C'est ce qui vous désole. Des couplets francs & gais, comme ceux-là, ne valent-ils pas cent fois mieux, Monfieur, que ces belles Ariettes qui ne difent rien, & qui ne fervent qu'à faire briller la voix de quelque Cantatrice? L'impatience du Bijoutier eft fort plaifante; il raconte auffi ou plutôt il chante très-plaifamment, la manière dont le Chevalier le remet chaque jour. La découverte qu'il fait du Chevalier, fa fcène avec lui, fon entrevue avec l'Horloger, tout cela eft fort gai, fur-tout à la représentation. Je vous ai parlé, Monfieur, de la gaieté de l'oncle. En voici un échantillon: Oui, ma jeunesse à mes yeux eft préfente. J'avois des torts, mais ils étoient charmans. On les punit chez qui n'a que vingt ans Et l'on voudroit les avoir à foixante. Mais du préfent il faut qu'on fe contente: Qui fçait jouir, eft heureux en tout temps. Quand on eft trifte, on eft vieux à vingt ans, Quand on eft gai, l'on eft jeune à soixante. C'est encore une fcène fort agréable que celle où l'on veut faire paffer le Bijoutier pour un Médecin; l'oncle lui demande quelle étoit la maladie du Chevalier: Mathieu, fort embarraffé, répond: Sa maladie, en vérité, Eft celle auffi de bien du monde, Ceci me rappelle, Monfieur, une petite fcène fort gaie qui ouvre le fecond acte, entre Dubois & Marton. MARTON. Malgré le cas que vous en faites, Dubois je n'aime pas les Dettes: DUBOIS. Je n'aime pas la faculté. MARTON, Choifir entr'elles, c'eft fottife : DUBOIS, J'aimerois mieux, quoiqu'on en dife, L'un vous ordonne. MARTON. L'autre prie DUBOIS. Tous deux vous excèdent fouventa Mais l'un peur vous ôter la vie, MARTON, Que n'est-il un pays fur terre DUBOIS. Que n'eft-il un pays, ma chère; Bien que cette fcène roule fur un fujet très-mince, & ne foit pas trèsbien amenée, elle eft gaie & naturelle: que faut-il davantage? Le vaudeville qui termine la pièce mérite le même éloge; & le public a fort bien reçu le dernier couplet qui lui étoit adreffé. Bien des gens ont mis à la mode L'heureux talent de s'endetter, Vous voyez, Monfieur, que cette petite Comédie gagne beaucoup à être détaillée, encore ces couplets font-ils faits pour être chantés; la Mufique en eft fort agréable, & fait honneur aux talens déjà connus de M. Champein. Cependant, fi je l'ofe dire, je trouve que la Mufique fait plus de tort que de bien à cet Ouvrage. La gaieté & les intentions comiques de M, Forgeot feroient plus à leur aife dans une fimple Comédie. Il y a là deux fituations qui auroient fait la fortune d'une jolie petite Comédie Françoife. Un acte en vers, dialogué facilement, comme ceux de M. Forgeot, auroit fait plus d'effet encore, & auroit foutenu au Théâtre François la réputation que lui ont acquife les Rivaux Amis & les Epreuves! I Je fuis &c. |