A l'Histoire, à la Philosophie, aux Sciences, à la Littérature Rédigé par MM. CHÉZY, - COQUEBERT DE MONTBRET, - - CHEZ DONDEY-DUPRÉ PÈRE ET FILS, Imp.-Libraires, Propriétaires du Journal Asiatique, 1823. JOURNAL ASIATIQUE. Sur quelques Antiquités trouvées en Sibérie, Par M. KLAPROTH. LES trois feuilles de dessins que j'ai l'honneur de communiquer à la Société Asiatique, représentent des antiquités trouvées dans la partie la plus méridionale de la Sibérie, située entre les fleuves Ob et Ieniseï. Les objets figurés sur les deux premières sont en bronze, et on les a tirés, en grande partie, d'anciens tombeaux, qui sont dans le voisinage d'Abakansk, sur la droite du Ieniseï supérieur. Le morceau qui représente un guerrier se débattant contre un monstre prêt à le dévorer, est d'un travail fini et ne manque pas de goût. Les deux grandes clochettes en bronze sont montées par le musimon, espèce de bouquetin très-commun dans les montagnes de Saïansk (1). (1) Cet animal singulier est appelé par Linné capra ammon, et par les Russes kamennyi baran, ou mouton des rochers. Les Mongols nomment le mâle oukhaldsa, et la femelle arkhali; en mandchou le premier porte le nom d'ougaldja, et la seconde celui d'arkhouli. C'est le phan yang des Chinois. Cependant ce qui doit fixer particulièrement notre attention, ce sont les deux colonnes en pierre chargées d'inscriptions inconnues. Le premier de ces monumens a déjà été publié par Strahlenberg, dans son livre allemand intitulé Das Nord und Oestliche Theil von Europa und Asia, tab. 5; mais les caractères y paraissent défigurés et incomplets. La copie que je présente a été faite d'après le dessin original du peintre Lursenius, qui accompagna le célèbre G. F. Muller dans ses voyages en Sibérie. Je la tiens de la bonté de feu M. le comte J. Potocki. Ce monument, qui a été aussi vu par Messerschmidt, se trouvait sur une petite colline près de la rivière Bée ou Biya, à la droite de l'Ouibat, qui lui-même tombe dans la gauche de l'Abakan du Ieniseï. t La seconde colonne (1) montre d'un côté une figure humaine, et sur le dos une inscription plus ample et mieux conservée que celle de la première. Elle se trouve dans le voisinage de la rivière Ouibat, et elle est également posée sur une petite élévation de terre. Les caractères sont de la même espèce que ceux de l'autre, et d'une semblable statue (2), dont Strahlenberg nous a laissé une copie dans sa 12o. planche. On voyait cette dernière sur une colline située au nordouest d'Abakansk, entre les rivières Ktiéch ou Tes, et Garba ou Elbat, qui toutes les deux tombent dans la gauche du Ieniseï. (1) Voyez la planche. Fig. I. (2) Voyez la planche. Fig. II. On s'est contenté de reproduire les seuls dessins qui présentent des inscriptions. De semblables inscriptions se trouvent fréquemment dans la Sibérie méridionale, comme on peut en juger par celles que l'illustre Pallas a données dans le cinquième volume de ses Nordische Beitraege, et par les pitoyables copies de M. Spaski, publiées dernièrement à St.-Pétersbourg. En examinant les caractères de ces inscriptions, on ne peut pas se dissimuler qu'ils ont plutôt un air européen qu'asiatique. On y reconnaît facilement plusieurs lettres grecques et esclavonnes. Cependant on ne peut pas raisonnablement conclure pour cela que ces inscriptions soient postérieures à la conquête de la Sibérie par les Russes; car celles publiées par Pallas se trouvent sur les pierres sépulcrales des anciens habitans du pays, et les autres sur des colonnes ou statues qui, sans doute, ont servi à un culte religieux. D'ailleurs, ces mêmes statues ressemblent beaucoup à celles qu'on voit assez fréquemment dans les vastes plaines situées au nord du Caucase, entre la mer Noire et la mer Caspienne, et qui sont les seuls monumens que les Comans et autres peuples turcs nous ont laissés de leur séjour dans ces contrées. Quand les Russes poussèrent leurs conquêtes audelà de l'Ob et du Ieniseï, le versant septentrional du petit Altaï et de la haute chaîne des montagnes de Saïansk, et tout le pays entre les parties supérieures des fleuves et rivières qui y prennent leur origine, étaient habités par les Kirghiz orientaux (1), qu'on (1) Ces Kirghiz se trouvent actuellement sous la domination chi |