tion de la théorie nouvelle, fusionnés en un principe unique. Tels sont les bases et les résultats essentiels de la première étape du développement de la théorie d'Einstein: la relativité restreinte aux mouvements en ligne droite et à vitesse constante. L'expérience est venue vérifier les conséquences: la masse des électrons croît avec la vitesse suivant la loi prévue, et il est prouvé aujourd'hui que la dynamique de la relativité explique qualitativement et quantitativement la structure complexe des raies spectrales (travaux de M. Sommerfeld). Il convient toutefois de noter que, tant qu'il ne s'agit pas de mobiles animés de vitesses fantastiques, les formules de l'ancienne mécanique restent applicables au point de vue pratique. L'ancienne mécanique, bien que basée sur des idées inexactes, reste dans la plupart des cas une excellente approximation. La théorie de la relativité restreinte doit son succès à la suppression d'axiomes à priori, de restrictions inutiles telles que le temps absolu, l'espace absolu, la masse absolue. Un pas de plus conduit à la relativité généralisée et à la théorie de la gravitation. Pourquoi restreindre la théorie aux systèmes en mouvement rectiligne et uniforme ? les lois générales de la nature doivent pouvoir s'exprimer sous une forme intrinsèque indépendante de tout système de référence et quelles que soient les coordonnées choisies pour repérer les événements. Pourquoi aussi imposer à l'Espace-Temps le caractère euclidien de la géométrie habituelle ? c'est encore une restriction inutile, je dirai plus, illogique, car l'idée la plus naturelle est que les propriétés de l'Univers sont liées à ce qu'il contient; dès lors la présence de la matière doit entraîner un défaut d'homogénéité, et la gravitation doit être l'indice d'un Univers non euclidien. L'Espace-Temps ne doit pas être régi par les lois de la géométrie d'Euclide, telles qu'on peut les étendre à un « continuum » à quatre dimensions. La vieille géométrie ne saurait suffire aux besoins du physicien, qui doit faire appel à la géométrie non euclidienne de Riemann, considérée jusqu'alors comme un pur jeu de l'esprit. De même qu'une sphère, un ellipsoïde... constituent des surfaces courbes (deux dimensions) auxquelles la géométrie plane ne s'applique pas, auxquelles on ne saurait appliquer la géométrie euclidienne sans sortir de ces surfaces, de même l'Univers (quatre dimensions) peut, par une extension de la théorie des surfaces, être considéré comme possédant une courbure. C'est le caractère non euclidien de l'EspaceTemps qui se manifeste à nos yeux par le phénomène de la gravitation; il se traduit à nous par l'existence d'une force d'inertie qui nous a donné l'illusion d'une force attractive émanant de toute matière et agissant à distance sur toute portion de matière. La loi générale de la gravitation, qui remplace aujourd'hui celle de Newton (et qui contient celle-ci en première approximation) exprime, sous une forme indépendante de tout choix de coordonnées, les relations entre la matière présente et la manière dont la structure géométrique de l'Espace-Temps s'écarte du caractère euclidien. Cette loi est fondamentale, car elle englobe toute la dynamique du point matériel. La loi d'Einstein comporte actuellement trois vérifications dont le lecteur trouvera l'exposé dans l'ouvrage de M. Metz. Loin de conduire à une complication de la Science, la théorie d'Einstein révèle une admirable harmonie, une merveilleuse synthèse des lois naturelles. Par exemple : les lois générales de l'électromagnétisme dans l'Univers non euclidien, établies par Einstein, apparaissent à l'esprit comme très simples, comme plus claires encore que les lois de Maxwell qui comportent la restriction euclidienne, et dont la signification est un peu masquée par leur forme dégénérée. M. Metz, dans son exposé succinct de la théorie, insiste particulièrement sur les questions qui ont été la plupart du temps mal comprises; il prépare ainsi le lecteur à la dernière partie de son ouvrage, intitulée Les contradicteurs et les vulgarisateurs. Je résumerai ici les points essentiels. 1o La célèbre expérience de Michelson, que la plupart des auteurs mettent en avant et présentent en général comme l'unique base de la théorie d'Einstein, est une expérience fondamentale: on s'attendait, d'après la cinématique classique, à un mouvement de la Terre par rapport au milieu hypothétique propageant les ondes lumineuses, et l'on n'a rien obtenu, à aucune époque de l'année. C'est cette expérience qui a provoqué la révolution. Mais c'est une erreur de croire que l'expérience de Michelson est la véritable base de la théorie c'est seulement une vérification, venue avant l'heure; la base solide, nous l'avons dit, est le désaccord entre les notions d'espace et de temps qu'admettent, d'une part la mécanique classique, d'autre part les lois de l'électromagnétisme. Je le répète une fois de plus, la théorie d'Einstein est imposée par tout l'ensemble de nos connaissances dans le domaine de l'électromagnétisme. 2o Une erreur dans laquelle sont tombés quelques auteurs, et qui est très répandue dans le public, est la confusion entre l'Espace-Temps quadridimensionnel et un « espace à quatre dimensions ». Ce n'est pourtant pas la même chose ! un espace à quatre dimensions (qui n'est d'ailleurs qu'une fiction mathématique alors que l'EspaceTemps est une réalité physique) est la généralisation la plus directe d'un espace tridimensionnel; les quatre dimensions sont des longueurs et jouent toutes le même rôle. L'Espace-Temps est une autre généralisation, différente de la première parce que la quatrième dimension, produit de la vitesse de la lumière par le temps, n'intervient pas de la même manière que les dimensions spatiales (1). Je n'insiste pas ici, car ce point est développé avec toute la clarté désirable dans le texte de M. Metz. Je tiens cependant à dire que ni Einstein, ni Min (1) Les personnes quelque peu familiarisées avec les mathématiques comprendront immédiatement ce qui suit. En géométrie euclidienne, l'invariant fondamental (c'est-àdire la grandeur fondamentale indépendante du système d'axes rectangulaires) est le ds2 (1) ds* dx2 + dy2 + dz2 imaginons une 4e coordonnée u; la généralisation la plus directe est (2) ds = dx2 + dya + dza + du3. Or dans l'Espace-Temps (supposé euclidien), l'invariant fondamental est (e vitesse de la lumière, t temps du système de référence considéré). C'est une autre généralisation de (1): cette fois les carrés n'ont pas tous le même signe. Suivant l'expression de M. Eddington, le fait que le temps n'intervient pas avec le même signe que les distances « est le secret des différences que présentent les manifestations de l'espace et du temps dans la nature ». La forme (3) se ramène cependant à la forme (2) en posant ctu1 et changeant le signe du ds de (3). Aussi Minkowski a-t-il considéré le temps comme équivalent à une longueur imaginaire. Autrement dit encore, l'Espace-Temps est un espace à 4 dimensions avec une dimension imaginaire; il ne faut donc pas le confondre avec un espace à 4 dimensions réelles. |