3o Il distingue ainsi par l'accentuation les mots suivants : Si le mot était, comme abcès, procès, terminé par è et s qui ne se prononce pas, il remplace l'è par l'é. Ex : congrés, décés. 4° Il propose pour le même motif d'écrire àmmonite, Emmanuèl, immobile, ànnuité, triènnal, ìnné, àmnistie, sòmnambule, àllusion, illégal, collateur. 5° On pourrait écrire, à la manière espagnole, émall au lieu de émail, vermell au lieu de vermeil, périll au lieu de péril, seull au lieu de seuil, fenoull au lieu de fenouil, etc. Si l'on ne prononce qu'un et qu'il ne soit pas mouillé, on n'en écrira qu'un : tranquile, mortèle, rebèle, une vile, vilage, etc. 6o Les monosyllabes ces, des, les, mes, ses, tes porteraient l'accent aigu (sic) pour qu'on pût les distinguer de la dernière syllabe des mots actrices, mondes, males, victimes, chaises, dévotes. On écrirait de même : bléd, clef, pluriél, piéd. 7° Il propose l'accent grave dans les cas suivants : Ecbatane, pectoral, heptagone, cèrveau, èscroc, èspace, etc. Et de même : cèle, musète, anciène, qu'ils viènent. Le même accent s'appliquerait aux mots èxact, èxécuter, èxorde, èxquis, etc. 8° L'accent circonflexe qui sert à allonger la syllabe dans prétre, extrême, ne doit pas être reproduit dans les composés, prétrise, extrémité (1). 9° On devrait écrire àgnat, àgnation, àgnatique, igné, ignicole, ignition, cògnat, cognation, stagnation, stagnant, en écrivant comme à l'ordinaire les mots agneau, cognée, ognon, rognure. 10° Il propose aussi d'employer l'accent grave dans les mots (1) Ce principe excellent devrait être observé dans tous les cas semblables. On écrit gréle, mais on devrait écrire grélon, etc. Ainsi le veut la prosodie française. suivants: lingual, le Guide, le duc de Gùise, aigùiser, aigùille, aigùe, contigue, équateur, liquéfaction, équestre, quinquagésime, pour distinguer le son spécial de gu et qu de celui qu'il a dans anguille, liquéfier. Il propose aussi argüér, ambiguïté, contiguïté. L'auteur fait une excellente observation sur l'anomalie qui consiste à prononcer comme s et non comme z, ainsi que le voudrait la règle grammaticale, les mots désuétude, préséance, présupposer, monosyllabe. Il remédie à cette difficulté en écrivant déssuétude, présseance, préssupposer, monossillabe. Il donne ensuite des préceptes pour l'emploi du tréma; la plupart n'ont pas prévalu. « On prononce ai comme e muet dans faisant, nous faisons, je faisois, vous faisiez, bienfaisant, contrefaisant, et autres dérivés pareils du verbe faire. Mais puisqu'il est déja reçu d'écrire par un e simple je ferai, je ferois, etc., sans égard pour l'ai de faire, pourquoi n'écriroit-on pas de même fesant, nous fesons, je fesois, vous fesiez, bienfesant, biénfesance, contrefesant? M. Rollin et d'autres bons écrivains (1) nous ont donné l'exemple, et la raison prononce qu'il est bon à suivre. « 14° Les deux caractères ch se prononcent quelquefois en sifflant comme dans méchant, et quelquefois à la manière du k comme dans archange. Il étoit si aisé de lever l'équivoque qu'il est surprenant qu'on n'y ait point pensé la cédille étant faite pour marquer le sifflement, il n'y avoit qu'à écrire ch pour marquer le sifflement, et ch pour le son guttural: méchant, monarchie, archevêque, marchons, chercheur, en sifflant; archange, archiepiscopat, archonte, chœur, avec le son dur (2). « Grâce à cette légère correction, on pourrait rétablir l'analogie entre monarchie et monarche. » 15° En vertu du même principe, Beauzée propose l'h avec cédille quand cette lettre est aspirée. « Cela ne feroit pas un grand embarras dans l'écriture, et les imprimeurs seroient sans (1) Voltaire écrit toujours ainsi, et cette orthographe a été maintenue dans l'impression de ses œuvres. (2) Le nombre des mots dérivés du grec écrits encore par ch prononcé comme k étant très-minime, puisque la plupart ont déjà perdu l'h, la combinaison ingénieuse de Beauzée devient inutile du moment que l'on accepterait ce que j'ai proposé. (Voyez ci-dessus, p. 36.) doute assez honnêtes pour faire fondre des h cédillées en faveur de l'amélioration de notre orthographe : plus on facilitera l'art de lire, plus aussi on multipliera les lecteurs et par conséquent les aquéreurs de livres. >> 16° « J'en dirois autant des t cédillés pour le cas où cette lettre représente un sifflement. N'est-il pas ridicule d'écrire avec les mêmes lettres, nous portions et nos portions, nous dictions et les dictions, et une infinité d'autres ? Cette simple cédille, en fesant disparoître l'équivoque dans la lecture, laisseroit subsister les traces de l'étymologie et seroit bien préférable au changement qu'on a proposé du t en cou en s. 17° « L'analogie, si propre à fixer les langues, à les éclairer, à en faciliter l'intelligence et l'étude, conseille encore quelques autres changements très-utiles dans notre orthographe, parce qu'ils sont fondés en raison, que l'usage contraire est une source féconde d'inconséquences et d'embarras, et qu'il ne peut résulter de ces corrections aucun inconvénient réel. « Le premier changement seroit de retrancher des mots radicaux la consonne finale muette, si elle ne se retrouve dans aucun des dérivés pourquoi, en effet, ne pas écrire rampar sans t et nou sans d, puisqu'on ne forme du premier que remparer et du second nouer, dénouer, dénoùment, renouer, renoueur, renoùment, où ne paroissent point les consonnes finales des radi.caux (1)? « Le second, de changer cette consonne ou dans le radical ou dans les dérivés, si elle n'est pas la même de part et d'autre, et que la prononciation reçue ne s'oppose point à ce changement. L'usage, par exemple, a autorisé absous, dissous, résous au masculin, et absoute, dissoute, résoute au féminin: inconséquence choquante, mais dont la correction ne dépend pas d'un choix libre; let se prononce au féminin et la lettre s est muette au masculin. Écrivons donc absout, dissout, résout. Au lieu d'écrire faix, faux, heureux, roux, écrivons avec l's: fais, faus, heureus, rous, à cause des dérivés affaissement, affaisser, fausse, faussement, fausseté, fausser, heureuse, heureusement, rousse, rousseur, roussir. Une analogie plus générale demande même que l'on change a partout où cette lettre ne se prononce pas comme cs ou gz et qu'on écrive (1) L'Académie a depuis adopté les mots nodus et nodosité. Ce dernier ne figure qu'à la sixième édition. Aussère (ville), Brussèles (ville), soissante, sizième, sizain, dizième, comme on écrit déjà dizain et dizaine. Il faut écrire aussi les lois, de la pois, la vois, des pous, les fous, ceus, les væus, etc., et ne laisser à la fin des mots que les x qui s'y prononcent comme dans borax, Stix. « Il est d'usage d'écrire dépôt, entrepót, impót, supôt, avec un t inutile et un accent que réclame, dit-on, une s supprimée: eh! supprimons, au contraire, ce t inutile et rétablissons l's réclamée d'ailleurs avec justice par les dérivés déposant, etc., entreposeur, etc., imposant, etc., suposition, supositoire, etc., et nous écrirons dépos, entrepos, impos, supos, comme nous avons déja par la même analogie dispos, propos et repos... Il est d'usage d'écrire nez avec un z et les dérivés avec s, nasal, nasalite, nasard, nasarde, nasarder, naseau, nasillard, nasiller: il faut choisir et mettrez dans les dérivés comme dans le radical, ou s dans le radical comme dans les dérivés. Ce dernier parti est le plus sûr. «... Nous avons courtisan, courtisane, courtiser, courtois, etc., qui viennent de cour. Reprenons l'usage de nos pères, qui écrivoient court du latin cors, cortis (basse-court), d'où viennent le corte des Espagnols, le corteggio des Italiens et notre mot cortégé. En restituant ce caractère d'étymologie, objet si précieux pour les amateurs, nous rétablirons les droits raisonnables et bien plus utiles de l'analogie. « Un quatrième principe d'analogie est de ne jamais supprimer la consonne finale du radical dans les dérivés quoiqu'elle y soit muette, à moins que sa position dans le dérivé n'induise à la prononcer; c'est ainsi qu'on écrit sans p les mots corsage, corselet, corset, corsé, quoiqu'ils viennent de corps, parce que le p embar rasseroit la prononciation et la rendroit douteuse. Je crois que par analogie on doit de même écrire sans ples mots batême, batiser, Jean Batiste, batistère, parce qu'on seroit tenté d'y prononcer le p, comme il faut le prononcer et conséquemment l'écrire dans baptismal. « Il est contraire au bon sens de restreindre, par des exceptions inutiles, bizarres, embarrassantes et contradictoires, la règle de la formation de nos pluriels, qui fait ajouter s à la fin des noms et adjectifs singuliers non terminés par s, x ou z. » Il faut donc écrire ses gents, touts les hommes. « Les adjectifs terminés en ant ou ent forment leurs adverbes, de manière que l'oreille les entend finir par ament; cependant les uns s'écrivent par amment et les autres par emment les étrangers et les nationaux peu instruits sont en danger de prononcer ces deux syllabes comme les deux premières du mot emmancher ou de prononcer la première des deux comme la première des mots Ammonite, Emmanuel. Supprimons donc la première m, puisqu'elle ne se prononce plus, et les adverbes venus des adjectifs en ANT s'écriront simplement et analogiquement par AMENT. De savant, instant, puissant, on formera savament, instament, puissament. Quant aux adverbes venus des adjectifs en ENT, outre la suppression de la première m, qui y est également nécessaire, il faut y introduire un a, puisqu'on l'y entend. Cet a doit même entrer dans l'orthographe de l'adjectif pour caractériser l'analogie. Ainsi, écrivons diligeant et diligeament, négligeant et négligeament, prudant et prudament, violant et violament. Je conserve l'e dans diligeant et négligeant, parce qu'il y est nécessaire pour faire siffler le g et l'empêcher d'être guttural, et je supprime l'e dans prudant et violant, parce qu'il y seroit absolument inutile. » Beauzée, poursuivant le cours de ses délicates et ingénieuses observations, énonce ensuite quelques règles qui se recommandent à l'attention des partisans de la néographie phonétique : « Il faut, dit-il, écrire le son o par au dans les mots dont les analogues ont a ou al en même place, et par eau dans ceux dont les analogues ont e ou el dans la syllabe correspondante, comme: « Si l'on entend dans quelques mots un o simple ou la voyelle composée ou, l'analogie exige que dans tous les mots de la même famille où au lieu de o ou de ou on entendra eu, on écrive œu; ainsi écrivons-nous : |