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fçais où, & qu'en mourant, il fit jurer à fon fils d'aller chercher au Pérou un de ses fils, qu'on lui avoit enlevé au berceau, & dont il n'avoit point eu de nouvelles depuis quinze ans. Commiffion affez difficile à exécuter; car fi Pizarre, maître du Pérou, n'avoit pu rien découvrir lorfque le raft étoit encore récent, comment étoit-il poffible que fon fils quinze ans après, fût plus heureux, dans fes recherches? Cependant le fils de Pizarre s'embarque pour le Pérou : jetté par la tempete fur une côte déferte, il échappe feul à la mort..

A quoi penfez-vous, Monfieur que s'occupe ce malheureux, expofe à mourir de faim ou à fervir de pâture aux bêtes féroces? couvert d'un épais feuillage , il examine les traits d'un habitant des bois, & ceux d'une beauté touchante qui l'accompagne ;il s'amufe à contempler les jeux de ces deux amans; & ce qui eft le comble du ridicule, il devient amoureux; enfin,' il a la patience de refter un mois entier dans fon embuscade en vrai Héros de roman, fans boire ni manger fe nourriffant de la vue fucculente de

la dame de fes penfées: un trouble impérieux le fait enfin fortir du bois, après un mois de jeune. Il apprend qu'Azelie la maîtreffe, va fe marier avec Zeliskar: il n'a aucun moyen d'empêcher le mariage; il eft feul, dénué de tout, mourant de faim : vous croyez peut-être que l'Auteur ne pourra pas continuer fa pièce; vous ne connoiffez pas toutes les reffources de fon art; d'un coup de baguette il excite une tempête. Des vaiffeaux Efpagnols font jettés fur la côte, Voilà, comme vous voyez, du renfort qui arrive fortà propos; & Pizarre fe voit en état de difputer Axelie à Zeliskar. Cependant pour faire les choses honnêtement, il la demande d'abord à fa mère, lui promettant tous les trônes du Pérou: Zuma refule; Pizarre veut faire enlever la fille par fes foldats; rien ne lui eft plus facile: cependant les prières & les menaces de Zuma lui en impofent; mais la véri table raison qui s'oppofe à l'enlèvement, c'eft que s'il prenoit ce parti, la pièce feroit finie au fecond acte.

Cependant il fe ravise dans l'entr'acte, & au commencement du

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troifième, les plaintes de Zuma apprennent au spectateur qu'Azelie est au pouvoir de Pizarre; s'il étoit un peu conféquent il s'embarqueroit fur le champ avec fa proye, mais le Poëte a toujours befoin de lui; on voit donc le raviffeur venir demander à Zuma un confentement dont il n'a pas befoin; il y a enfuite un combat. des Péruviens contre les Efpagnols, dans lequel Azelie. eft délivrée; mais Zuma eft à fon tour enlevée par les Efpagnols, & Pizarre menace de la faire égorger, fi on ne lui rend Azelie. Coup de théâtre bien ufé, après celui de Gustave & d'Hypermneftre: Azelie voyant le fer levé fur le fein de fa mère, fe jette, pour la délivrer, dans les bras de Pizarre: Zeliskar appelle fon rival en duel; mais fur le point de fe battre, ils font arrêtés par le foupçon qu'on leur fait naître qu'ils pourroient bien être frères : ce foupçon s'éclaircit au cinquième acte, La fcène de la reconnoiffance eft la meilleure de la pièce : feulement on eft choqué de la gafconade de Zeliskar, qui dit à Pizarre, contre toute vrais femblance:

PI

Si je difois un mot au moindre de mes cris Je t'envelopperois d'un torrent d'ennemis,

On eft tenté de rire lorfque le même Zeliskar, après plufieurs efforts inutiles pour le faifir de l'épée de Pizarre, dans le deffein de s'en pereer, s'écrie: Traître, aurois-je perdu jufqu'au droit de moûrir?

Il ne l'a point perdu ce droit, mais pour mourir il n'a befoin ni de l'épée ni du confentement de Pizarre.

Pizarre eft à peine reconcilié avec fon frère, qu'il eft percé dans la couliffe d'un coup de flèche par Zuma, & vient mourir fur le Théâtre avec un grand regret de ses crimes.

Le ftyle de la pièce repond à l'extravagance du plan par-tout des idées fauffes, des fentimens forcés & gigantefques, des métaphores & des hyperboles infenfees, par-tout de la bouffiffure & du galimathias, une verfification obfcure, négligée, incorrecte! en voici des exemples.com ch Pai régné du Pérou fous mon obéiffance Un peuple heureux par ·moi cultivoit l'abong dance,

11 en eft un pourtant qu'excepte ma clé

mence,

Qui m'eut fait un bonheur d'affouvir ma vengeance.

Cette nouvelle ami,qui diffipe mes craintes, Tourne er fin mes fecours du côté de vos plaintes

Punis-moi tu le e peux: mais crains de me répondre

D'un aveu que ma haine employe à me con

..fondre

Lui fur qui mon horreur

A de tous fes transports réuni la fureur. Une horreur qui réunit la fureur de fes transports, Quel jargon barbare! Mais mon rival fur moi prendroit trop d'avantage

S'il fçavoit dans quels nauds notre fang nous engage.

Que mon fang répandu par tes mains inhu

maines,

S'élève pour jamais entre Azelie & toi, Elle avouera ce cœur digne en tout de fa

foi

Qui

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