SOCIÉTÉ DES AMIS DES ARTS. CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES: C'est le 17 décembre que la Société des Amis des Arts ouvre au public sa troisième exposition artistique. Avec cette année expire l'engagement des sociétaires. En contracteront-ils un nouveau? C'est là une grande question, une question vitale! Les arts et les artistes de la province y sont trop vivement intéressés pour que nous ne l'examinions pas avec tout l'intérêt, tout l'amour que nous portons aux uns et aux autres. Voyons donc quels enseignements les trois années écoulées ont amenés avec elles. Demandons à la Société des Amis des Arts quels résultats elle a retirés de la marche qu'elle a cru devoir suivre, quels encouragements ont reçu nos artistes et ce qu'il reste pour notre ville de cette triennale exposition. Populariser l'art, accoutumer la foule à prendre du goût aux productions de l'artiste, la forcer en quelque sorte à s'en occuper, c'est quelque chose sans doute, el ce quelque chose, on l'a obtenu, mais ce n'est point assez. Il y avait d'autres résultats et de bien plus grands à conquérir. La Commission exécutive, dont nous ne mettons pas en doute les bonnes intentions, ne nous semble pas avoir compris assez largement la mission dont elle était chargée. Elle a visé plutôt à satisfaire les souscripteurs, en multipliant pour eux les chances de gain par l'acquisition de nombreux tableautins, qu'elle n'a cherché à pousser les artistes dans une bonne voie, à leur faire entreprendre de consciencieux travaux, et produire enfin des œuvres de quelque dimension et de quelque valeur. De petites pochades, de petits tableaux de genre bien finis, bien léchés, ne restent pas loug-temps sur le chevalet, ils trouvent toujours des acquéreurs; mais ce sont les grandes toiles, les études sérieuses et larges devant lesquelles reculent nos artistes, assurés qu'ils sont d'avance de perdre les fruits d'un long labeur. C'est ainsi qu'on eut réellement servi l'art, c'est ainsi qu'on eut encouragé ceux qui le cultivent avec conscience el amour. Et puis, pourquoi tant de démarches obséquieuses auprès de nos peintres de la capitale, ces hauts et fiers suzerains qui ont l'air de nous faire l'aumône, en nous vendant fort cher ce qu'ils n'ont pu placer à Paris ou ailleurs! On devait appeler tout le monde, mais ne solliciter personne. La province doit ouvrir avant tout son exposition aux productions de ses artistes, si non, elle manque à son but, à son esprit, à sa fondation. La Société des Amis des Arts est établie sur des bases trop étroites, des intérêts trop personnels et partant trop mesquins pour avoir en elle une longue vie et produire des fruits qui durent. Au lieu de la faire reposer sur l'égoisme, le gain de quelques tableaux, il fallait lui donner un généreux mobile, solliciter les souscriptions non point par l'appât éventuel de lots plus ou moins nombreux, mais par une noble pensée artis .... tique, par un but large et fécond en résultats Il fallait avoir en vue les intérêts de l'art et non pas les intérêts des souscripteurs. Au lieu de disséminer par la voie du sort les objets acquis des deniers de la Société, au lieu de les voir perdus pour tous au profit d'un seul, il aurait fallu de tous ces tableaux former un musée lyonnais qui serait ainsi devenue l'œuvre honorable des citoyens les plus dévoués et les plus éclairés. C'eut été un beau monument pour notre cité, une galerie d'études pour nos artistes et un objet de curiosité pour les étrangers. Ainsi il fallait amener les Sociétaires à faire abnégation de tout intérêt privé devant un intérêt géné ral, à laisser là tout sentiment d'égoïsme pour accomplir une œuvre profitable à tous, une œuvre digne et grande. C'était, pour le plus grand nombre, il est vrai, une éducation à former, une croisade artistique à prêcher. La chose valait la peine d'être essayée. Nous aurions aujourd'hui une intéressante collection que chaque année aurait accrue de nouvelles richesses. De nos trois expositions que restera-t-il? Rien. Et pourtant avec cette association que de choses ne pouvait-on pas féconder! Pourquoi ne pas avoir appelé tous nos artistes, groupé tous ceux qui savent écrire, distribué le travail à chacun et laissé un beau livre, l'Album du Lyonnais, ce pittoresque pays si riche et si peu connu. Mais non..... On n'aura servi ni les intérêts des artistes, ni la cause de l'art, et l'on aura mécontenté et découragé ceux des sociétaires qui n'avaient souscrit que dans l'espoir d'un placement avantageux de leurs fonds, c'est-à-dire, la perspective d'un chef-d'œuvre pour 150 francs. Léon BOITEL. Beaux Arts. UNE STATUE PAR M. DE RUOLZ. M. de Ruolz a mis dernièrement à découvert, dans l'église d'Ainay, la statue à laquelle il travaillait depuis plusieurs mois, avec cette conscience et cet amour d'artiste qui le caractérisent. Ce jeune sculpteur, notre compatriote, est de ces hommes rares qui, dans la silence de l'étude, s'élèvent lentement le piédestal sur lequel ils poseront un jour. Son ouvrage est la grande figure de Christ donnant la bénédiction de la main droite et de la main gauche tenant le globe surmonté d'une croix. Cette statue en marbre, de 5 pieds 6 pouces, est composée dans le style moyen âge avec des ornementations dorées pour s'harmoniser avec l'architecture du monument. Le sculpteur y a mis toute la correction possible. Il y a une grande douceur et une grande dignité d'expression, de la simplicité dans la pose et du large dans la draperie; malheureusement la lumière manque, et la statue n'est éclairée que par reflet. - Il faut louer le sculpteur d'avoir eu l'idée de la travailler sur place et de régler ses effets sur le jour, sur l'entourage et sur la hauteur de la niche; toutes ces circonstances ont dù modifier le faire et le travail. Placée dans la chapelle de St-Martin, cette statue a été inaugurée, le jour de la fête de ce saint; elle porte ces paroles: venite ad me; ce texte a déterminé non seulement l'expression du visage, mais encore toute la composition. Bibliographie Lyonnaise. RAPPORT SUR LE RÉGLEMENT GÉNÉRAL DES PRISONS DE LYON, par M. L. BONNARDET; Lyon, imp. de L. Boitel.-1838. C'est quelque chose de bien remarquable que la manière dont la société procède à ses améliorations. Dans tous les temps et surtout dans notre siècle, l'homme, forcé d'obéir à un instinct invincible de charité, a créé, tantôt par l'inspiration du christianisme, tantôt sous la puissance des idées philosophiques, un nombre immense d'institutions destinées à soulager les douleurs ou à corriger les vices de l'humanité. La pitié ingénieuse apparaît, et sous toutes les formes et avec une infa.. tigable activité, presque partout où il y a une plaie à penser, une larme à sécher. Pourquoi donc tant de nobles et touchants dévouements restent-ils inutiles, pourquoi les misères humaines, en dépit même de ses efforts, semblent-elles s'accroître et se multiplier ? C'est que la société n'a songé à corriger la perversité que lorsqu'elle s'est sentie blessée; à soulager les douleurs, que lorsque le cri de détresse est arrivé jusqu'à elle. Le secours n'est venu qu'après la chûte, le remède qu'après |