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s'il n'avoit eu pour lui que des miracles, et si sa mission n'eût pas été d'ailleurs fondée sur des prophéties (6) Fecit mirabilia ; magum putassemus, ut et vos nunc putatis et tunc Judaei putaverunt, si non illa ipsa facturum Christum prophetae omnes uno spiritu praedicassent.

Enfin S. Augustin enseignoit que les mì racles qui se font chez les fideles ne suffi sent pas pour prouver qu'ils soient dans la véritable église. Non ided ipsa manifestatur ecclesia, quia haec in ed fiunt (7). • On pourroit continuer cette chaîne de tradition jusqu'à nos jours; mais sans entrer dans un détail peu instructif, on se contentera de remarquer que l'opinion des Peres est devenue le sentiment général; que, si l'on excepte De Serces et l'auteur de l'Examen des convulsions, il y a trèspeu de théologiens qui s'en soient éloignés : qu'il a été soutenu depuis peu à Paris par Dom la Taste dans une telle étendue, que le nouvelliste ecclésiastique n'a pu s'empê

(6) Lactant. Lib. V. chap. 5.

(7) V. St. Augustin de unitate Ecclesiæ chap. XIX: No, 50, tom. IX, p. 379.

A

cher de s'écrier : « On se souviendra tou jours qu'un Bénédictin de la congrégation de S. Maur, prieur des Blancs-Manteaux à Paris, a avancé impunément, sous les yeux de tous ses supérieurs que les Miracles de Jésus-Christ(les résurrections mises à part) ne prouvent rien par euxmêmes, parce que le démon peut opérer toute sorte de guérison (8). »

,

C'est cette même opinion de l'insuffisance des miracles pour servir de preuve fondamentale à la vraie religion que l'on se propose d'établir dans cette dissertation. Ce n'est pas en se servant du principe des Peres; il faudroit mieux connoître jusqu'où s'étend le pouvoir que Dieu a accordé aux êtres intelligens sur la nature, pour en faire la base d'un systême : une autre raison plus conforme aux idées que nous devons avoir de la justice et de la bonté de Dieu nous fit croire que la religion doit avoir quelques preuves plus sensibles que celles des miracles que les faits extraordinaires et merveilleux

,

,

parce

(8) Voyez les Nouvelles Ecclésiastiques du premier de mars 1734.

opérés contre les loix de la nature ne peuvent jamais être portés à un assez grand degré d'évidence pour obliger tous les hommes de les croire ou pour arracher

,

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Que la principale preuve d'une Religion véritable devroit être à la portée de tous les hommes,

SI Dieu

:

I Dieu a établi une Religion pour conduire les hommes à la y perfection et au bonheur, elle doit avoir des caracteres d'évidence capables de faire impression sur tous ceux qui emploient de bonne foi leur attention pour la connoître, autrement elle ne seroit pas pour tous les hommes. Supe poser que Dieu exige des êtres intelligens qu'ils se conduisent au hasard, ou qu'ils croient sans être déterminés par des motifs suffisans, ce seroit déshonorer la Divinité, C'est cependant à quoi seroit réduite la plus grande partie du genre humain, si la vraie religion ne portoit pas avec elle cette con

viction faite pour entraîner le consentement de tous ceux qui sont capables de quelques réflexions. Il n'y a point de diversité snr ce sujet entre ceux qui ont traité cette matiere, ils ont tous supposé comme un axiome incontestable que les preuves essentielles de la religion devoient être à la portée de tous les hommes raisonnables, « Je ne vois pas que l'on fut capable de rester dans la religion dans laquelle on est hé, quelque mauvaise qu'elle fût, dit l'Abbé de S. Réal, si Dieu n'avoit pas attaché des signes évidens de vérité à la religion véritable et dans laquelle il veut être honoré. Pai dit des signes évidens pour tout le monde, c'est-à-dire pour ceux qui sont capables de quelque connoissance et de quelque discernement (9)»,

Nicole ne s'exprime pas moins clairement, « Il n'y a personne, dit-il, qui ne puisse et ne doive être convaincu par les lumieres communes de la religion, et par celles du sens commun de toutes les vérités suivantes ; qu'il est certain que Dieu veut sauver les hommes, et même les simples;

(9) St. Réal, lettre II.

qu'il ne leur offre néanmoins à tous aucune autre voie que celle de la véritable relie gion; qu'il faut donc qu'il soit non-seulement possible, mais facile de la reconnoître. (10).

Le pere Lami (11) enseigne « qu'il est à propos que l'évidence de la religion soit à la portée de tout le monde et capable de frapper vivement tous les esprits qui voudroient donner quelque attention aux preu

yes.

Fénélon (12) reconnoissoit cette vérité lorsqu'il écrit à un de ses amis: vous « avez raison de demander des motifs de croire la religion, qui soient proportionnés aux esprits les plus simples et les plus grossiers.

On parle sur le même ton à Rome : le P. Maracci prouve dans sa Réfutation de l'Alcoran, imprimée dans cette capitale. du monde chrétien, qu'on n'est pas obligé d'embrasser une religion dont les preuves

(10) Préface des préjugés légitimes C. les Calvis. nistes, et chap. XIV.

(11) Voyez Lami vérité évidente, pag. 170,
(12) Voyez Fénélon, lettres, pag. 6 et 7.

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