisamment distinguées par la raison qu'elles n'auroient point la marque des longues. A l'égard des communes, c'est-à-dire des voyelles qui sont longues ou brèves à volonté, ou elles n'auroient point de signe distinctif, ou on leur appliqueroit la marque usitée en grec et en latin. On pourroit ainsi supprimer la consonne que l'on n'a introduite que pour avertir que la voyelle précédente est brève. On ne la laisseroit subsister que dans les mots où elle

(1) Voir plus haut l'analyse de la Grammaire de Regnier Des Marais, p. 251, et celle de l'Orthographe des dames, de de Wailly, p. 276.

est nécessaire, quand il faut la redoubler dans la prononciation, comme dans inné, erreur, illustre, immense, etc. »

Douchet propose, après Port-Royal et d'autres grammairiens, l'emploi du t cédille dans les substantifs portions, rations, etc., comme signe de distinction d'avec les verbes portions, rations.

Dans le chapitre III, des Caractères étymologiques, l'auteur s'occupe des variations du ph, du ch et de l'esprit rude (h) en français. « Ces variations sont une nouvelle source de difficultés pour notre orthographe. De ces doubles caractères, le ch est celui qui cause le plus d'embarras dans notre langue : non-seulement il varie dans l'écriture, il varie encore dans la prononciation. On le prononce à la françoise dans chérubin, chirurgien, Archimède, et il a la valeur du k dans orchestre, chiromancie, Archélaus. De là ces incertitudes sur la prononciation de certains mots, tels que Chersonese, Acheron, où les uns prononcent le ch comme dans cherubin et les autres comme dans orchestre. On pourroit encore aisément obvier à ces difficultés. On laisseroit subsister le c dans tous les mots où l'usage l'a introduit à la place du ch, comme dans carte, corde, colere, etc., on supprimeroit le ch dans les autres mots où il s'articule comme le k, et on le remplaceroit par cette figure. Ainsi l'on écriroit orkestre, Arkélaüs, kiromancie, kirographaire. »

(L'abbé CHERRIER). Equivoques et bizareries de l'orthographe françoise, avec les moiiens d'y remédier. Paris, Gueffier fils, 1766, in-12 de 3 ff., xvш et 155 pp.

L'auteur, après avoir exposé les raisons qui militent en faveur d'une réforme et les causes qui ont fait échouer les tentatives antérieures à la sienne, établit ainsi les changements qu'il croit devoir opérer :

« Plusieurs ont estimé qu'il falloit entendre ces marques propo«sées dans la Grammaire de P. R. de celles qui sont déja usitées << sur certaines lettres, ensorte qu'il ne s'agiroit que de les adapter « à d'autres et c'est le sentiment que j'ai cru devoir suivre. C'est« pourquoi je propose, par exemple, d'après un habile académicien « (le P. Girard), de mettre une cédille, ou petit c renversé, sous le « tramoli, come on en a mis une avec succès sous le c pour le ra

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