DE LA RÉVOLUTION D'ANGLETERRE. LIVRE QUATRIÈME. Début de la guerre civile. Le roi plante son étendard à Nottingham. Bataille d'Edgehill. Terreurs de Londres. Combat de Brentford. Tentatives de négociation. Caractère de la guerre civile. La reine revient du conti des partisans de la paix dans les chambres. pour marcher sur Londres. Ils échouent. Projets du roi Siége de Glo cester. Essex fait lever le siége. Bataille de Newbury. Mort de lord Falkland. Alliance du parlement avec les Écossais. A la nouvelle de ces dispositions, libre aussi de toute incertitude, le roi à son tour déploya plus de vigueur. Un petit convoi lui était arrivé de Hollande, et la reine en promettait de nouveaux ('). Les commissaires qu'il avait chargés de recruter en son nom, le marquis de Hertford, le comte de Northampton, lord Strange, sir Ralph Hopton, sir Henri Hastings, obtenaient dans les comtés de l'ouest et du nord quelques succès (2). Goring, gouverneur de Portsmouth, s'était déclaré en sa faveur (3). Les cavaliers se levaient de toutes parts; ils se répandaient dans les campagnes, entraient de force dans les maisons des amis du parlement, enlevaient l'argent, les chevaux, les armes, et arrivaient à York déjà fiers de leurs victoires et de ce facile butin. Charles comprit que de tels désordres feraient grand tort à sa cause, et pour les réprimer, tout en excitant le zèle des royalistes, il parcourut en personne les comtés d'York, de Leicester, de Derby, de Nottingham, de Lincoln, convoquant partout la noblesse, la remerciant de sa fidélité, l'exhortant au bon ordre, à la prudence; plus actif, plus affable qu'il n'avait coutume de paraître, soigneux même de parler au peuple, et protestant partout (1) Clarendon, Hist. of the rebell., t. IV, p. 173. (2) May, Hist. du Long-Parl., t. II, p. 16-23. (3) Clarendon, Hist. of the rebell. t. IV, p. 243 et suiv. Hist., t. II, col. 1440. de son ferme attachement à la religion et aux lois du pays (1). Ces rassemblements, ces discours, les gentilshommes quittant ou fortifiant leurs châteaux, les bourgeois relevant les murs de leurs villes, les routes couvertes de voyageurs armés, les milices s'exerçant chaque jour, tout offrait l'aspect de la guerre déclarée, tout en faisait naître, à chaque instant et sur tous les points du royaume, l'envie et l'occasion. Déjà même le sang avait coulé en plusieurs rencontres, plutôt des rixes que des combats (2). Déjà le roi, par deux tentatives, qui échouèrent, sur les places de Hull et de Coventry, avait donné sujet au parlement de lui imputer la première agression (3). L'un et l'autre parti redoutaient également ce reproche, prêts l'un et l'autre à tout risquer pour soutenir leurs droits, mais tous deux tremblants d'avoir à répondre de l'avenir. Le 23 août enfin, Charles résolut d'appeler officiellement ses sujets aux armes, en plantant à Nottingham l'étendard royal. A six heures du soir, sur le sommet de la colline qui domine la ville, escorté de huit cents chevaux et (1) May, Hist. du Long-Parl., t. II, p. 40-41, 55, dans ma CollecClarendon, Hist. of the rebell., t. IV, p. 216 et suiv. tion. (2) May, Hist. du Long-Parl., t. II, p. 16. Whitelocke, p. 59, (3) Clarendon, Hist. of the rebell., t. IV, p. 257. t. II, col. 1456. d'un faible corps de milice, il fit d'abord lire sa proclamation. Déjà le héraut avait commencé; un scrupule s'éleva dans l'esprit du roi; il reprit le papier, et, sur son genou, corrigea lentement plusieurs passages, puis le rendit au héraut, qui lut avec peine les corrections. Les trompettes sonnèrent, l'étendard approcha, portant pour devise: «Rendez à César ce qui appartient à » César. » Mais on ne savait où l'attacher, ni comment se passait jadis cette antique forme de la convocation des vassaux par le suzerain. Le temps était sombre; le vent soufflait avec violence. On dressa enfin l'étendard dans l'intérieur des murs du château, au haut d'une tour, à l'exemple du roi Richard III, le dernier dont on se souvînt. Le lendemain le vent l'avait abattu. « Aussi, » pourquoi le placer là? dit le roi; il fallait le » mettre dans un lieu ouvert, où chacun pùt en >> approcher, non dans une prison. » Et il le fit transporter hors du château, près du parc. Quand les hérauts voulurent l'enfoncer en terre, ils s'aperçurent que le sol n'était qu'un roc très dur. Avec leurs poignards ils creusèrent un petit trou pour y fixer le bâton, mais il ne tint pas, et pendant quelques heures on fut obligé de le soutenir à bras. Les assistants se retirèrent, l'esprit trou blé de sinistres présages ('). Le roi passa quelques jours à Nottingham, attendant, mais en vain, que le pays répondit à son appel. L'armée du parlement se formait à quelques lieues de là, à Northampton, déjà forte de plusieurs régiments. << S'ils veulent tenter un coup de main, dit sir » Jacob Astley, major général des troupes royales, » je ne réponds pas que le roi ne soit enlevé dans >> son lit (2). » Quelques membres du conseil le pressèrent de tenter encore une négociation. « Quoi, » déjà, dit-il, au début de la guerre, avant même >> qu'elle ait commencé! » On insista, au nom de sa faiblesse. Quatre députés (3) partirent pour Londres (*), et revinrent sans succès; l'un d'eux, lord Southampton, n'avait pas même pu obtenir de remettre en personne son message à la chambre (5). Le roi quitta Nottingham (6), et, malgré son regret de s'éloigner de Londres, instruit que les comtés de l'ouest montraient plus de zèle pour (1) Rushworth, part. 3, t. I, p. 783. rebell., t. IV, p. 258. - Clarendon, Hist. of the William Lilly, Observations on the life and death of king Charles, dans les Select Tracts de M. Mazères, t. I, p. 176. (2) Clarendon, Hist. of the rebell., t. V, p. 2. (3) Les comtes de Southampton et Dorset, sir John Colepepper et sir William Uvedale. (4) Le 25 août 1642. (5) Parl. Hist., t. II, col. 1458-1460. (6) Vers le milieu de septembre, |