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personne n'eût osé s'y montrer ouvertement contráire; et depuis plus de six mois, un comité de membres des deux chambres et de commissaires écossais travaillait à rédiger des propositions. Tout à coup le parti presbytérien pressa vivement ce travail; en peu de jours les propositions furent présentées aux chambres, débattues, adoptées 1; et le 20 novembre, neuf commissaires partirent pour les porter au roi. Ils le croyaient à Wallingford, et se présentèrent devant la place: après deux heures d'attente et de chicanes sur leur mission, leur sauf-conduit, leur suite, le gouverneur, le colonel Blake, les reçut enfin pour leur dire que le roi était parti, et qu'ils le trouveraient probablement à Oxford. Ils voulaient coucher à Wallingford; mais la conversation entre Blake et lord Denbigh, président du comité, devint bientôt si vive, les propos de Blake étaient si rudes, et l'attitude de sa garnison si menaçante, qu'ils jugèrent prudent de se retirer sans délai. Le lendemain, arrivés près d'Oxford, ils s'arrêtèrent sur une petite colline, à cinq cents pas de la ville, et se firent annoncer au gouverneur par un trompette. Quelques heures se passèrent; aucune réponse ne leur parvenait. Le roi, se promenant dans son jardin, aperçut sur la colline le groupe que formaient les commissaires et leur suite, demanda qui étaient ces gens-là, et sur l'explication qui lui fut donnée, il envoya sur-lechamp M. Killigrew avec ordre de les introduire dans la place, de pourvoir à leur logement, et de leur exprimer son regret qu'on les eût fait attendre si longtemps. Comme ils passaient dans les rues d'Oxford, sous l'escorte de quelques cavaliers, la multitude s'attroupait, les accablait d'injures, leur jetait même des pierres et de la boue. Parvenus à une mauvaise auberge, à peine y étaient-ils établis qu'un violent tumulte s'éleva près de leur appartement; Hollis et Whitelocke sortirent aussitôt ; quelques officiers royalistes étaient entrés dans la grande salle et se querellaient avec les gens des commissaires, les traitant, eux et leurs maîtres, de misérables, traîtres, rebelles, et ne voulant pas souffrir qu'ils approchassent de la cheminée. Hollis saisit un des officiers au collet, et le secouant rudement, le poussa hors de la salle, en lui faisant honte de sa conduite. Whitelocke en fit autant; les portes de l'auberge furent fermées; le gouverneur y plaça une garde. Dans la soirée, plusieurs membres du conseil, Hyde entre autres, vinrent voir les commissaires, s'excusèrent de ces désordres, leur témoignèrent un extrême désir de concourir avec eux à la paix, et le roi leur fit dire qu'il les recevrait le lendemain1.

juillet 1644, eut une audience du parlement le 14 août, et quitta l'Angleterre en février 1645 (Parl. Hist., t. 3, col. 252, 253, 278, 285, 293, 298, 314; Clarendon, Hist. of the Rebell., t. 6, p. 317323).

1 Le 8 novembre 1644; Parl. Hist., t. 3, col. 299.

L'audience fut courte : lord Denbigh lut à haute voix, en présence du conseil et de la cour, les propositions du parlement : elles étaient telles que le roi ne pouvait se croire réduit à les accepter; on lui demandait de livrer son pouvoir à la méfiance des chambres, et son parti à leur vengeance : plus d'une fois un murmure de colère s'éleva parmi les assistants; au moment surtout où lord Denbigh nomma les princes Robert et Maurice, qui se trouvaient là, comme exclus de toute amnistie, un rire bruyant fut près d'éclater; mais le roi, se retournant d'un air sévère, imposa silence à tout le monde, et continua d'écouter avec patience et gravité. La lecture finie : « Avez-vous pouvoir de traiter? dit-il à lord >> Denbigh. - Non, Sire; notre mission se borne >> à présenter à votre Majesté les propositions, et à >> solliciter sa réponse par écrit. - Eh bien, je vous >> la remettrai dès que je pourrai; » et les commis

saires retournèrent chez eux.

Le soir même, et de l'aveu de leurs collègues, Hollis et Whitelocke firent une visite à lord Lindsey, gentilhomme de la chambre, autrefois leur ami, et que ses blessures avaient empêché d'aller les voir. A peine étaient-ils chez lui depuis un quart d'heure que le roi y entra; et s'avançant vers eux avec bienveillance : « Je suis faché, messieurs, >> leur dit-il, que vous ne m'ayez pas apporté des >> propositions plus raisonnables. - Sire, dit Hollis, >> ce sont celles que le parlement a cru devoir adop>> ter, et j'espère qu'on en pourra tirer de bons ré>> sultats. LE ROI. Jesais bien; vous ne pouviez ap>> porter que ce qu'on voulait envoyer; mais j'avoue >> que quelques-unes de ces propositions m'éton>> nent grandement : à coup sûr, vous-mêmes ne >> pouvez croire qu'il soit de la raison ni de mon >> honneur de les accorder. - HOLLIS. Il est vrai, >> Sire; j'aurais desiré qu'elles ne fussent pas toutes >> ce qu'elles sont; mais votre Majesté sait que ces >> choses-là se décident à la majorité. - LE ROI. Је >> le sais, et suis bien sûr que vous et vos amis >> (je ne veux pas dire votre parti) avez fait tous >>> vos efforts dans la chambre pour qu'il en fût au>> trement, car je sais que vous souhaitez la paix. WHITELOCKE. J'ai eu l'honneur de me rendre >> plusieurs fois dans ce dessein aupres de votre >> Majesté, et je m'afflige de n'avoir pas encore » réussi. LE ROI. Je voudrais, M. Whitelocke, >> que les autres fussent de votre avis, et de l'avis >> de M. Hollis, et je crois qu'alors nous verrions >> bientôt une heureuse fin de nos différends; car

1 Le 2 novembre 1644; Whitelocke, p. 107, Parl. Hist., t. 3, col. 310.

* Parl. Hist., t, 3, col. 310.

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moi aussi je veux la paix; et pour preuve, comme >> aussi pour vous témoigner la confiance que je >> vous porte à vous deux qui êtes ici avec moi, >> donnez-moi vos conseils, je vous prie, sur la ré>> ponse qu'il me convient de faire à ces proposi

>> tions, pour qu'elles mènent à la paix.-HOLLIS,

>> Votre Majesté nous excusera si, dans notre situa>> tion actuelle, nous ne croyons pas pouvoir ļuį >> donner de conseil.

WHITELOCKE. C'est par

>> accident que nous avons l'honneur d'être ici en >> présence de votre Majesté; et les fonctions dont >> nous sommes revêtus ne nous permettent pas de >> la conseiller en cette occasion, fussions-nous

>> d'ailleurs capables de le faire.

LE ROI. Quant >> à votre capacité, j'en suis juge: or maintenant >> je ne vous considère pas du tout comme membres >> du parlement; c'est à titre d'amis et de simples par>> ticuliers, mes fidèles sujets, que je vous demande >> votre opinion. - HOLLIS. Comme simples parti>> culiers, votre Majesté doit trouver que nous en >> avons use bien librement; quant à votre réponse, >> Sire, la meilleure serait de revenir en personne >> au milieu de nous. - LE ROI. Comment pour>> rais-je retourner à Londres avec sûreté? - HOL>> LIS. J'ai la confiance qu'il n'y aurait pour votre >> Majesté aucun danger.- LE ROI. C'est une ques>> tion, et je suppose que les maîtres qui vous ont >> envoyés veulent une prompte réponse à leur mes

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