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ALLOCUTION

DE

M. Guillaume BODINIER

Président de la Société.

MONSIEUR LE PRÉSIDENT D'HONNEUR,

MESDAMES,

MESSIEURS,

1896, 1900, 1904, 1908, 1912 ! Le temps fuit; les années succèdent aux années et voilà que, pour la cinquième fois, notre Académie angevine va décerner les prix de la fondation Daillière.

Votre président, mes chers collègues, serait presque embarrassé de prononcer l'allocution d'ouverture et craindrait justement de tomber dans les redites, s'il n'était convaincu qu'il ne s'agit pas de dire des choses neuves mais de rappeler simplement et très brièvement, pour nos nouveaux collègues et pour le public qui nous honore de sa présence, ce qu'est la fondation Daillière. Aussi bien, à la fin de cette réunion, vous serez dédommagés en entendant les éloquentes paroles que vous adressera l'écrivain éminent qui nous fait le grand honneur de présider cette séance solennelle.

Messieurs, le poète angevin, Julien Daillière, aimait le Bien autant que le Beau.

Poète, il a fondé un prix de poésie; homme de bien, il a voulu récompenser la vertu et le dévouement.

Si son intelligence était belle, si son cœur était grand, sa fortune était médiocre et ne lui permettait pas les largesses d'un M. de Montyon. Mais, dans la limite de ses faibles ressources, la généreuse fondation Daillière a le même idéal, la même portée sociale, le même but moral.

Notre Compagnie, qui regrette parfois de ne pas disposer d'un peu plus d'argent pour récompenser les mérites qui lui sont signalés, gardera toujours une profonde reconnaissance à Julien Daillière de l'avoir choisie comme l'exécutrice de ses dernières volontés.

Quoiqu'elle ne soit pas riche elle-même, notre Société a consenti, à la demande des Commissions d'examen, à accorder quelques médailles et un secours qui viendront s'ajouter aux deux prix dont le testateur a interdit le partage.

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Vous aurez tout à l'heure plaisir, je n'en doute pas, Mesdames et Messieurs, à entendre nos rapporteurs vous exposer, l'un si bon connaisseur de notre vieille poésie populaire - le mérite des œuvres plus modernes présentées au concours; l'autre, le récit des nobles existences consacrées à la charité, au dévouement et au courage qu'ils ont eu à examiner et à faire connaître. Souvent, la vertu est comme une fleur cachée sous les feuilles. Cette fleur, on vous la montrera dans tout son épanouissement et un délicat écrivain vous en fera apprécier l'éclat.

Voilà, à grands traits, mon cher et vieil ami, la physionomie de la séance à laquelle nous vous avons demandé

de venir apporter ce soir la haute autorité de votre pré

sence.

Au nom de notre Académie angevine, je ne saurais assez vous remercier du grand honneur que vous nous faites.

Vous avez accueilli ma prière avec cette simplicité et cette cordialité qui vous caractérisent. Je savais qu'en allant frapper à votre porte, vous m'ouvririez. Vous vous êtes souvenu de l'ancien camarade à l'École de Droit, du collègue de ce Cercle du Luxembourg, dont nous étions membres... il y a bien longtemps ! Et moi, je pensais au jeune et brillant étudiant qui était déjà si apprécié dans les discussions littéraires et les joutes oratoires de la Conférence Ozanam, et qui, son droit terminé, entrait avec joie dans cette magistrature que sa conscience, quelques années plus tard, lui imposait l'obligation de quitter. Ce fut une heure pénible votre avenir semblait s'effondrer, mais vous étiez jeune, vous aimiez le travail, vous aviez du talent et cette retraite prématurée nous a valu l'éminent historien que nous saluons ce soir.

Oui, je me souviens Paris alors ne nous réunissait pas comme il le fait maintenant nous habitions l'un et l'autre notre petite patrie, vous, auprès de Béthune, en Artois, et moi, mon cher Anjou, lorsqu'un catalogue de librairie vint m'avertir que Pierre de la Gorce publiait l'Histoire de la Seconde République. Je dus être un de vos premiers lecteurs.

Peu après, vous abordiez et meniez à bonne fin cette œuvre magistrale et de longue haleine qu'est l'Histoire du Second Empire, récompensée par le grand prix Gobert et qui vous a ouvert les portes de l'Institut.

Depuis quelques années, vous habitiez Paris pendant plusieurs mois. Votre Second Empire achevé, qu'alliezvous faire? D'autres se seraient reposés sur leurs lauriers;

ceux qui vous connaissaient étaient certains qu'il n'en serait pas ainsi.

Vous vous êtes fait un nouveau devoir : après l'enseignement par le livre, vous avez voulu instruire par la conférence... mais l'on revient toujours à ses premières amours et l'historien a repris sa plume pour écrire cette Histoire religieuse de la Révolution française, dont chaque volume est attendu avec impatience et lu avec intérêt par tous ceux qui veulent connaitre l'histoire sereine, impartiale, puisée aux sources authentiques, jugée avec le recul du temps.

Le second volume, qui vient de paraître, a raconté presque l'histoire de notre province, de cette héroïque Vendée, angevine pour la plus grande partie, sur laquelle on a tant écrit et souvent avec passion.

Vous n'êtes donc pas un étranger parmi nous et, avant de voir l'homme, beaucoup de nos concitoyens connaissaient et estimaient l'auteur.

Il est une tradition qui nous est chère et que je veux perpétuer ce soir : au nom de notre Société, permettez-moi de vous offrir le titre de président d'honneur. Pour ne citer que les membres de l'Institut, votre nom sera inscrit à côté de ceux de Villemain, du comte de Falloux, de Beulé, de Chevreul, de Jules Lenepveu, du cardinal Mathieu, de René Bazin. Vous y serez, vous le voyez, en bonne compagnie, à la place qui vous est due; et nous, nous serons fiers d'inscrire votre nom sur cette liste d'académiciens qui, à des époques bien diverses, ont témoigné quelque sympathie à la Société Nationale d'Agriculture, Sciences et Arts d'Angers et aux efforts qu'elle fait pour entretenir dans notre province le goût des lettres, des arts, de nos vieux monuments et de notre histoire locale.

LES LOIS SOMPTUAIRES

AU XVIIE SIÈCLE

Par M. ERNEST JAC

Il est d'usage dans notre Compagnie, lorsqu'elle tient, comme ce soir, des assises plus solennelles à l'occasion de la distribution des prix Daillière, de désigner un de ses membres pour haranguer le public distingué qui veut bien répondre à notre invitation.

Le sort, quand c'est à lui de faire un choix, tombe, dit-on, volontiers sur le plus jeune. Chez nous, la douce autorité de notre Président me paraît bien avoir fait appel au moins qualifié pour prendre la parole devant vous. Si vaste, en effet, que soit le champ de nos études : agriculture, sciences et arts, je ne vois pas sous laquelle de ces rubriques je pourrais avoir la prétention de me ranger avec quelque compétence. N'étant ni agriculteur, ni savant, ni artiste, j'ai choisi un sujet d'histoire du droit. En cela vous tous qui avez lu les beaux travaux de M. de la Gorce, vous estimerez sans doute que j'ai été doublement imprudent; car on a parfois agité la question de savoir si l'histoire était un art ou une science; mais il semble bien qu'étudiée par notre éminent Président d'honneur, elle soit les deux en même temps: une science par la rigueur de la méthode et la richesse de la docu

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