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ton Gurdon, dans les sermons qu'il prêcha en 1721 et 1722, pour la fondation de Boyle. « De nos jours, disoit-il, le système de Hobbes n'a que trop gagné dans le monde. Tout y est plein de gens qui paroissent avoir adopté ses idées, et qui tâchent même de les répandre. On dit que celles du bien et du mal moral sont purement arbitraires, qu'il y entre beaucoup de caprice; que la mode en décide, comme de toute autre chose; que chaque nation a les siennes qui ne sont pas celles de ses voisins; que les princes les étendent ou les rétrécissent, selon les intérêts des états; et qu'au fond, c'est cet intérêt, tant public que particulier, qui est la grande raison comme le premier mobile des affaires humaines. On ajoute qu'il paroît assez, au train commun de ce qui se passe actuellement dans toutes les sociétés, que Dieu re• garde d'un œil indifférent tout ce qui se fait sur la terre, puisqu'il ne mesure ni les châtimens, ni les récompenses sur le mérite ou démérite. » On verra daus le cours de cette histoire que Locke, quoique beaucoup plus mesuré que Hobbes, avoit singulièrement contribué à répandre la philosophie de ce dernier, en lui donnant une forme moins hidense, et par cela même plus séduisante.

Les grands jurés du comté de Middlesex, dans la dénonciation qu'ils firent l'année suivante au banc du roi, de la Fable des Abeilles, exprimèrent leur douleur et leur inquiétude sur la licence d'une foule de livres qui se publioient chaque jour contre la religion, et qui, en propageant l'incrédulité, en corrompant la morale, ébranloient l'édifice de l'état jusque dans ses fondemens. « Les téméraires auteurs de tant d'ouvrages impies, disoient ces magistrats, blasphement ouvertement contre les principaux mystères du christianisme, et nient absolument ceux de la trinité et de l'incarnation: ils rejettent la providence et soumettent tout à un destin irrévocable: ils s'efforcent de répandre de fausses insinuations sur le clergé, afin de les faire refluer sur la religion même : ils affectent de décrier les corps chargés de l'instruction publique, et spécialement les écoles où s'enseignent les principes élémentaires du christianisme : ils représentent artificieusement la religion et la vertu comme préjudiciables à la société; et ne recommandent, comme étant les vraies sources de la prospérité publique, que le luxe, la vanité, et en général tout ce qui favorise les vices des particuliers. >> Il paroît qu'à cette époque, il s'étoit formé à Londres des clubs, ou sociétés de jeunes gens, dans lesquels on faisoit profession d'insulter, de la manière la plus impie, aux objets les plus sacrés de la religion, de blasphémer contre Dieu même, et d'attaquer les principes de la morale naturelle. C'est ce que nous apprenons d'un ordre émané, le 28 avril 1721, du conseil de George I, pour faire rechercher et punir les affidés de ces sortes d'assemblées.

XII. Certes, entre les rigueurs de l'inquisition et les excès d'une telle licence, il est des voies que la religion autorise et que la bonne politique exige pour arrêter le cours de l'impiété. Les Anglois, moins sages en cela que les Payens, avoient tort de permettre la propagation de toutes ces doctrines qui tendoient au renversement de la religion qu'ils professoient, et à l'anéantissement de la morale, dont dépend la distinction des vertus et des vices, le bon ordre de l'état et la tranquillité des particuliers. « On a de la peine à croire, leur disoit à ce sujet un auteur de cette nation, que dans un pays où T'on fait profession du christianisme souffre impunément qu'une troupe d'impies répandît son fiel et son venin sur tout ce que la religion a de plus sacré : aussi peut-on dire qu'il n'y a qu'en Angleterre où un tel scan

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dale demeure impuni. L'Ecriture-Sainte tournée en ridicule; Moïse et les Prophètes traités de fourbes et d'imposteurs; Jésus - Christ comparé à Apollonius, et la religion aux superstitions payennes: ce sont là des blasphêmes que les Celse et les Porphyre, les Hiéroclès et les Julien ont autrefois proférés, et que nous voyons aujourd'hui renouvelés avec la même fureur. » (1)

Cependant la licence fut portée à un tel excès, sous la reine Anne, que cette princesse se crut obligée de presser le parlement de réprimer, par de sages lois, le cours des livres impies et séditieux, dont le nombre, ainsi que l'audace de leurs auteurs, alloient toujours croissant. On vient de voir l'ordre émané du conseil de George I, tendant à réprimer le même désordre. Mais, que peuvent des lois répressives chez un peuple dont les mœurs sont foncièrement corrompues, et surtout lorsque sa dépravation est alimentée par un double principe religieux et politique, comme elle l'étoit en Angleterre par celui de l'examen particulier, qui est fondamental

(1) Méthode courte et facile pour démontrer la vérité de la Religion chrétienne.

dans la religion nationale, et par celui de la liberté de la presse qui tient essentiellement à la constitution du pays? Il y eut bien, en divers temps, des procédures commencées contre quelques-uns des plus audacieux incrédules, tels que Tindall, Toland et cer tains autres. Mais si l'on excepte celle contre Woolston, aucune ne fut suivie, aucune n'eut l'effet de suspendre le cours des livres impies. Les auteurs contre lesquels elles avoient été intentées, continuèrent d'écrire dans le même esprit et sur les mêmes principes. Collins même, l'un des plus dangereux ennemis de la religion, ne cessa de l'attaquer par des écrits publics, et n'en jouissoit pas moins paisiblement d'un emploi civil qu'il tenoit du gouvernement. Si quelquefois le clergé et les universités entreprirent de sévir contre les coupables, leur zèle fut presque toujours paralysé par le crédit de leurs pro

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tecteurs.

XIII. Si, malgré tant de moyens qui favorisoient l'incrédulité, l'Angleterre n'est pas tombée dans un état complet d'irreligion, c'est qu'elle dut son salut à quelques causes particulières, qu'il ne sera pas hors de propos de faire remarquer. On y sentit de bonne heure combien il est utile, même en poli

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