laborieuse était l'enfance des jeunes Perses. Les plus anciennes législations grecques et romaines entraient à cet égard en des détails qui choqueraient la délicatesse moderne. Sous l'empire même des idées plus douces du Christianisme, on a toujours regardé l'éducation comme l'initiation à une vie de souffrance et de sacrifice. Les hommes les plus éminents, de grands et bons princes, d'illustres écrivains, de vaillants guerriers et des politiques fameux ont été le résultat du système d'éducation un peu sévère de nos aïeux. Je ne prétends pas me constituer le défenseur de ce système; mais je n'oserais dire que nous ayons acquis le droit de nous en moquer. Certes, Messieurs, il faut supposer pourtant qu'il y avait là quelque chose de noble et de fort pour avoir produit un si grand nombre d'hommes remarquables. Alors, sans doute, l'autorité du père et du maître était sévère, l'éducation exigeante, la discipline rigoureuse et quelquefois dure à subir. Mais pour sortir de ces formes austères, notre époque n'a-telle pas donné dans un extrême opposé? Le laisser-aller de l'éducation moderne, ses caresses excessives, le soin minutieux qu'elle met à tout aplanir sous les pas de l'enfant, ne doivent-ils pas énerver sa vigueur morale! Voyez la nouvelle génération : vous y remarquerez de l'élan, de la spontanéité, quelque chose de brillant dans l'imagination, un premier jet magnifique, mais pas assez d'énergie et de profondeur. Les plus nobles caractères se déinentent, les natures qui promettaient le plus s'affaissent tout-à-coup. Il manque là ce qui fait persévérer, les grandes choses, le dévoûment, l'esprit de sacrifice, ces habitudes premières d'une vie forte et endurante qui donnent à la volonté tant de tenacité et de ressort. Un fait nous a toujours frappés, Messieurs. Les maisons où nous fûmes jadis élevés, étaient, nous le croyons, inférieures à celle-ci, pour le soin minutieux des méthodes, et les moyens d'émulation. Cependant on y travaillait avec ardeur, et, à force de persévérance, on arrivait au progrès. Quelle était la cause de ce travail opiniâtre et constant? C'est que les élèves qui se trouvaient là, appartenant à une classe peu aisée de la société, avaient traversé une enfance rude et labo rieuse, c'est qu'ils s'étaient endurcis à l'école de la pauvreté. Ici, au contraire, je n'aperçois que d'heureux enfants à qui tout a souri dans la maison paternelle, et qui, jusque-là, ont joui de la vie comme d'une fête. Ces enfants, je le dis avec bonheur, nous sont donnés purs, candides, affectueux. Pourquoi, dès leurs premiers pas dans la carrière des études, avons-nous à combattre en eux un penchant détestable qui ternit toutes ces aimables qualités? La paresse, cette rouille de l'ame, oppose à tous nos efforts, à tous nos moyens un obstacle que nous ne surmontons pas toujours: et ces jeunes plantes qui promettent un si beau développement de fleurs et de fruits, se dessèchent trop souvent ou s'étiolent sans sève et sans vigueur. Je ne sais quoi d'infécond et de misérable plane sur la mollesse des habitudes et sur le bien-être de la vie! On dirait l'anathème évangélique : Malheur à vous qui avez votre consolation en ce monde, et il semble que le royaume de l'intelligence souffre violence comme celui du ciel. >>> LA ROBE ROUGE par M. ANTONY RENAL, 2 vol. in 8°. A Paris, La littérature de notre époque, si féconde et si riche malgré la foule de médiocrités qui l'assiège, marche constamment au même but, en faisant la satire de ce que nos mœurs ont retenujdes temps de barbarie. Ainsi, par exemple, nous avons tous frémi d'horreur à la vue des bourreaux transportés sur la scène; le théâtre nous en a représentés sous toutes les formes et tous ont été stigmatisés par le dégoût profond, qu'inspire à toute âme honnête la pensée seule de l'être assez dégradé pour tuer. sans haine et seulement pour accomplir la tâche imposée par un atroce métier. Du sang pour de l'or! Mais, après tout, le bourreau n'est qu'un instrument ignoble, jugé et flétri par la répulsion générale et quoiqu'il y ait une grande leçon philosophique par le fait de cette répulsion de la masse contre un homme dont la loi a besoin, nous avons compris que frapper l'instrument n'était point anéantir la cause qui le faisait agir. Notre siècle essentiellement logique sent le besoin de recourir à la source du mal; ainsi, abandonnant le bourreau qui tue, on remonte au juge qui condamne; cette pensée nous semble avoir inspiré le livre dont nous avons à rendre compte. L'auteur, M. Antony Rénal, plein d'une sainte et noble indignation, traduit à la barre de l'humanité un juge des cours prévotales et nous ramène au souvenir de 1816, à cette époque où notre ville surtout fut témoin d'une rigueur déplorable, et gémit d'une seule voix sur le martyre de pauvres adolescents que les larmes et le désespoir sans nom de malheureuses mères ne purent arracher à l'échafaud. M. Antony Rénal, dans la Robe rouge, nous peint un des présidents de cours prévôtales qu'égara cruellement un royalisme effréné, et qui envoya sans pitié des têtes innocentes rouler sur l'échafaud. L'auteur a rendu ce personnage fort dramatique par le remords dont il est assiégé. A côté de cet homme de sang est posée une gracieuse figure de jeune fille, suave de bonté et d'amour; elle est aimée du jeune peintre Arnold, le héros du roman de M. Antony Rénal. C'est un artiste de talent, à l'ame dorée, nous dit l'auteur, à l'imagination échevelée, à l'ame de poèle. Faire l'analyse de cet ouvrage nous entraînerait trop loin; d'ailleurs nous ne voulons pas enlever au lecteur l'intérêt puissant et dramatique de cette composition en lui narrant d'avance l'action et le dénouement mais nous dirons que la Robe rouge est le livre le plus complet et le plus saillant de l'auteur; le style abonde en figures poétiques et il a souvent de la verve. Il faut avouer cependant que M. Antony Rénal abuse parfois de la description, et pousse trop loin le luxe des épithètes, c'est un reproche que nous nous permettrons de lui adresser. Par exemple, lorsqu'une de ses héroïnes s'évanouit, captivés que nous sommes par l'intérêt de la situation, nous ne songerions nullement à lui demander de quelle forme était le fauteuil dans lequel elle est tombée. Mais M. Antony Rénal, qui n'oublie rien, a le soin de nous dire que c'est dans un fauteuil gothique incrusté de nacre et d'or, et une autre fois, sur un tapis à rosaces de granit orné d'arabesques. Nous lui conseillons d'être à l'avenir un peu plus sobre de descriptions dans les moments pathétiques. Nous adresserons encore un reproche à M. Antony Rénal, c'est de faire lire devant une jeune fille une histoire dont le fond est moral, il est vrai, mais dont la forme et les détails ne peuvent être entendus sans inconvenance par de jeunes et chastes oreilles, comme doivent l'être celles de son Eveline. Du reste, la chronique que nous venons de signaler est palpitante d'intérêt. C'est un de ces drames où le paroxisme de la passion est poussé jusqu'à la rage. Le crime, la fureur jalouse, la vengeance, rien ne manque à cette œuvre que voudront lire tous les lecteurs avides d'émotions. Nous prédisons à M. Antony Rénal un succès certain dans le genre qu'il a entrepris d'exploiter. Mme Louise MAIGNAUD. RÉGLE DE FOI. Commonitoire de Vincent de Lerins, précédé d'un tableaur des hérésies, par M. l'abbé PavY; Lyon, Perisse, in-12, 1838. Le livre de Vincent de Lerins est un des plus solides et des plus éloquents ouvrages que le christianisme ait enfantés au Ve siècle Le prêtre Vincent oppose une ferme barrière à l'envahissement des innovations en matière de foi, et combat l'erreur avec de puissantes armes ! La version de M. l'abbé Pavy devra populariser ce livre, traduit déjà par deux de nos compatriotes. Le tableau qui précède le Comтоnitoire est un aperçu historique sur les hérésies. Nous trouvons dans le Voltaire de M. Beuchot, tom. LX, pag. 355, des vers qui pourraient servir d'épigraphe au livre de M. l'abbé Pavy: ...... On compterait les braves de la France, Les pachas étranglés par l'ordre des sultans, M.-J. CHÉNIER, Discours sur la question : DU MÉDECIN DE CAMPAGNE ET DE SES MALADES, mœurs et science par le docteur MUNARET, chez Mme Durval, à Lyon. - 2 vol. in-8°. Un de nos compatriotes, M. le docteur Munaret, a mis à profit le séjour qu'il a fait et la pratique qu'il a exercée dans nos campagnes, et vient de publier deux volumes pleins d'observations curieuses et de détails intéressants pour la science. Le peuple de nos hameaux est encore sous le poids de nombreux préjugés, et le médecin consciencieux a souvent à lutter contre l'empirisme et l'ignorance pour disputer un malade à la mort. M. Munaret, par cette publication, a rendu service à la société, et éclairé, sur plusieurs points, la médecine pratique de nos campagnes. Nous reviendrons sur ce livre. DES FÊTES DES ANCIENS ET EN PARTICULIER DE CELLES DES HÉBREUX, grand in-8°; imp. de L. Perrin, 1858. Cette brochure de M. Nolhac, auteur des Etudes sur Isaïe et sur les psaumes, se rattache d'assez près à ces deux ouvrages, et accuse de savantes et laborieuses recherches. Elle a été lue à l'académie de Lyon. Notre compatriote, M. Bignan, vient de publier à Paris, chez Delaunay, 1 vol. in-8o, intitulé Essai sur l'influence morale de la poésie. Nous en parlerons. HISTOIRE DE FRANCE, PENDANT LA DERNIÈRE ANNÉE DE LA RESTAURATION, par un ancien magistrat; Paris et Lyon, 2 vol. in-8°. Nous parlerons de ce nouveau travail de M. Boullée. C'est un livre qui mérite d'être étudié avec soin, et que l'on dit fort impartial, dans une question où il était si difficile de l'être. |