INTRODUCTION La carrière de Desaix, qui s'était ouverte, on vient de le voir, par les plus vifs éclairs de vaillance et d'intelligence militaire, devait se terminer, comme on sait, par le coup de tonnerre de Marengo. La mémorable victoire, que décida son impétueuse intervention, sauva le Premier Consul, et, avec lui, la grandeur, probablement même l'intégralité territoriale de la France. Mais il est une autre victoire qui, jadis, dans un jour non moins fameux, sauva aussi la France et le plus illustre de ses rois : on a nommé Denain. Sans prétendre agrandir outre mesure la réputation et le rôle de l'illustre lieutenant de Bonaparte, il n'en est pas moins vrai que Marengo et Denain ont pesé l'un et l'autre d'un poids énorme dans la balance de nos destinées. Si l'on considère que Desaix s'était passionné pour Villars en lisant assidûment l'histoire de sa vie, on comprendra que le rapprochement de ces deux héros venait, comme de lui-même, s'offrir à l'histoire. On pourrait même dire qu'il s'impose, si du moins l'on s'attache à saisir plus complètement dans leur suite et leurs péripéties les campagnes de la République sur le Rhin, où le défenseur de Kehl devait retrouver, en les cherchant sans doute du regard, les traces du vainqueur de Fribourg. Nos Guerres sur le Rhin avant la Révolution VILLARS Avant de terminer sur l'Escaut, le 24 juillet 1713, par le coup de tonnerre de Denain, la guerre de la succession d'Espagne, Villars en avait été le héros sur le Rhin et sur le Danube. On le rencontre là à chaque pas. Il remplit presque de son nom seul l'est de la France et tout le midi de l'Allemagne ; il accomplit des prodiges d'activité et de valeur en même temps que des merveilles de stratégie et de tactique; il devance, digne successeur de Turenne, la grandeur de desseins et la netteté de vues du génie de Napoléon; s'il eût été libre d'agir, s'il n'eût pas été contraint et mal servi par un ministre de la guerre incapable, si on ne l'avait pas accolé à un auxiliaire maladroit, insouciant et versatile, il marchait sans hésiter sur Vienne et ruinait dans sa source la puissance que nous combattions. Que n'eût-il pas fait surtout, si ce fou couronné, Charles XII, avait eu un éclair de bon sens, et, de la Saxe dont il était en possession, fût venu se joindre à nous? Villars, du moins, après avoir appris au prince Eugène, l'implacable ennemi de notre pays, qu'un autre que Vendôme était capable de le vaincre aussi, eut l'hon neur insigne d'abattre sous les murs de Fribourg c pouvait lui rester d'orgueil et de l'amener, irrité soumis, dans le château même du margrave de Ba Rastadt, convenir avec lui de la paix refusée à Utr et nous reconnaître enfin pour les maîtres inconteste l'Alsace. A suivre les opérations de Villars sur notre frontièr Rhin pendant les années 1701 à 1712, il semble q assiste à une espèce de magie. Jamais spectacle ne plus surprenant par la variété, l'imprévu et la vigueu l'action. Ajoutez qu'il fait naître un genre d'émotion lui imprime un caractère à part. On admire et en m temps on ressent je ne sais quel chagrin mêlé de colè voir ce noble soldat, d'allure trop fanfaronne peut-être fut son défaut), mais d'humeur si vaillante et de tant génie, traversé vingt fois dans ses desseins et forcé renoncer au moment qu'il se flattait à bon droit de les f réussir. Villars et le Prince de Bade Le premier acte sur le Rhin de la lutte dramatique recommence, plus formidable que jamais, entre la mai de Bourbon et la maison d'Autriche, a pour point cul nant, en 1702, le 14 octobre, la victoire de Villars su Prince de Bade, en face d'Huningue, à Friedlingen, victoire dont ses ennemis à la cour prétendirent fa honneur au maréchal de camp de Magnac et à sa ca lerie, tout comme on a voulu, depuis, attribuer à Kell mann celle de Marengo. Les années s'écoulent, les évé ments se succèdent, les hommes disparaissent: la malign humaine demeure. Catinat, envoyé en disgrace sur le Rhin, après |