Voilà par quels exploits il sut se couronner; CÉPHISE. Hé bien, allons donc voir expirer votre fils: ANDROMAQUE. Ah! de quel souvenir viens-tu frapper mon ame! « S'il me perd, je prétends qu'il me retrouve en toi. CÉPHISE. Que faut-il que je dise? ANDROMAQUE. Dis-lui que de mon fils l'amour est assez fort.... Crois-tu que dans son cœur il ait juré sa mort? L'amour peut-il si loin pousser sa barbarie? CÉPHISE. Madame, il va bientôt revenir en furie. ANDROMAQUE. Hé bien, va l'assurer... CEPHISE. De quoi? de votre foi? ANDROMAQUE. Hélas! pour la promettre est-elle encore à moi? O cendres d'un époux! ô Troyens! ô mon pere! O mon fils, que tes jours coûtent cher à ta mere! Allons. CÉPHISE. Où donc, madame? et que résolvez-vous? ANDROMAQUE. Allons sur son tombeau consulter mon époux. FIN DU TROISIEME AСТЕ. ACTE QUATRIEME. SCENEΙ ANDROMAQUE, CEPHISE. CÉPHISE. An! je n'en doute point; c'est votre époux, madame, C'est Hector qui produit ce miracle en votre ame : ANDROMAQUE. Oui, je m'y trouverai. Mais allons voir mon fils. Madame, qui vous presse? Il suffit que sa vue ANDROMAQUE. Céphise, allons le voir pour la derniere fois. CÉPHISE. Que dites-vous? Oh dieux! ANDROMAQUE. O ma chere Céphise, Ce n'est point avec toi que mon cœur se déguise. Ta foi dans mon malheur s'est montrée à mes yeux; Mais j'ai cru qu'à mon tour tu me connoissois mieux. Quoi donc! as-tu pensé qu'Andromaque infidele Pût trahir un époux qui croit revivre en elle; Et que, de tant de morts réveillant la douleur, Le soin de mon repos me fit troubler le leur? Est-ce là cette ardeur tant promise à sa cendre ? Mais son fils périssoit, il l'a fallu défendre. Pyrrhus en m'épousant s'en déclare l'appui; Il suffit: je veux bien m'en reposer sur lui. Je sais quel est Pyrrhus: violent, mais sincere, Céphise, il fera plus qu'il n'a promis de faire. Sur le courroux des Grecs je m'en repose encor; Leur haine va donner un pere au fils d'Hector. Je vais donc, puisqu'il faut que je me sacrifie, Assurer à Pyrrhus le reste de ma vie; Je vais, en recevant sa foi sur les autels, L'engager à mon fils par des nœuds immortels. Mais aussitôt ma main, à moi seule funeste, D'une infidele vie abrégera le reste; Et, sauvant ma vertu, rendra ce que je doi A Pyrrhus, à mon fils, à mon époux, à moi. Voilà de mon amour l'innocent stratagême; Voilà ce qu'un époux m'a commandé lui-même. J'irai seule rejoindre Hector et mes aïeux. Céphise, c'est à toi de me fermer les yeux. CÉPHISE. Ah! ne prétendez pas que je puisse survivre.... ANDROMAQUE. Non, non, je te défends, Céphise, de me suivre; Si tu vivois pour moi, vis pour le fils d'Hector. Hélas! CÉPHISE. ANDROMAQUE. Ne me suis point, si ton cœur en alarmes Prévoit qu'il ne pourra commander à tes larmes. On vient. Cache tes pleurs, Céphise; et souviens-to Que le sort d'Andromaque est commis à ta foi. C'est Hermione. Allons, fuyons sa violence. SCENE II. HERMIONE, CLEONE. CLÉONE. Non, je ne puis assez admirer ce silence. |