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par semaine pour en offrir au parlement la valeur ; une ordonnance convertit cette offre en une taxe obligatoire pour tous les habitants de Londres et des environs 1. Des droits de consommation jusquelà inconnus furent établis sur le vin, le cidre, la bière, le tabac, et beaucoup d'autres denrées. Le comité des séquestres redoubla de rigueur 3. A l'ouverture de la campagne, le parlement entretenait cinq armées : celles des Écossais, d'Essex et de Fairfaix, aux frais du trésor public; celles de Manchester et de Waller par des contributions locales perçues chaque semaine dans certains comtés chargés aussi de les recruter 4. Ces forces s'élevaient à plus de cinquante mille hommes1, et le comité des deux royaumes en disposait à son gré.

1 Le 26 mars 1644; Rushworth, part. 3, t. 2, p. 748.

2 Les 16 mai 1643 et 8 juillet 1644; Parl. Hist., t. 3, col. 114,

276.

* Parl. Hist., t. 3, col. 174, 257; Rushworth, part. 3, t. 2, p. 760.

* Les sept comtés confédérés de l'est, Essex, Suffolk, Norfolk, Hertford, Cambridge, Huntington, Lincoln et Ely, étaient imposés, pour l'entretien de l'armée de Manchester, à 8,445 liv. st. par semaine (environ 211, 125 fr.). Les quatre comtés du sud, Southampton, Sussex, Surrey et Kent, pour l'entretien de l'armée de Waller, à 2,638 liv. sterl. par semaine (environ 70,950 fr.). L'armée d'Essex coûtait par mois au trésor public 30,504 liv. st. (environ 762,500 fr.) (Rushworth, part. 3, t. 2, p. 621, 654). L'armée d'Ecosse coûtait 31,000 liv. sterl. (775,000 fr.) par mois. Je n'ai pu découvrir aucune évaluation précise de ce que coûtait l'armée de Farfax: tout indique qu'elle était plus irrégulièrement payée que les autres, et peut-être en partie par des contributions locales, en partie par des secours du parlement. (Mémoires de Fairfax, p. 384, dans ma Collection.)

Malgré la présomption qui régnait dans Oxford, une vive inquiétude tarda peu à s'y manifester : on s'étonnait de ne plus recevoir de Londres aucune information précise, et que le secret fût si bien gardé sur les desseins du parlement; on savait seulement qu'il faisait partout de grands préparatifs, que le pouvoir se concentrait aux mains des plus hardis meneurs, qu'ils parlaient de mesures décisives, que toutes choses enfin prenaient un sinistre aspect. Tout à coup se répandit le bruit qu'Essex et Waller s'étaient mis en mouvement, et marchaient sur Oxford pour l'assiéger. La reine, grosse de sept mois, déclara aussitôt qu'elle voulait partir; en vain quelques membres du conseil se hasardèrent à déplorer le fâcheux effet d'une telle résolution; en vain Charles lui-même témoigna quelque désir de l'en voir changer; l'idée seule d'être enfermée dans une place assiégée lui était, dit-elle, insupportable, et elle mourrait si on ne lui permettait pas de se retirer vers l'ouest, dans quelque lieu où elle pût accoucher loin de la guerre, et s'embarquer même pour la France, en cas de pressant danger. Hors d'elle-même à la moindre objection, elle s'emportait, suppliait, pleurait; personne n'insista plus; le chef-lieu du comté de Devon, Exeter, fut choisi pour son séjour, et, vers la fin d'avril, elle quitta son mari qui ne la revit jamais 1.

1 L'armée écossaise était forte de vingt et un mille hommes; celle d'Essex de dix mille cinq cents; celle de Waller de cinq mille cent; celle de Manchester de quatorze mille; celle de Fairfax de cinq à six mille : en tout environ cinquante-six mille hommes. (Rushworth, part. 3, t. 2, p. 603, 621, 654; Mémoires de Fairfax.) 1 Clarendon, Hist. of the Rebell., t. 7, p. 112.

La nouvelle qui l'avait frappée d'épouvante était fondée; Essex et Waller s'avançaient en effet pour bloquer Oxford. D'autre part, Fairfax, Manchester et les Écossais devaient se réunir sous les murs d'York, et l'assiéger en commun. Les deux grandes villes et les deux grandes armées royalistes, le roi et lord Newcastle, étaient ainsi attaqués à la fois et par toutes les forces du parlement. Tel était le plan simple et hardi que le comité des deux royaumes venait d'adopter.

Vers la fin de mai, Oxford était presque entièrement investi: les troupes du roi, successivement débusquées des places qu'elles occupaient aux environs, avaient été contraintes de se replier, les unes dans la ville, les autres sur un seul point hors des murs, du côté du nord; aucun secours ne pouvait arriver à temps; le prince Robert s'était enfoncé dans le comté de Lancaster; le prince Maurice assiégeait le port de Lyme dans celui de Dorset; lord Hopton était à Bristol occupé de préserver cette importante place des intelligences qu'y entretenait l'ennemi. Un renfort de huit mille hommes, miliciens de Londres, mettait Essex en état de compléter le blocus. Le péril semblait si pressant, qu'un des plus fidèles conseillers du roi lui proposa de se rendre en personne au pouvoir du comte. « Il se >> peut, dit Charles indigné, qu'on me trouve entre >>> les mains du comte d'Essex, mais je serai mort1.» Cependant le bruit se répandit à Londres que, ne sachant comment échapper, il formait en effet le dessein soit d'arriver brusquement dans la Cité, soit de se mettre sous la protection du lord général. L'alarme des communes fut aussi vive qu'avait pu l'être l'indignation du roi : « Milord, » écrivirent-elles surle-champ à Essex, «un bruit général circule ici >> que sa Majesté veut venir à Londres; nous dési>> rons que votre Seigneurie ne néglige rien pour en >> découvrir le fondement; et si jamais vous aviez >> lieu de croire que sa Majesté se propose de se >> retirer soit ici, soit à votre armée, nous enten>> dons que vous en informiez aussitôt les cham>> bres, et ne fassiez rien sans leur aveu. » Essex comprit quelle méfiance couvraient ces paroles. << J'ignore absolument, répondit-il, d'où est venu >> le bruit que sa Majesté veut aller à Londres; je >> ferai de mon mieux pour en découvrir l'origine; >> mais Londres est le lieu où l'on peut en savoir le >> plus à ce sujet, car pas un mot n'en a été dit » dans cette armée. Si je viens à apprendre que le >> roi ait quelque intention de se rendre à l'armée >> ou au parlement, je vous en informerai sans délai; >> mais je ne conçois pas qu'il y ait la moindre rai>> son d'y croire ; et, dans tous les cas, je serais, >> je pense, le dernier à entendre parler 1.>>>

1 Clarendon, Hist. of the Rebell., t. 7, p. 128.

Un bruit bien différent, et plus certain, vint surprendre le parlement et l'armée; le roi leur avait échappé. Le 3 juin, à neuf heures du soir, suivi du prince de Galles, et laissant dans la place le duc d'York avec toute la cour, il était sorti d'Oxford, avait passé entre les deux camps ennemis, et, rejoignant un corps de troupes légères qui l'attendait du côté du nord, s'était mis rapidement hors d'atteinte 2.

La surprise fut extrême, et la nécessité d'une prompte résolution évidente. Le siége d'Oxford devenait sans objet; les deux armées n'avaient plus rien à tenter en commun; le roi en liberté serait

1 Parl. Hist., t. 3, col. 266; la lettre des chambres à Essex est du 15 mai 1644, et sa réponse du 17 mai.

2 Clarendon, Hist. of the Rebell., t. 7, p. 129; - Rushworth, part. 3, t. 2, p. 671.

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