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vous? Que penseriez-vous d'un homme qui diroit, en présence du peuple, que le peuple est trop stupide pour qu'on le gouverne par des lois raisonnables ? Ne croiriez-vous pas cet homme un fou, à moins que ce ne fût un prêtre ?

C'est pourtant ce qu'a prétendu un député de l'assemblée nationale, lors de la seconde discussion de cette loi si nécessaire.

On avu des tuteurs faire déclarer imbécilles et insensés leurs pupilles, afin de jouir de leur bien. Les gouvernemens, les papes, tous les hypocrites de la terre et les hommes foibles, à leur exemple, ont joué le même rôle. Ils ont toujours soutenu que le peuple n'étoit pas digne de la vérité, pour pouvoir le tromper en toute sûreté de conscience.

ÉVÉNEMENS ET NOUVELLES.

LONDRES. Une seule maison de banque a fait ici une faillite de plus de soixante millions. Il est bien des potentats qui ne trouveroient pas assez de crédit pour faire une aussi belle banqueroute. Agassis, Rougemont et compagnie, c'est le nom des négocians qui ont manqué. L'un d'eux, le principal auteur de cette déroute, s'est tué pour fuir sa honte et ses remords. Les spéculations qui ont bouleversé leurs affaires, s'étendoient sur toute l'Europe. Ayant formé daris tous les pays d'énormes amas de marchandises, ils vouloient en faire hausser le prix, par-tout où ils se proposoient de vendre; et pour cela, ils avoient entrepris de faire baisser les effets publics et les changes. Les sacrifices immenses qu'il falloit faire, la complication et la grandeur de ces opérations gigantesques, les frais monstrueux et les hasards incalculables d'un si gros jeu, enfin leur ambitieuse cupidité a perdu ces banquiers. Leur ruine venge le peuple, sur les besoins duquel ils spéculoient barbarement; elle venge tous les commerçans honnêtes et modérés dont leurs manœuvres déroutoient à chaque instant les

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combinaisons; elle venge le gouvernement, don ils ébranloient sans cesse le crédit par les mouvemen 'de leur audacieux agiotage. Leur exemple, en rassu rant les peuples, doit faire trembler les accapareur avides. Voici ce qu'il annonce au monde entier : L -Monopole est un méchant fils qui tuera son père aussi-to qu'il sera grand.

SUÈDE. Voici encore un exemple de l'horreur qu'ins pire l'aristocratie des nobles aux peuples qu'ils on foulés. Le roi de Suède, Gustave, a déclaré à la diet un déficit énorme; il a demandé des impôts très-lourd Le peuple a tout approuvé, tout consenti. Tant craint de retomber sous le despotisme du sénat et d seigneurs!

PRUSSE. Tous les habitans de ce pays étoient en rôlés et enrégimentés comme soldats. Le roi, inquie du mouvement général des peuples vers la liberté vient de faire désarmer tous les paysans. Cette pré caution le rassure contre ses sujets; mais aussi elle l livre à ses ennemis. Il ressemble à un homme qu feroit arracher les dents à son chien; il seroit sûr d n'être pas mordu; mais les voleurs en seroient sûr aussi.

LISBONNE (Portugal). La reine de Portugal est folle à lier: elle avoit tenté d'entamer et l'autorité et le trésor des prêtres. Ils l'ont tellement effrayée de leurs menaces infernales, qu'elle croit voir sans cesse les démons l'entraîner à travers les brasiers dévorans. Maintenant ils ont beau lui faire baiser les reliques vermoulues de tous les saints; plus elle voit de moines et de prélats autour d'elle; plus elle crie que tous les diables l'emportent.

Nouvelles des Départemens.

Le fanatisme continue à donner, dans une grande partie de la France, tantôt des farces burlesques, tantôt des scènes atroces. Les administrations luttent, par tous les moyens de la force ou de la persuasion, contre les cabales des prêtres, et contre les préjugés de la multitude.

Dans le bourg de Roubaix, aux environs de LILLE, le curé élu a été empoisonné à la messe, dans le vin consacré à cette cérémonie religieuse. Des douleurs dont il ignoroit la cause, lui font quitter l'autel; son vicaire l'y remplace, même événement. Cependant celui-ci, plus jeune, ayant eu des secours, ayant provoqué des vomissemens, on ne craint plus pour sa vie; mais on désespère du pauvre curé.

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On a vu, dans ce même pays, des béguines (folles rage, s'élancer, comme des harpies, sur trois magistrats, et les déchirer de leurs ongles dévots. Les ardes nationaux accourent; mais dans leur accès, ă eine les furies virginales ont-elles cédé à la pointe des païonnettes.

Dans beaucoup de départemens, la portion du peuple qu'égaroient les prêtres non assermentés, commence à s'eclairer, et à repousser leurs perfides suggestions. Quelques administrateurs ont habilement employé contre eux l'arme du ridicule.

A BLOSHEIM (département du Bas-Rhin), un cruci fix placé dans le réfectoire des capucines versoit jour et nuit des larmes de sang; tout le monde le disoit ; tout le monde le croyoit ; tout le monde l'avoit vu. Le département, voulant que chacun pûtvoir bien mieux encore ce grand miracle, a fait mettre le crucifix dans l'église paroissiale. Le déménagement l'a console. Depuis ce jour, il n'a coulé de ses yeux ni sang, ni

cau.

A Sulz (même département), un habitant s'est avisé de vendre quatre sous la pinte d'eau, bénite par un prêtre non assermenté. La municipalité ne lui a point interdit cette nouvelle industrie; elle l'a seulement obligé de prendre une patente de limonadier.

LA FERTÉ-SOUS-JOUARE (Département de Seine et Marne). On avoit répandu des craintes sur les subsistances. Le peuple s'inquiétoit : la circulation étoit menacée. La municipalité de cette ville rassemble autour d'elle les magistats et les cultivateurs des communes voisines. On délibère, et voici la résolution que le patriotisme et le bon sens dictent à ces citoyens. Chaque laboureur s'engage volontairement à faire conduire au marché de la Ferté la quantité de trois minots de blé par semaine et par charrue, jusqu'au 15 août prochain. Depuis ce moment la paix est dans les campagnes, l'abondance dans le marché, et la liberté sur la route.

PONTAVEST (Département de l'Aisne). Ce village n'a pas plus de cent vingt feux. Sous l'ancien régime il fournissoit, conjointement avec cinq ou six paroisses voisines, un milicien. Sous le régime de la liberté, Pontavest a vu quinze de ses généreux enfans voler au secours de la patrie.

PARIS. Le roi a nommé pour ministre des contributions M. Clavière, célèbre par ses grandes lumières en finances; et M. Roland de la Platière connu par de bons écrits sur le commerce; tous deux d'un patriotisme éprouvé.

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L'argent a diminué; les effets publics ont gagné considérablement. Les agioteurs, qui espéroient voir les assignats à cent pour cent de perte, étoient désolés. E Quel métier, quelle industrie, que celle qui fait qu'un homme s'arrache les cheveux quand la chose publique s'améliore et fleurit!

Un banquier de Paris, M. le Normand, vient de faire une banqueroute de douze à treize millions. Nouvelle leçon, nouveau châtiment des spéculations démésurées du monopole! Il faut dire des accapareurs ce qu'on a dit des habitans de Sodome.

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Contre eux à quoi bon le tonnerre ?
Pour détruire ces vilains-là,

Dieu n'avoit qu'à les laisser faire.

N. B. Nous avons omis d'annoncer sous son véritable titre, Touvrage excellent dont l'analyse se trouve dans notre N° 15; il est intitulé: Accord de la Religion et des Gultes, chez une Nation libre, par Charles-Alexandre de Moy, député-suppléant à l'assemblée nationale, et curé de la paroisse Saint-Laurent à Paris. Il se vend chez Garnery, Libraire, rue Serpente, N°. 17. Prix, 24. sous.

De l'Imprimerie de DESENNE, rue Royale, butte S. Roch, n. 25.

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ET VINGT-HUITIEME SEMAINE.

DE LA SECONDE ANNÉE

DELA

FEUILLE VILLAGEOISE.

Jeudi 4 Avril 1792.

INSTRUCTION

DES Administrateurs du Directoire et ProcureurGénéral-Syndic du Département,

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AUX HABITANS DES DISTRICTS RURAUX,

Sur les désordres et les troubles relatifs aux grains.

GITOYEN

Vous désirez que le prix du blé baisse, ou du moins qu'il ne s'élève pas; nous formons le même vœu que vous. Mais pour empêcher le surhaussement que vous craignez, les habitans de plusieurs communes s'introduisent armés, et en grand nombre, dans les maisons des laboureurs, des fermiers, et autres propriétaires de grains, y font l'inventaire des denrées qui s'y trouvent, font souscrire des soumissions d'en conduire à tel jour déterminé des quantités fixes à des marchés indiqués, et en taxent le prix. Citoyens! nous devons le dire ces moyens sont propres à pro duire à Paris et dans les environs, la disette, et non Quatrième partie.

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B

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