Images de page
PDF
ePub

SCENE V.

JOSABET, MATHAN, NABAL.

MATHAN, à Josabet.

ENVOYÉ

NVOYÉ par la Reine,

Pour rétablir le calme et dissiper la haine, Princesse, en qui le Ciel mit un esprit si doux, Ne vous étonnez pas si je m'adresse à vous. Un bruit, que j'ai pourtant soupçonné de mensonge Appuyant les avis qu'elle a reçus en songe, Sur Joad accusé de dangereux complots Alloit de sa colere attirer tous les flots. Je ne veux point ici vous vanter mes services. De Joad contre moi je sais les injustices; Mais il faut à l'offense opposer les bienfaits: Enfin je viens chargé de paroles de paix. Vivez, solemnisez vos fêtes sans ombrage. De votre obéissance elle ne veut qu'un gage. C'est (pour l'en détourner j'ai fait ce que j'ai pu ) • Cet enfant sans parens, qu'elle dit qu'elle a vu,

Eliacin?

JOSABET.

MATHAN.

J'en ai pour elle quelque honte.

D'un vain songe, peut-être, elle fait trop de compte; Mais vous vous déclarez ses mortels ennemis

Si cet enfant sur l'heure en mes mains n'est remis.

La Reine impatiente attend votre réponse.

JOSABET.

Et voilà de sa part la paix qu'on nous annonce!

MATHAN.

Pourriez-vous un moment douter de l'accepter? D'un peu de complaisance est-ce trop l'acheter?

JOSABET.

J'admirois si Mathan, dépouillant l'artifice,
Avoit pu de son cœur surmonter l'injustice,
Et si de tant de maux le funeste inventeur
De quelqu'ombre de bien pouvoit être l'auteur!

MATHAN.

De quoi vous plaignez-vous? Vient-on avec furie
Arracher de vos bras votre fils Zacharic?

Quel est cet autre enfant si cher à votre amour?
Ce grand attachement me surprend, à mon tour.
Est-ce un trésor pour vous si précieux, si rare?
Est-ce un libérateur que le Ciel vous prépare?
Songez-y: vos refus pourroienr me confirmer
Un bruit sourd, que déja l'on commence à semer.

[blocks in formation]

Que cet enfant vient d'illustre origine,

Qu'à quelque grand projet votre époux le destine.

JOSABET.

Et Mathan, par ce bruit qui flatte sa fureur....

MATHAN, l'interrompant.

Princesse, c'est à vous à me tirer d'erreur.

Je sais que, du mensonge implacable ennemie,
Josabet livreroit même sa propre vie
S'il falloit que sa vie à sa sincérité

Coûtât le moindre mot contre la vérité.
Du sort de cet enfant on n'a donc nulle trace?
Une profonde nuit enveloppe sa race?
Et vous-même ignorez de quels parens issu,
De quelles mains Joad en ses bras l'a reçu ?
Parlez; je vous écoute, et suis prêt de vous croire.
Au Dieu que vous servez, Princesse, rendez gloire.

JOSABET.

Méchant! c'est bien à vous d'oser ainsi nommer
Un Dieu que votre bouche enseigne à blasphemer!
Sa vérité par vous peut-elle être attestée?
Vous, malheureux! assis dans la chaire empestée
Où le mensonge regne et répand son poison?
Vous, nourri dans la fourbe et dans la trahison?

SCENE VI.

JOAD, JOSABET

Ou

[blocks in formation]

JOAD, à part.

U suis-je?... De Baal ne vois-je pas le Prêtre ?...
(A Josabet.)

Quoi! fille de David, vous parlez à ce traître?
Vous souffrez qu'il vous parle, et vous ne craignez pas

Que du fond de l'abyme entr'ouvert sous ses pas

Il ne sorte à l'instant des feux qui vous embrasent,
Ou qu'en tombant sur lui ces murs ne vous écrasent?
Que veut-il? De quel front cet ennemi de Dieu
Vient-il infecter l'air qu'on respire en ce lieu ?

MATHAN.

On reconnoît Joad à cette violence!

Toutefois, il devroit montrer plus de prudence,
Respecter une Reine, et ne pas outrager
Celui que de son ordre cile a daigné charger.

JOAD.

Hé bien, que nous fait-elle annoncer de sinistre?
Quel sera l'ordre affreux qu'apporte un tel Ministre

MATHAN.

J'ai fait à Josabet savoir sa volonté.

JOAD.

Sors done de devant moi, monstre d'impiété!
De toutes tes horreurs, va, comble la mesure.
Dieu s'apprête à te joindre à la race parjure.
Abiron et Dathan, Doeg, Achitophel;
Les chiens à qui son bras a livré Jésabel,
Attendant que sur toj sa fureur se déploie,
Déja sont à ta porte et demandent leur proie.

MATHAN, trouble.

Avant la fin du jour.... on verra qui de nous.....

(A Nabal, en prenant un chemin opposé à celul

par lequel il doit sortir.

Doit.... Mais, sortons, Nabal.

NABAL, lui montrant son chemin.

Où vous égarez-vous?

De vos sens étonnés quel désordre s'empare?
Voilà votre chemin,

(Ils sortent.)

SCENE VII.

JOAD, JOSABET.

JOSABET.

L'ORAGE se déclare.

Athalie en fureur demande Eliacin.

Déja de sa naissance et de votre dessein

On commence, Seigneur, à percer le mystere.

Peu s'en faut que Mathan ne m'ait nommé son pere.

JOAD.

Au perfide Mathan qui l'auroit révélé?

Votre trouble à Mathan n'a-t-il point trop parlé?

JOSABET.

J'ai fait ce que j'ai pu, pour m'en rendre maîtresse.
Cependant, croyez-moi, Seigneur, le péril presse.
Réservons cet enfant pour un tems plus heureux.
Tandis que les méchans déliberent entr'eux,
Avant qu'on l'environne, avant qu'on nous l'arrache,
Une seconde fois souffrez que je le cache.
Les portes, les chemins lui sont encore ouverts.

« PrécédentContinuer »