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s'engagea dans les défilés de Cornouailles, en faisant demander à Londres des renforts. Le peuple ne se leva point en sa faveur, les vivres étaient rares, déjà le roi le serrait de près. Il écrivit de nouveau à Londres que sa situation devenait périlleuse, qu'il fallait absolument que Waller ou quelque autre, par une diversion sur les derrières de l'armée du roi, mît la sienne en état de se dégager. Le comité des deux royaumes fit grand bruit de son malheur, et parut animé d'une extrême ardeur à le secourir on prescrivit des prières publiques ('); on donna des ordres à Waller, à Middleton, à Manchester même, revenu du nord avec une portion de son armée; à leur tour ils étalèrent le plus vif empressement : « Que >> l'on m'envoie de l'argent et des hommes, écrivait » Waller. Dieu m'est témoin que ce n'est pas ma » faute si je ne vais pas plus vite; que la honte et >> le sang retombent sur la tête de ceux qui me >> retardent! Si l'argent ne m'arrive pas, j'irai sans » argent. » Et il ne marcha point. Middleton tint le même langage, se mit en mouvement, et s'arrêta au premier obstacle. Aucun corps ne se détacha de l'armée de Manchester (2). Rassurés par la

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(1) Le 13 août 1644. Rushworth, part. 3, t. II, p. 697. (2) Whitelocke, Memorials, etc., p. 97 et suiv. - Mémoires de Ludlow, t. I, p. 143, dans ma Collection.

victoire de Marston-Moor, les meneurs indépendants, Vane, Saint-John, Ireton, Cromwell, étaient charmés d'acheter par un grand échec la ruine de leur ennemi.

Ils ne se doutaient pas qu'à ce moment même, et dans sa détresse, Essex tenait peut-être leur sort dans ses mains: le 6 août, à son quartier général de Lestithiel, une lettre du roi lui fut remise, pleine d'estime, de promesses, et qui le pressait de rendre la paix à son pays. Lord Beauchamp, neveu du comte, était porteur du message; plusieurs colonels de son armée y semblaient favorables (1). « Je ne répondrai point, dit Essex; » je n'ai qu'un conseil à donner au roi, c'est de >> retourner auprès de son parlement. >> Charles n'insista point; peut-être même, malgré le désastre de Marston-Moor, souhaitait-il assez peu l'intervention d'un tel médiateur. Mais la paix avait, auprès de lui, des partisans plus obstinés; l'esprit d'indépendance et d'examen gagnait les royalistes; le nom du roi n'exerçait plus sur eux son ancien empire, et dans leurs réunions beaucoup d'officiers débattaient librement les affaires publiques et ses volontés. Persuadés que, si Essex

(1) Entre autres les colonels Weare et Butler. (Rushworth, part, 3, t. II, p. 710.)

avait repoussé toute ouverture, c'est

que les pro

messes du roi lui semblaient sans garantie, ils résolurent de lui offrir la leur, et de l'inviter à s'aboucher avec eux. Les lords Wilmot et Piercy, commandants de la cavalerie et de l'artillerie, étaient à la tête de ce dessein: l'un audacieux, spirituel, buveur infatigable, et cher à l'armée par la joyeuse affabilité de son humeur; l'autre froid et hautain, mais hardi dans ses propos, et tenant une bonne table qu'il faisait partager à beaucoup d'officiers. Informé de leurs démarches et du projet de lettre qui circulait en leur nom, Charles en ressentit une vive colère; cependant l'intention plaisait, même à des hommes qui blàmaient le moyen. Le roi, n'osant l'interdire, prit le parti de l'approuver la lettre devint un acte officiel avoué de lui, et signé du prince Maurice et du comte de Brentford, général en chef de l'armée, comme de ses premiers auteurs; un trompette la porta au camp ennemi (1). « Milords, répondit Essex, vous >> avez eu soin d'exprimer, dès les premières lignes » de votre lettre, en vertu de quelle autorisation >> elle m'était adressée; je n'ai reçu, du parlement » que je sers, aucune autorisation pour traiter, et

(1) Le 9 août 1644.

>> ne pourrais m'y prêter sans trahir mon serment. » Je suis, milords, votre très humble serviteur. >> ESSEX. >> Un refus si sec piqua vivement les royalistes; toute tentative de négociation fut abandonnée. Wilmot et Piercy perdirent leur commandement, et les hostilités reprirent leur cours (1).

Essex se vit bientôt dans une situation désespérée il combattait chaque jour, et pour tomber chaque jour dans un plus grand péril; ses soldats se lassaient, des complots fermentaient dans leurs rangs (2); le roi resserrait de plus en plus ses lignes, élevait partout des redoutes. Déjà l'espace manquait aux cavaliers du comte pour recueillir des fourrages; à peine lui restait-il quelques libres communications avec la mer, seule voie par où il pût se procurer des vivres ; dans les derniers jours d'août enfin, il était cerné de si près que, des hauteurs environnantes, les royalistes pouvaient voir tout ce qui se passait dans son camp. Dans cette extrémité, il donna ordre à la cavalerie, commandée par sir William Balfour, de se faire jour, comme elle pourrait, à travers les postes

(1) Rushworth, part. 3, t. II, p. 691-697. — Clarendon, Hist. of the rebell., t. VII, p. 170-181.

(2) Rushworth, part. 3, t. II, p. 698.

ennemis, et se mit en marche avec l'infanterie pour tâcher d'atteindre le port de Foy. A la faveur de la nuit et d'un brouillard, la cavalerie réussit à passer entre deux corps royalistes; mais l'infanterie, engagée dans des chemins étroits et fangeux, poursuivie par toute l'armée du roi, contrainte d'abandonner à chaque pas des canons et des bagages, perdit enfin tout espoir de salut. On parla hautement de capituler. Abattu, troublé, préoccupé du seul désir de se soustraire à tant d'humiliation, Essex, sans consulter personne, suivi seulement de deux officiers (1), partit tout à coup, gagna la côte, et se jeta dans un bateau qui fit voile pour Plymouth, laissant son armée sous les ordres de Skippon, major général (2).

Dès que son départ fut connu, Skippon convoqua un conseil de guerre : « Messieurs, dit-il, vous >> voyez que notre général et quelques uns de nos

principaux chefs ont jugé à propos de nous aban» donner; notre cavalerie est partie; nous restons >> seuls chargés de nous défendre. Voici ce que je >> vous propose : nous avons le même courage que

(1) Sir John Merrick, qui commandait l'artillerie, et lord Robarts lui-même, qui avait décidé Essex à entrer dans le pays de Cornouailles. (2) Rushworth, părt. 3, t. II, p. 699–703. Clarendon, list. of the rebell., t. VII, p. 182-190. Whitelocke, p. 98.

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