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Louis. J'ai été voir les troupes qui étaient rassemblées chez moi. Ce jour-là les autorités constituées y étaient, le département, le maire de Paris; j'avais même fait demander à l'Assemblée une députation de ses membres pour me conseiller ce que je devais faire; je vins moi-même avec ma famille au milieu d'elle.

Le président. Pourquoi avez-vous fait doubler la garde des Suisses dans les premiers jours du mois d'août ?

Louis. Toutes les autorités l'ont su, et parce que le château était menacé d'être attaqué. J'étais une autorité constituée; je devais le défendre.

Le président. Pourquoi dans la nuit du 9 au 10 août avezvous fait mander le maire de Paris?

Louis. Sur les bruits qui se répandaient.

Le président. Vous avez fait couler le sang des Français. Qu'avez-vous à répondre ?

Louis. Non, Monsieur ! ce n'est pas moi.

Le président. N'avez-vous pas autorisé Septeuil à entreprendre un commerce en grains, sucres et cafés à Hambourg et dans d'autres villes? Ce fait est prouvé par les lettres de Septeuil (1).

Louis. Je n'ai aucune connaissance de ce que vous dites là. Le président. Pourquoi avez-vous mis votre veto sur le décret concernant la formation du camp sous Paris?

Louis. La constitution me laissait la libre sanction, et dans ce temps-là j'ai demandé un camp plus près des frontières, à Soissons.

Le président. Louis, avez-vous autre chose à ajouter? Louis. Je demande copie de l'acte d'accusation et la communication des pièces, et qu'il me soit accordé un conseil pour suivre mon affaire.

(1) Septeuil, réfugié à Londres, démentit ce fait dans une lettre qu'il adressa à la Convention nationale quelques jours après l'interrogatoire. Le président. Louis, on va vous présenter les pièces qui servent à votre accusation.

Dufriche-Valazé énonce les pièces et les présente successivement à Louis XVI.

1o. Mémoire de Talon, apostillé. Interpellé de reconnaître l'apostille de son écriture, Louis répond ne pas la reconnaître. 2o. Mémoire de Laporte. - Ne le reconnaît pas.

3o. Une lettre de son écriture. - La croit de son écriture, en se réservant d'en expliquer le contenu. Il en est donné lecture. - Louis dit que ce n'est qu'un projet, que la lettre n'a pas été envoyée, et qu'elle n'a aucun rapport à la contrerévolution.

4o. Une lettre de Laporte, représentée à Louis, comme datée de sa main. - Ne reconnaît ni la lettre ni la date.

5o. Deux autres lettres du même, apostillées de la main de Louis, 3 mars et 3 avril 1791. - Ne sont point reconnues. 6°. Une autre du même. - Même réponse.

7o. Un projet de constitution signé La Fayette, suivi de neuf lignes de l'écriture de Louis. - Répond que si ces choses-là ont existé, elles ont été effacées par la constitution, et qu'il ne reconnaît ni la pièce ni son apostille.

8°. Une lettre de Laporte du 23 février 1791 et deux autres du même des 16 et 19 avril même année, toutes trois apostillées de la main de Louis. - Répond ne pas les reconnaître. 9o. Une pièce sans signature contenant un état de dépenses. Avant d'interpeller Louis sur cette pièce, le président lui fait la question suivante:

Avez-vous fait construire dans une des murailles du château des Tuileries une armoire fermée d'une porte de fer, et y avez-vous renfermé des papiers ?

Louis. Je n'en ai aucune connaissance ni de la pièce sans signature.

10°. Une autre pièce de la même nature, apostillée de la main de Louis, Talon et Sainte-Foix. reconnaître.

Déclare ne pas la

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11°. Une troisième pièce de même nature - Ne la reconnaît pas davantage.

12°. Un registre-journal de la main de Louis, intitulé: Pensions ou gratifications accordées sur la cassette.

Louis. Je reconnais celui-ci: ce sont des charités que j'ai faites.

13o. Un état de la compagnie écossaise des gardes-du-corps. - Louis reconnaît cette pièce, et déclare que c'est avant qu'il eût défendu de continuer leur traitement, et que ceux qui étaient absens ne le touchaient pás.

14. Un état de la compagnie de Noailles pour servir au paiment des traitemens conservés, signé Louis et Laporte. Même pièce que la précédente, même réponse.

15o. Un état de la compagnie de Grammont.

16o. Un état de la compagnie de Luxembourg. - Ces deux états sont les mêmes que les trois autres.

Le président. Où avez-vous déposé ces pièces que vous reconnaissez?

Louis. Ces pièces devaient être chez mon trésorier.

17°. Une pièce concernant les cent-suisses. - 18o. Une pièce signée Niou, greffier. - 19°. Un mémoire signé Couvay. 20°. Une copie certifiée d'un original, déposé au département de l'Ardèche le 14 juillet 1792. -21°. Lettre sans adresse, relative au camp de Jalès. - 22o. Une copie conforme à l'original, déposé au département de l'Ardèche. - 23o. Une copie conforme à l'original des pouvoirs donnés à Du Saillant. 24°. Une copie d'instructions et pouvoirs donnés à M. Convay, par les frères du roi. - 25°. Autre copie d'original, déposé. 26°. Une lettre de Bouillé portant compte des neuf cent mille livres reçues de Louis. - 27°. Une liasse contenant cinq pièces trouvées dans le porte-feuille de Septeuil, deux portant des bons signés Louis; et des reçus de Bonnières, les autres étant des billets. - 28°. Une liasse des huit pièces, mandats signés Louis au profit de Rochefort. - 29°. Un billet de Laporte sans signature. - 30°. Une liasse contenant deux pièces relatives à un don fait à madame de Polignac, à M. de La Vauguyon, Louis déclare n'avoir aucune connaissance de ces pièces. 31°. Un billet signé des frères du roi. Louis déclare ne reconnaître ni l'écriture ni la signature.

329. Une lettre de Toulongeon aux frères du roi. 33°. Une liasse relative à Choiseul-Gouffier et à ses agens. Louis déclare n'en avoir aucune connaissance.

1. 34°. Une lettre de Louis à l'évêque de Clermont. - La signature et l'écriture ne sont pas reconnues. Louis fait observer que bien des gens avaient des cachets aux armes de France. 35o. Une copie signée Desniés : un bordereau du paiement de la garde du roi, signé Desniés, commissaire.

36°. Une liasse contenant les sommes payées à Gilles, pour

une compagnie de soixante hommes.

37°. Une pièce relative aux pensions.

38°. Une lettre de Dufresne de Saint-Léon.

39°. Un imprimé contre les jacobins.

Louis déclare ne reconnaître aucune de ces pièces (1).

Le président. Louis, la Convention nationale vous permet de vous retirer.

Louis se retire dans la salle des conférences. Sur la motion de Kersaint, la Convention décrète immédiatement que le commandant-général de la garde nationale parisienne reconduira sur-le-champ Louis Capet au Temple.

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Rapport fait au nom du comité de salut public sur la journée du 31 mai et les événemens qui en ont été la suite, par Barrère.

Séance du 6 juin 1793.

Citoyens, le mouvement qui s'est fait à Paris, le 31 mai, n'était pas digne du regard du législateur révolutionnaire : la morale pu

(1) Les pièces du procès communiquées ensuite à Louis XVI sont beaucoup plus nombreuses. Leur recueil forme 4 volumes in-8.

blique n'avait pas à pleurer sur ses effets. La protection spéciale donnée aux personnes et aux propriètés au sein de l'anarchie, a moralisé en quelque sorte ce premier mouvement dans lequel les patriotes ont vu deux motifs : le premier, la nécessité de faire taire dans l'Assemblée des représentans la voix discordante de tous les partis, pour ne faire entendre que la voix de la patrie déchirée et malheureuse; le second de faire cesser le système qui tendait à séparer d'opinion une grande cité dépositaire des pouvoirs nationaux, et les autres départemens de la république.

Mais qui oserait apprécier encore les suites de ce mouvement?

Qui est-ce qui parmi nous en connaît les rapports secrets et les motifs réels? Je dirai seulement que les faits inopinés d'un jour trop mémorable ont affligé le cœur des hommes libres, sans les avoir découragés ni ébranlés. A la hauteur où la raison a placé le peuple français, il jugera sainement les objets ; il distinguera bien ce qui est national de ce qui appartient aux passions particulières : il ne confondra pas ce qui est révolutionnaire avec les projets sinistres qu'on peut couvrir de ce mot imposant.

C'est en vain qu'on voudrait donner le change à l'opinion publique dans tous les partis! Les députés du peuple assureront le triomphe de la république au milieu de ces oscillations forcées : ils ont été calmes dans un moment difficile; leur vertu généreuse et tranquille a conjuré l'orage; et ce calme est le signe assuré de leur courage et la caution de leurs succès.

Le comité de salut public a présenté à l'Assemblée une proclamation le 1er juin; il a la conscience intime qu'il a publié dans ce premier moment la vérité. Son silence, depuis cette époque, a dû être entendu par vous et par la nation entière. La journée du 2 juin a fait sur quelques esprits, et peut avoir fait sur des citoyens éloignés, une impression dont votre fermeté ne doit pas craindre les suites; mais il faut du moins les prévenir : là où les amis ardens de la liberté n'ont vu qu'une

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