devaient être au nombre de trois sur chaque côté du carré, et qu'on a portés au nombre de vingtquatre en tout. C'est l'un d'eux que représente notre gravure. Palais du Louvre. - - Détail d'une des façades de la cour exécutées par Pierre Lescot. Pierre Lescot avait donné aux parties extérieures de son quadrilatère un caractère simple et grave; il avait réservé pour la cour toutes les ressources de l'art, et s'était associé deux collaborateurs de talents TO TIM divers: le Florentin Paul Ponzio, dit Trebati, homme au ciseau plein d'énergie, et Jean Goujon, le sculpteur français qui a le mieux su donner à la pierre la suavité des contours. Au premier il confia l'or nementation des étages supérieurs, qui ne se voit qu'à distance, et au second celle des parties où l'oeil atteint plus facilement. Par cette entente délicate de toutes les parties qui devaient concourir : à l'ensemble, Pierre Lescot était parvenu à composer un monument sans rival par son admirable harmonie. Nous ne saurions mieux exprimer l'opinion inspirée aux connaisseurs par la contemplation de la cour du Louvre qu'en empruntant les paroles d'un des nombreux architectes modernes qui l'ont admirée : « La division des façades de cette cour est des plus heureuses. Le rez-de-chaussée est divisé en arcades qui, par leur saillie, ont un grand caractère de fermeté, et dont chaque pile est un véritable contre-fort qu'on a su embellir avec art, sans en dissimuler la fonction. Au-dessus s'élève l'étage principal, l'étage noble, comme disent les Italiens. Tout indique, en effet, que là doivent se trouver les grands appartements; les avant-corps s'y dessinent plus franchement qu'au rez-de-chaussée, et motivent dans l'attique (le dernier étage) une suite de frontons à lignes courbes qui rompent agréablement la ligne droite de la corniche supérieure. C'est surtout dans la composition et les proportions de cet étage d'attique que Pierre Lescot s'est montré artiste consommé. Il était impossible de mieux couronner son édifice; et de même qu'une femme réserve tout le luxe de sa toilette pour sa coiffure, de même notre architecte a compris que le luxe de sa décoration devait aller en croissant, à mesure qu'il approchait du faîte de l'édifice aussi n'a-t-il rien négligé pour que cet attique fût à la fois élégant, noble et pompeux. Destiné aux logements des personnes de la suite du roi, cet étage devait être éclairé par des fenêtres de petite dimension, qu'il devenait difficile d'harmoniser avec celles des étages inférieurs. Mais Lescot ne recula pas devant cette donnée, et il sut si bien attirer les yeux ailleurs qu'à peine les aperçoit-on. Il ne s'arrêta pas là, et, acceptant franchement la nécessité des combles élevés et des écoulements d'eaux, il mit tant d'art et de goût dans la composition des chéneaux et dans celle des cheminées, il apporta une telle recherche dans l'ornementation des faîtages en plomb doré dont il couronna l'extrémité des toits, que la partie supérieure de l'édifice pouvait presque passer pour la plus belle. Si dans la composition et dans la décoration de ces façades du Louvre on est tenté de reprocher à Pierre Lescot une trop grande profusion d'ornements, il ne faut pas cependant perdre de vue quelles étaient alors la splendeur et la magnificence de la cour pour laquelle il élevait un tel palais. Ces pierres incrustées de marbres précieux, sculptées et découpées avec tant de recherche, n'avaient assurément rien de trop riche comparées au luxe de ces hommes qui, rivalisant avec les femmes, prodiguaient dans leurs vétements le velours, le satin, les plumes, l'or et les broderies. En somme, les belles façons et la galante courtoisie de la cour de Henri II ne pouvaient avoir un asile plus digne d'elles. L'architecture du Louvre est la dernière et la plus haute expression de l'art sous les règnes de François Ier et de Henri II. C'est un édifice tout français, élevé par un génie français pour des princes français, et dont on chercherait vainement non-seulement le modèle, mais l'égal en Italie. » (L. Vaudoyer, Etud. d'archit.) L'architecture du seizième siècle n'était pas magnifique pour les rois seulement et pour les habitations seigneuriales; elle répandait ses grâces sur de plus humbles demeures. Et quoique le temps les fasse disparaître chaque jour, beaucoup de nos villes, souvent des plus petites, en conservent encore. On peut citer comme les plus belles la maison dite de Diane de Poitiers, à Orléans; celles dites d'Agnès Sorel et de François Ier, dans la même ville; la maison également dite de François Ier qui provient de Moret, près Fontainebleau, et qui fut transportée pierre par pierre, en 1825, à Paris, aux Champs-Élysées; enfin la jolie maison qui subsista rue Saint-Paul, à Paris, jusqu'en 4835, année où on la démolit. Il en existe une foule d'autres qui approchent de celles-là par l'élégance. N'oublions pas, en terminant ces lignes trop rapides sur l'architecture française du seizième siècle, de mentionner le beau corps de bâtiments construit sous Charles IX, par l'architecte Pierre Chambige, pour joindre l'angle sud-est du Louvre à la longue galerie parallèle à la Seine, et surtout l'hôtel de ville de Paris, fondé, en 1533, sur les plans d'un artiste italien, Dominique Boccadoro de Cortone; charmant édifice, mais qui, comme les Tuileries et comme le Louvre, devait devenir un jour trop petit pour la grandeur de Paris et de la France. Nous avons cité quelques sculpteurs (4). Dans le mérite de tant de beaux édifices, la part de la sculpture est très-importante. La décoration intérieure du Louvre, par exemple, ne le cède pas à sa structure extérieure, et l'on. ne saurait guère citer une salle plus noble et plus belle que celle des Cariatides, dont le principal ornement est une tribune en marbre blanc soutenue par quatre admirables colosses féminins dus au ciseau de Jean Goujon. On n'est pas mieux renseigné, sur la vie de Jean Goujon, que sur celle de Pierre Lescot, quoique une tradition (qu'aucun document certain n'est venu justifier) le fasse mourir victime de la Saint-Barthélemy, atteint par les assassins sur l'échafaudage même où il travaillait aux façades du Louvre. Outre ceux de ses ouvrages que nous avons cités, on conserve de lui au Musée du Louvre une Descente de croix, groupe de huit personnages; quatre figures des Évangélistes; trois groupes de naïades et de tritons, bas-reliefs en pierre qu'il avait sculptés, les cinq premiers pour l'église de Saint-Germain l'Auxerrois, les trois derniers pour le soubassement de la fontaine des Innocents; enfin une grande statue de Diane, en marbre, couchée, s'appuyant sur le cou d'un cerf, et tenant un arc dans la main gauche. Cette statue, qui formait le couronnement d'une des fontaines du château d'Anet, a passé, mais c'est encore une fausse tradition, pour être un portrait de Diane de (') Dans ce chapitre, et aux pages 16 et 39 (notes). Poitiers. On a aussi de Goujon deux figures en basrelief placées au-dessus de la porte d'une maison de Paris, l'hôtel Carnavalet, et l'on sait qu'il travailla, en 4544 et 1542, à l'église de Saint-Maclou de Rouen et à la cathédrale de cette ville. Sa gracieuse fontaine des Innocents date de l'an 4550, et le temps de sa plus grande activité au Louvre est l'intervalle des années 4555 à 1562. Germain Pilon fut son émule et son contemporain; il était originaire de Loué, près du Mans, travailla surtout à Paris, et y mourut en 4590. Ce Heuri II, Charles IX (p. 74) et Henri III; un charmant buste d'enfant qu'on croit ètre aussi Henri III; quatre figures de Vertus provenant de la chaire de l'église des Grands-Augustins de Paris; une Prédication de saint Paul, bas-relief en pierre, et une Déposition du Christ, bas-relief en bronze; une cheminée monumentale en marbre de diverses couleurs; les quatre Vertus cardinales, grandes statues en bois qui soutenaient au-dessus de leurs tètes la chasse de sainte Geneviève; les tombeaux du chancelier de Birague et de Valentine Balbiani sa femme; enfin, les trois Graces, sur la tête desquelles reposait l'urne contenant le cœur de Henri II, admirable groupe taillé, vers l'année 1560, dans un seul bloc de marbre, et le plus célèbre ouvrage de Germain Pilon. Il faut citer encore, au nombre des grands sculpteurs du seizième siècle, le Lorrain G Richier, auteur d'une Déposition du Christ, beau groupe de fut un grand artiste qui s'inspira beaucoup de la grâce des peintres italiens, et dont la main féconde produisit une foule de sculptures de marbre, de pierre, de bronze, de bois, de terre cuite, et même de carton-pâte, car il est question, dans l'historien de Paris, Sauval, d'un « crucifix de carte » que Germain Pilon fit pour les pénitents du collége Saint-Michel. Nous avons mentionné (p. 39 et 54) la part qu'il prit aux tombeaux de François Ier et de Henri II. On conserve de lui, au Musée du Louvre, de très-beaux bustes en albâtre de treize figures de grandeur naturelle, en pierre, ornant l'église de Saint-Mihiel (on conserve de lui, au Louvre, une statuette de l'Enfant Jésus et un bas-relief du Jugement de Suzanne); Fremyn Roussel, dont on a (au Louvre) une statue de Génie lisant et un groupe de la Charité qui avaient été destinés au tombeau de François II; Barthélemy Prieur, auteur du tombeau monumental du connétable Anne de Montmorency, mort en 4567, et de Madeleine de Savoie sa femme, morte en 4586. L'une des plus sérieuses et des plus belles œuvres de la même époque est la statue de marbre représentant Philippe de Chabot, amiral de France (mort en 1543), à demi couché sur son tombeau. Un ancien auteur (G. Brice, 1685) en fait honneur à Jean Cousin, et cette attribution a suffi pour faire longtemps regarder cet habile peintre comme étant aussi l'un de nos plus habiles sculpteurs; mais l'exacti tude de ce renseignement est aujourd'hui contestée. Le goût des arts ne se contentait pas des ouvrages que produisait le pays, les grands seigneurs en faisaient venir à grands frais de l'étranger, de l'Italie surtout. Dès 1495, avec les vingt-deux gens de métiers et autres personnages qu'il avait appelés de Naples, Charles VIII avait fait charrier depuis cette ville jusqu'à Amboise quatre-vingt-sept mille livres pesant de tapisseries, librairie, peinctures, pierres de marbre et de porfire, et autres meubles. » Le connétable de Montmorency avait à Rome, pour les achats d'objets de ce genre, une sorte d'agent qui était le cardinal d'Armagnac. « Monseigneur, lui écrivait le cardinal (nov. 4554), le frère du feu comte S. Segond, évêque de Pavie, estant mémoratif des biens qu'il a receus de vous, et d'une promesse qu'il vous fist estant en vostre maison, vous faict présent de deux bien grandes et belles testes de marbre, l'une de Severus, et l'autre de Caracalla, et les a mis entre mes mains pour les vous faire tenir, ce que je me délibere faire au premier retour des gallères à Marseille, si je ne puys miculx par autre voye. » Quelques mois après, outre ces deux bustes, il lui envoyait « en huict caysses clouées et cordées, ayant dessus un grand C marqué au fer chault, pour faire tenir à monseigneur le Connétable », un buste de femme et diverses têtes de Géta, de Marc Aurèle, de Vitellius, d'Othon et d'Hercule, offertes à M. de Montmorency par deux autres prélats italiens et par un habitant de Bologne. Ces sculptures antiques allèrent certainement orner les riches appartements ou peut-être les parterres du château d'Écouen. C'est de ce même château que proviennent les Deux Prisonniers de Michel-Ange, aujourd'hui au Louvre (nos 28 et 29), le plus beau morceau peut-être de la sculpture moderne. Un des Chastillons écrivait (en fév. 4554) à l'ambassadeur de France à Londres pour se faire envoyer d'Angleterre le portrait de Henri VIII, probablement pour compléter sa galerie de peinture. François Ier, comme nous l'avons dit, envoyait en Italie acheter des grands artistes les plus belles choses qu'on pût trouver dans leurs ateliers; il dépêchait Andrea del Sarto pour y choisir des peintures, le Primatice pour y mouler les meilleures statues antiques; et quand il avait affaire à un homme comme MichelAnge, il ne dédaignait pas de lui écrire lui-même, comme en voici un exemple : Signor Michelangelo, » Pour ce que j'ay grant desir d'avoir quelques besongnes de vottre ouvraige, j'ay donné charge à l'abbé de Saint-Martin de Troyes (Primatice), présent porteur que j'envoye par delà, d'en recouvrer; vous priant, si vous avez quelques choses excellentes faictes à son arrivée, les luy vouloir bailler, en les vous bien payant, ainsi que je luy ay donné charge, et d'avantaige vouloir estre contant pour l'amour de moy qu'il moulle le Christ de la Minerve et la vostre dame de la Febre, affin que j'en puisse aorner l'une de mes chapelles comme de chose que l'on m'a asseuré estre des plus exquises et excellentes en vostre art. Priant Dieu, signor Michelange, qu'il vous ayt en sa garde. Escript à Sainct-Germain en Laye, le viije jour de février MVCXLV. » FRANÇOYS. MUSIQUE. THÉATRE. Nous avons dit ou montré bien peu de chose de la musique du moyen âge (t. Ier, p. 220, 296). Ou l'avait cependant en grand honneur alors, puisqu'elle était l'un des instruments du culte religieux, l'une des branches de l'enseignement scientifique des universités (t. Ier, p. 291), et l'un des moyens dont les poëtes populaires se servaient pour charmer leur auditoire. Mais l'art musical a fait dans les temps modernes de si grands progrės, que les essais des premiers temps semblent d'une imperfection extrème. Il est cependant difficile de croire qu'au treizième ou au quinzième siècle par exemple, quand le goût était devenu délicat pour les choses qui parlent aux yeux, il fût resté grossier pour l'art de ces vielleux et ménestrels, ou ménestriers, que les comptes et les autres documents nous montrent si souvent à la cour et chez les grands seigneurs, égayant toutes les fêtes par leurs instruments et leurs voix. Au quatorzième siècle, on confondait encore sous le nom de ménestrandie le savoir-faire des instrumentistes, des chanteurs, des baladins et des faiseurs de tours. Ils étaient astreints, dans les villes, à la discipline des confréries ou corporations. Chacune de ces compagnies locales avait à sa tète un directeur, qu'elle élisait elle-mème et qui portait le titre officiel de roi des ménétriers. En 4397 à Paris, et vers la même époque dans le reste du royaume, les ménétriers et « joueurs d'instruments tant hauts que bas », c'est-à-dire les vrais musiciens, se séparèrent de ceux de leurs compagnons qu'ils regardaient comme des associés infimes. Ce fut une révolution, et dès lors se forma, principalement dans la Picardie, l'Artois et la Flandre française, terres fécondes en trouvères et en poëtes, une école musicale qu'on appelle l'école des maîtres picards. Ses plus habiles représentants, parmi lesquels on cite surtout Guillaume Dufay, commencèrent à créer l'harmonie. Les princes contribuérent au mouvement en élevant à une véritable dignité, celle de maîtres de leur chapelle, les meilleurs de leurs ménétriers. Il reste de Busnois, maitre de chapelle de Charles le Téméraire, des motets et des chansons à quatre parties qui attestent déjà un vrai savoir musical. Pour maître de sa chapelle, le roi Louis XI avait un Belge, nommé Ockeghem, qui fit école à son tour, et forma deux disciples habiles, Antoine Brumel et Josquin Desprez. Jean Mouton, auteur d'un motet composé en 1544, sur la mort d'Anne de Bretagne, partageait avec Josquin Desprez l'honneur de faire les délices de la cour de Louis XII. Ce prince regrettait sa voix ingrate, qui ne lui permettait pas de chanter leurs œuvres, et, pour le contenter, Desprez dut composer un morceau à quatre parties, dont l'une consistait en une seule note à soutenir, et qui fut la partie du royal exécutant. Son successeur, François Ier, fit faire à la musique de notables progrès. Outre celle de sa chapelle, dirigée par Claude de Servizy, il créa auprès de sa personne une « musique de chambre » qu'il emmena avec lui en Italie. Un musicien célèbre de cette époque, Clément Jannequin, composa sur la victoire de Marignan un morceau écrit pour quatre voix, dans lequel il fit entrer les termes militaires, les fanfares de guerre, le cliquetis des armes, et jusqu'au son du canon. Ce même Jannequin publia en 1544 un recueil d'«< Inventions musicales à quatre et à cinq parties.» Les chansons et les romances françaises, empreintes d'un caractère très-national, étaient alors fort goûtées par les étrangers. Les Italiens en faisaient des imitations qu'ils appelaient canzonette alla francese, et la plupart de leurs maîtres de chapelle étaient Français. En 1545, le pape Paul III voulant envoyer d'habiles chanteurs au concile de Trente pour donner leur avis sur ce qui concernait le chant et la musique d'église, ce furent aussi des Français qu'il choisit. Ceux de nos musiciens de cette époque dont on a conservé les noms et quelques ouvrages sont : le Hurteur, Noë, Vermont, Feignent, Conseil, Hesdin, Mornable, Manchicourt, Lhéritier, Certon, maître des enfants de chœur de la Sainte-Chapelle de Paris. Le plus illustre est Claude Goudimel, né à Besançon vers 4520, et qui, étant allé à Rome, y devint le maître de deux artistes qui ont fait la gloire de l'Italie, Nanini et Palestrina. Sur la fin du siècle, le grand-duc de Toscane Ferdinand Ier (1587-4606) et MarieMadeleine d'Autriche, son épouse, avaient fait venir à Florence, pour y former des élèves, un nommé Bernardin, qui maniait également bien le violon et les instruments à vent. En peu de temps, les élèves de cet homme étaient devenus si habiles que pas un prince ne possédait une réunion d'instrumentistes comparable à celle du duc Ferdinand. On les appelait les Françaisins. Leur chef obtint dans une des églises de Florence un tombeau de marbre et cette épitaphe « Ci-gît le prince et la gloire du chant harmonique, auquel la grande-duchesse de l'Hespérie a donné cette sépulture, Bernardin, le Françaisin le plus habile qu'on ait vu ici sur les instruments à vent, dont il tirait des sons délicieux. Il mérite, après sa mort, des honneurs pareils à ceux qu'il reçut durant sa vie. »>< En 4536, le poëte Clément Marot offrit à François Ier la traduction en vers français des trente premiers psaumes de David. En ce moment d'exaltation calviniste, l'ouvrage eut un succès immense. Le roi lui-même chantait avec plaisir les psaumes de Marot; le peuple et la noblesse les savaient par cœur; Théodore de Bèze acheva l'ouvrage, et l'Église réformée l'adopta pour la célébration du culte dans ses églises, lorsque des musiciens renommés, tels que Goudimel, Philibert Jambedefer, Roland de Lassus, eurent mis ces chants religieux en bonne et grave musique à trois et quatre parties. Auparavant, chacun adoptait pour les paroles l'air connu qui lui plaisait. C'était le vieil usage suivi dans l'Église catholique, et contre lequel l'austérité protestante fut la première à réclamer. Ainsi les œuvres les plus sérieuses de musique religieuse, les messes, se chantaient sur des motifs dont les paroles primitives étaient des gaudrioles. On avait des messes: Dites-moi toutes vos pensées, de Jean Mouton; Baisez-moi, de Pipelare; A l'ombre d'un buissonnet, de Brumel; Amour me bat, de Josquin Desprez. Les psaumes ramenèrent parmi les catholiques la mode des noëls, vieux poëmes populaires dont le sujet habituel était la nativité du Christ, et dont le peuple, surtout dans les campagnes, remplissait les rues et les églises le jour de la fête de Noël. Les poëtes de la cour de Henri II en composèrent de nouveaux, que les musiciens du même temps accompagnèrent de leur musique, et les noëls reprirent faveur. Claude Goudimel n'avait pas seulement mis en musique les psaumes de David: il avait fait de même pour les odes d'Horace, et l'on a encore cet ouvrage, qu'il fit imprimer en 4555. Cet artiste, le plus grand musicien de son temps, était fermement attaché au protestantisme; il périt misérablement à Lyon dans les massacres de la SaintBarthélemy. Après lui florirent à la cour de Charles IX et de ses successeurs : Claude le Jeune, dit Claudin, Eustache du Caurroy et Jacques Mauduit. Charles IX et Henri III étaient grands amateurs de musique. L'un et l'autre passent pour avoir composé de jolies chansons. Henri IV, auteur d'une gracieuse romance: Viens, Aurore, je t'implore, en a, dit-on, fait l'air aussi bien que les paroles; mais la romance Charmante Gabrielle, qu'on lui a attribuée, appartient à Eustache du Caurroy, son maître de chapelle, aussi bien que l'air national Vive Henri IV. L'air rendu si populaire depuis par la chanson de Marlborough paraît être aussi de la même époque. Le premier ouvrage de Jacques Mauduit fut une messe de Requiem qu'il composa pour les funérailles de son ami le poëte Ronsard (4585), et qui fut exécutée ensuite aux obsèques de Henri IV, puis au service funèbre de l'auteur lui-même, sous la direction de Louis Mauduit, son fils, en 1627. Sur le théâtre, la musique n'était employée que comme intermède. Tel était le genre des représentations données à l'hôtel du Petit-Bourbon, attenant au Louvre, par une troupe de comédiens italiens appelés i Gelosi, qui vint en France en 1577. Mais en 4583 Henri III fit jouer au Louvre, à l'occasion du mariage de son favori le duc de Joyeuse, une sorte de drame musical qui était presque un véritable opéra, dans lequel figuraient les principaux personnages de la cour. La mise en scène avait été arrangée par un musicien piémontais, nommé Baltazarini, que Catherine de Médicis avait nommé «< surintendant » de sa musique, et la |