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et qui semblaient faire partie des bases fondamentales de toute connaissance humaine. L'immense mérite d'Einstein est d'avoir éclairci complètement la question par une analyse précise de la notion de Simultanéité.

Du reste, en y réfléchissant bien, la contraction des longueurs ne peut être appelée que « contraction apparente» enfermez, en effet, avec M. Paul, dans son laboratoire ambulant, un philosophe de n'importe quelle école, et demandez-lui de quoi il s'agit quand il parle des longueurs et des dimensions des corps contenus dans son laboratoire il vous répondra : << Mais il s'agit des dimensions telles qu'on les constate avec les mesures intérieures au laboratoire. » Et ce qui le confirme dans cette idée, c'est que les mesures faites de cette façon concordent avec celles qui ont été faites avec les mêmes instruments avant le départ du laboratoire ambulant.

Il y a là un principe qu'on peut rapprocher de celui des durées propres (chap. v): en appelant « dimension propre » une dimension d'un objet immobile par rapport au laboratoire, appréciée par des mesures intérieures au laboratoire, nous pourrons dire:

La vitesse d'un système de référence n'influe pas sur les dimensions propres des objets entrainés avec ce système.

C'est le « principe des dimensions propres ».

Si donc je dis à M. Paul et au philosophe qui l'accompagne que les objets de leur laboratoire sont contractés dans le sens du mouvement de

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et c2

qu'ils ne s'en aperçoivent pas parce que leurs étalons

sont raccourcis dans la même proportion, ils pourront me répondre : « Nous n'avons que faire de vos observations; les moyens de mesure que nous employons sont bien conformes à l'idée naturelle de dimension, et comme nous nous en servons correctement, ils nous donnent les vraies dimensions, les dimensions propres des objets du laboratoire; si vous, Pierre, vous trouvez pour ces longueurs des chiffres différents, c'est que vous avez employé une méthode différente de la nôtre... » Et, ma foi, ils auront raison.

:

Mais ne nous y trompons pas nous ne pouvons pas changer de système de référence chaque fois que nous étudions un corps mobile par rapport à nous nous devons donc noter, dans notre système, les événements que nous étudions (rencontre de 2 corps, chocs, etc.., c'est-à-dire, au fond, des coincidences à la fois spatiales et temporelles) par des « coordonnées » d'espace et de temps. Pour cette notation tous les systèmes de référence (de Galilée) sont équivalents, et les résultats qu'ils donnent sont reliés entre eux par les formules de transformation de Lorentz.

VIII. La composition des vitesses et l'expérience de Fizeau

Une des conséquences importantes de la théorie de la Relativité est la règle de composition des vitesses on sait que, pour les cas considérés habituellement, les vitesses s'ajoutent ainsi. je marche sur un trottoir roulant et je fais 4 kilomètres à l'heure par rapport au trottoir (kilomètres mesurés par rapport

au trottoir, au moyen de repères inscrits sur les planches du trottoir à la suite de mesures faites avant la mise en marche); si le trottoir roulant fait 6 kilomètres à l'heure par rapport à la terre, ma vitesse par rapport à la terre est de 10 kilomètres à l'heure.

Il n'en est plus de même pour les grandes vitesses, car alors intervient le fait que le nombre de kilomètres et le nombre d'heures en question dépendent du système de référence choisi: tous ces nombres ne sont pas les mêmes si l'on se réfère à la terre ou au trottoir roulant le calcul donne alors une vitesse résultante

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Ce résultat n'est valable, bien entendu, que si les deux vitesses v et ' sont mesurées dans deux systèmes différents ainsi, dans l'exemple précédent, la vitesse = 4 kilomètres à l'heure était mesurée par rapport au trottoir, tandis que ' 6 kilomètres à l'heure

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était mesurée par rapport à la terre.

Il est intéressant de noter que cette règle explique complètement les formules de Fresnel et les expériences de Fizeau (chap III) et sans parler d'entrainement de l'éther (en effet, nous savons maintenant que tout se passe comme si l'éther était immobile par rapport à n'importe quel système de Galilée) : il suffit d'admettre que la vitesse de la lumière par rapport à un corps transparent a toujours la même valeur par rapport à ce corps pris comme référence (1). Alors,

(1) La vitesse de la lumière dans un corps transparent est inférieure à celle de la lumière dans le vide; c'est de cette dernière qu'il était question jusqu'à présent, sous le nom « de vitesse de la

selon que le corps transparent en question est ou non en mouvement par rapport à l'observateur terrestre, la vitesse résultante varie, et la formule qui donne (conformément à la théorie de la Relativité) cette variation, se trouve coïncider avec la formule de Fresnel vérifiée par Fizeau. Les formules et les expériences antérieures concordent merveilleusement avec la théorie d'Einstein.

Remarquons qu'il s'agit là de composer des vitesses. très grandes, comparables à celle de la lumière dans le vide; c'est pourquoi les lois ordinaires de la mécanique ne s'appliquent plus (comme chaque fois que l'expérience met en jeu de très grandes vitesses); c'était pour faire cadrer les faits avec l'ancienne mécanique qu'on avait imaginé cette hypothèse bizarre (et par certains détails, absurde) de l'entraînement partiel. Avec les nouvelles théories, plus d'hypothèses invraisemblables, la règle générale suffit...

Cette loi des vitesses montre d'ailleurs une propriété curieuse, à laquelle on était loin de s'attendre avant l'apparition de la Relativité : c'est qu'en composant des vitesses avec d'autres vitesses, quelles que soient les valeurs des composantes, on n'arrive jamais à atteindre la vitesse de la lumière dans le vide : cette dernière devient alors une limite supérieure, que nui corps matériel ne peut atteindre, et que nul signal ne peut dépasser.

C'est toute une Mécanique nouvelle que la théorie

lumière tout court, désignée généralement par la lettre c; la vitesse dans l'air est d'ailleurs très sensiblement la même que dans le vide, et n'est pas modifiée par le pseudo « entraînement partiel de l'éther par la matière », dont parlait Fresnel.

de la Relativité institue ainsi sur les ruines de l'ancienne. Nous avons vu, en effet, qu'Einstein avait détrôné le « temps absolu » ainsi que les « solides indéformables » qui étaient la base des raisonnements de la mécanique classique.

Mais jusqu'à présent nous ne nous sommes occupés que de la cinématique, c'est-à-dire des mouvements considérés en eux-mêmes, indépendamment des notions de force et de masse; voyons maintenant ce que devient dans la nouvelle théorie, la partie de la Mécanique où on fait intervenir ces notions de force et de masse. c'est-à-dire la Dynamique.

IX. La Dynamique nouvelle

L'ancienne mécanique partait de la notion de masse absolue, introduite par Newton. Vous savez, sans doute, ce que c'est que la masse d'un corps : c'est sa capacité d'impulsion. Ainsi, en exerçant un certain effort musculaire sur une masse de «< un kilo » pendant 1 seconde, je réussirai à lui imprimer une certaine vitesse; si le même effort, appliqué pendant 1 seconde à un autre corps, réussit à lui faire prendre seulement une vitesse 10 fois moins grande, je dirai, par définition, que la masse de cet autre corps est de 10 kilos (1).

Or, on a admis jusqu'ici, et vérifié dans la limite des

(1) On confond souvent la « masse avec le « poids » (on donne le nom de kilogramme-masse à l'unité de masse et de kilogrammepoids à l'unité de poids) parce qu'en un même point de la terre, le poids est proportionnel à la masse : mais on sait qu'il n'en est plus ainsi si on change de latitude : ainsi un peson et une balance

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